Château Haut-Brion
Haut-Brion est à la fois le modèle et le précurseur des Grands Crus de Bordeaux. La renommée du cru, dont l’histoire s’étend sur plus de cinq siècles, est immense. Appartenant au cercle très fermé des Premiers Crus Classés, Haut-Brion est le seul cru classé en 1855 qui ne soit pas situé dans le Médoc.
La duchesse de Mouchy, maîtresse des lieux depuis 1975, appartient, avec les Rothschild de Lafite, à l’une des plus anciennes familles possédant un Premier Cru. C’est en effet en 1935 que son grand-père Clarence Dillon, un banquier new-yorkais, acheta le vignoble. C’est aussi le Premier Cru le plus associé à l’histoire politique et diplomatique. Le prince de Talleyrand fut propriétaire de Haut- Brion au début du dix-neuvième siècle. Il sut habilement utiliser ses vins pour servir sa diplomatie. Plus récemment, le père de la duchesse de Mouchy, Douglas Dillon, fut ambassadeur des États-Unis à Paris entre 1953 et 1957 , puis ministre des Finances du président Kennedy.
Une autre dynastie règne à Haut-Brion, celle des Delmas qui dirige la propriété depuis plus de quatre-vingts ans. Jean-Bernard Delmas a succédé à son père Georges en 1961 et son fils Jean-Philippe est prêt à prendre la relève. Cette continuité de propriété et de gestion est un facteur très favorable pour la gestion d’un grand cru, qui doit s’inscrire dans la durée.
Mais le grand atout de Haut-Brion, c’est d’abord son terroir. L’expérience a montré qu’il faut, pour produire un grand vin de Bordeaux, de très belles graves, une topographie de collines aux pentes accusées, un sol profond pénétrable aux racines, et un sous-sol assurant un drainage parfait. Haut-Brion réunit toutes ces caractéristiques et bénéficie aussi des avantages climatiques de la vallée de la Garonne : étés chauds et secs, beaux automnes. Étagé de 20 à 30 m, le vignoble échappe par ailleurs au brouillard de la basse vallée de la Garonne.
Dès 1961, Haut-Brion fut le premier à adopter des cuves en inox pour la vinification. Cet investissement suscita des critiques aujourd’hui bien dépassées, car depuis quarante ans, tous les grands domaines de Bordeaux ont adopté la cuve inox. Le goût de la recherche reste une des vocations du château, mais depuis quelques années, le sujet a quitté le cuvier pour les vignes : la priorité est accordée à la qualité du raisin, objet de nombreuses recherches portant notamment sur les clones.
Les 46 hectares du Château Haut-Brion sont situés dans la banlieue sud de Bordeaux. 42,2 hectares sont consacrés au vin rouge (45% de cabernet sauvignon, 37% de merlot et 18% de cabernet franc) et 2,7 hectares (63% de sémillon et 37% de sauvignon) au vin blanc. En rouge, Haut-Brion est un vin précoce, charnu, très savoureux avec un très beau bouquet de confiture caramélisée de fruits noirs et des notes fumées. Il se reconnaît souvent en dégustation par une touche de café froid en fin de bouche. Assez vite agréable à boire, il vieillit fort bien, faisant montre d’une remarquable longévité. Le vin blanc est délicieux mais produit en quantité confidentielle (9 600 bouteilles).
Le Domaine Clarence Dillon SA, propriétaire de Château Haut-Brion, est également propriétaire depuis 1983 du vignoble contigu de La Mission-Haut-Brion. Issu d’un terroir marqué par la même précocité, en termes de maturité des raisins, que Haut-Brion, La Mission est très proche de son illustre voisin. On y retrouve les mêmes qualités de finesse et de fondu avec cet inimitable bouquet fumé qui est la signature de ces grands vins. Avec l’âge, Haut-Brion évoluera plutôt vers la finesse et la complexité, alors que La Mission se signalera par une délicieuse volupté de texture.
Le domaine produit également un second vin “ La Chapelle de La Mission-Haut-Brion ” (le nom de “ Bahans – Haut-Brion” étant réservé au second vin de Haut-Brion) et un très rare vin blanc, “Laville-Haut-Brion ” (de 8 000 à 10 000 bouteilles selon les millésimes), issu d’un vignoble de 3,7 hectares complanté à 80 % de sémillon et 20 % de sauvignon. Ce vin blanc sec, chaleureux et raffiné est très agréable deux ou trois ans après la récolte, mais il faut ensuite attendre cinq à six ans pour qu’il devienne extraordinaire, avec des notes de miel, de fleur de sureau et d’amande grillée.