Chasseur de têtes : mode d’emploi
Les chasseurs de têtes ne traitent qu’une fraction des recrutements de cadres dirigeants. Mais leur approche spécifique du marché et leurs méthodes de travail leur permettent d’éliminer au mieux les facteurs de hasard dans les procédures de recrutement. Sur les missions qui leur sont confiées, ils peuvent donc offrir, tant aux entreprises qu’aux candidats, des services sans équivalent.
REPÈRES
En France, le marché se partage aujourd’hui entre les grands cabinets internationaux (anglo-saxons pour la plupart), les cabinets français et les « boutiques » spécialisées par secteur ou fonction. Malgré tout, les cabinets ne conduisent qu’une fraction des recrutements externes (1500 postes de dirigeants par an). Certains cabinets ont élargi leur offre à l’évaluation de dirigeants (management assessment), particulièrement utile lors d’une acquisition, d’une fusion ou du recrutement d’un candidat externe identifié par l’entreprise, sur lequel cette dernière souhaite un point de vue indépendant. D’autres pratiquent aussi le management de transition (interim management). En proportion, les cabinets travaillent d’avantage pour les entreprises de taille intermédiaire (SBF120, groupes privés) ou filiales de groupes étrangers que pour les entreprises du CAC40, ces dernières disposant de ressources internes importantes.
Le chasseur de têtes se justifie lorsque la population de candidats peut être ciblée précisément
Véritablement né aux États-Unis en 1946 chez Sydney Boyden, le métier de chasseur de têtes arrive en Europe dans les années soixante à travers plusieurs cabinets américains (Heidrick&Struggles, Korn Ferry, Spencer Stuart, Boyden). La profession est donc extrêmement récente et ce n’est que dans les années soixante-dix et quatre-vingt que les premiers cabinets européens (Egon Zehnder, Éric Salmon, Neumann) voient le jour en Europe continentale.
Les besoins de l’entreprise
Une démarche ciblée
Le client d’un chasseur de têtes attend une véritable démarche systématique pour identifier, approcher, qualifier et motiver les meilleurs candidats du moment sur un poste donné. Il s’agit bien d’une « chasse » sur une population limitée de candidats les plus qualifiés possibles (et parfois délicats à identifier et approcher) pour un poste donné et non d’une « pêche » pour trouver « des » candidats intéressés.
Pour l’entreprise, le chasseur de têtes se justifie lorsque la population de candidats peut être ciblée précisément (par géographie, entreprises ou fonctions), justifiant une approche directe. Souvent, les missions concernent des domaines où il n’y pas de candidat interne évident et dont l’entreprise maîtrise mal le « pool de candidats » externes soit parce qu’ils sont sectoriellement (nouvelle activité), fonctionnellement (juridique, achats, informatique, ressources humaines) ou géographiquement (filiale étrangère) éloignés.
Le client confie alors un mandat de recherche à un chasseur de têtes dans le but de recruter un candidat qui s’intégrera dans l’entreprise et réussira dans le poste. L’objectif va bien au-delà de l’envoi de CV et le cabinet joue un véritable rôle de conseil auprès de son client qu’il représente auprès des candidats, de façon comparable à celui d’un banquier conseil. Les mandats sont donc toujours exclusifs avec un niveau d’honoraires en général normés (1÷3 du package annuel) dont une partie importante (au moins la moitié) est payée d’avance et reste acquise quelle que soit l’issue de la mission.
Un guidage précis
Ce rôle de conseil d’un spécialiste est important à plusieurs étapes clés du processus. Tout d’abord, au niveau de la définition du poste, l’identification des » arguments de vente » et des terrains (entreprises, géographies, fonctions) où il sera le plus intéressant de chasser. Ensuite, dans l’estimation de la qualification des candidats, lors d’un entretien approfondi. Mais aussi en se renseignant sur eux de façon confidentielle (notamment auprès de leurs anciens collègues). Et encore dans la conduite des entretiens (auxquels le consultant pourra assister en observateur) avec les décideurs de l’entreprise et dans la négociation du contrat. Enfin, pour assurer la bonne intégration du candidat dans l’entreprise.
Dialoguer avec le candidat
Confidentialité des missions
Dans certains cas (notamment lorsqu’il s’agit de remplacer un dirigeant sans qu’il le sache), la mission est strictement confidentielle et les candidats n’auront les informations sur le poste qu’une fois que le cabinet aura validé leur adéquation et leurs motivations en face à face. Néanmoins, les missions sont rarement confidentielles pour le client : le fait que la société ABC engage un cabinet reconnu pour recruter le successeur du directeur juridique qui part à la retraite est positif pour l’image d’ABC.
Tout d’abord, il convient de rappeler que la confidentialité est absolue pour le candidat. Les informations qu’il fournit (notamment sur ses motivations et ce qui le pousserait à quitter son entreprise) sont à l’usage exclusif des mandataires de la mission du chasseur. Comme un DRH, le chasseur de têtes possède un grand nombre d’informations confidentielles qu’il n’utilisera qu’avec ceux » ayant besoin d’en connaître « .
Le cabinet ne peut remplir ses missions qu’avec une collaboration intelligente des candidats. Le chasseur de têtes s’intéressera aux personnes avec qui le candidat a travaillé, à ses réalisations, motivations et sa rémunération. Il ne faut jamais mentir même si on accepte d’omettre certaines expériences courtes : ne pas parler de démission s’il s’agit d’un départ négocié (ce qui arrive au moins une fois dans une carrière à la plupart des dirigeants), mais une mission courte (< six mois) n’est pas forcément utile à mentionner, surtout si elle est ancienne. Attention, l’information est facile à recouper, donc honnêteté et transparence avant tout.
Donner des informations
Entretien de courtoisie
Un candidat peut être appelé pour un « entretien de courtoisie » (c’est-à-dire faire connaissance sans poste à la clé) suite à l’envoi de son CV. Dans ce cas, il faut bien comprendre que la rencontre est au bénéfice potentiel des deux parties : pour le candidat qui se fera connaître de façon plus précise et pour le cabinet qui aura « recruté une source » sur une entreprise qui l’intéresse.
En retour, le cabinet donnera au candidat un maximum d’informations sur le poste ainsi qu’un feed-back complet, notamment lorsque son client a décidé de ne pas donner suite à sa candidature.
Si le candidat est déjà connu par le cabinet (y compris s’il a simplement envoyé un CV cinq ans plus tôt), le chasseur de têtes pourra l’appeler comme source, pour avoir confidentiellement son avis sur l’adéquation de personnes qu’il pourra connaître (anciens collègues) à un poste donné. Il lui demandera systématiquement son accord avant d’engager une conversation de ce type.
Réduire la part de hasard
Le cabinet ne peut remplir ses missions qu’avec une collaboration intelligente des candidats
Le chasseur de têtes doit donc faire preuve de capacités d’analyse pour rapidement comprendre le contexte du poste (problématique business, culture d’entreprise) mais aussi d’intuition pour parfaitement saisir les motivations réelles (parfois différentes de celles affichées) des candidats. Chaque mission est un projet spécifique et la construction d’une short-list de candidats ne laisse rien au hasard.
Ainsi, deux cabinets travaillant en parallèle sur la même mission devraient donner le même résultat, et ce, indépendamment de l’état de leur base de données et la connaissance préalable de tel ou tel candidat au démarrage de la mission.