Changer dans la continuité
Cet été, j’ai rejoint l’École polytechnique. Trente-cinq ans après ma première rentrée, « tout » n’a pas changé.
L’École est toujours classée première et la qualité des étudiants se maintient. En septembre 2012, les X sont repartis à La Courtine, comme c’était déjà le cas en 1977. Les promotions sont encore structurées par les sections sportives. Les professeurs se plaignent toujours de l’absentéisme pour les cours en amphithéâtre. La présence en « petites classes » reste satisfaisante. Une campagne Kès digne des précédentes a eu lieu. Des arbres ont poussé autour des bâtiments. Certains ont vieilli. Les caserts ont été rénovés. Ce que nous appelions « le couloir de la mort » tant il était glacial s’est transformé en salles d’enseignement neuves.
Mais il y a deux changements majeurs.
Le lien entre enseignement et recherche s’est considérablement développé. Dans le projet scientifique collectif, dans le stage recherche, et de façon plus diffuse au cours du reste de la scolarité, le contact avec les laboratoires est devenu une réalité vécue par les élèves. Du reste, plus du quart d’entre eux continue ses études par une thèse.
L’autre changement, c’est l’ouverture internationale. 20 % des élèves du cycle polytechnicien, encore davantage en master et en doctorat sont de nationalité étrangère.
L’internationalisation, c’est aussi la compétition accrue entre les établissements d’enseignement et de recherche. Plus qu’au siècle précédent, les familles françaises pensent à envoyer leurs enfants suivre des études supérieures à l’étranger.
L’enjeu pour l’École, c’est de garder sa position d’excellence à l’échelle des standards mondiaux.
C’est aussi un enjeu pour la France car, si les familles françaises perdaient leur confiance dans l’éducation à la française, c’est toute la compétitivité du pays qui finirait par en être affectée.
Pour cela, l’École doit mener son projet au plus haut niveau. Elle doit former des ingénieurs scientifiques, c’est-à-dire développer une formation à la fois pluridisciplinaire et solide scientifiquement dans chacune des disciplines. Elle doit aussi poursuivre le développement de la recherche, avec, en particulier, une présence plus forte des sciences du vivant et des initiatives pour l’ingénierie des systèmes. Enfin, il faut faire un effort pour encourager l’innovation et l’esprit entrepreneurial.
En faisant cela, l’École répond, j’en suis convaincu, aux besoins de la société et des entreprises et mérite la confiance des contribuables, des chercheurs, des étudiants et de leurs futurs employeurs.
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Et le concours d’entrée
L’élément qui façonne le plus l’école est probablement le concours d’admission.
Hors ce dernier a évolué au moins autant que les enseignements, il comprends aujourd’hui 7 filières indépendantes : MP‑I : Math-Physique, option Informatique (110 places), MP‑P&SI : Math-Physique, option Physique+Techno (80), PC : Physique-Chimie (140), PSI : Math-Physique-Techno (47) PT : Techno (ex prepa art et métier) (11 places) TSI : (2 places) Université : concours sur dossier + QCM + oral 1h (18 places) Auxquelles s’ajoutent plusieurs filières de recrutement d’élèves étrangers
Pour faire simple, ~40% du recrutement est la continuation du concours des années 70, les autres voies introduisant des matières qui exigent davantage de mémoire que de rigueur.
Cette évolution a 2 travers :
1) Elle dissuade les candidats de faire des maths en prépa. Hors, le bac n’exigeant plus de réelle démarche scientifique, c’est tout un modèle de pensée qui n’est plus enseigné.
2) L’école va diplomer un nombre croissant d’élèves n’ayant pas les qualités scientifiques que les industriels et les politiques associe à l’école.
Bien sûr, j’exprime la pensée rétrograde d’une personne sans vision stratégique, mais pourquoi, à chaque fois que l’on nous parle du fantastique virage que prends l’école pour entrer dans le 3e millénaire, oublie-t-on de nous parler des concours et des prof de taupe ? Pourtant les seuls qui ont marqué mon esprit ?