Chine : pays à bas coût ou marché profitable ?

Dossier : Entreprise et managementMagazine N°608 Octobre 2005
Par Georges VIALLE (71)

Sou­vent consi­dé­rée comme terre de délo­ca­li­sa­tions ou d’ap­pro­vi­sion­ne­ments à bas coût, la Chine devient aujourd’­hui un mar­ché clé sur lequel les entre­prises fran­çaises doivent défi­nir des stra­té­gies d’en­trée et de crois­sance. Com­plexes certes mais com­bien pro­fi­tables pour ceux qui savent faire les bons choix.

Deuxième marché mondial en 2020

On oublie que pen­dant plus de deux mille ans la Chine a été la pre­mière puis­sance éco­no­mique mon­diale avant d’être détrô­née au xixe siècle par les grands pays qui s’en­ga­geaient dans la révo­lu­tion indus­trielle, tour à tour euro­péens, amé­ri­cains puis japo­nais. Depuis, grâce aux réformes éco­no­miques qui ont per­mis son ouver­ture à la libre entre­prise et aux capi­taux étran­gers, la Chine connaît une crois­sance ver­ti­gi­neuse qui la place aujourd’­hui au niveau de la France, au cin­quième rang des éco­no­mies mon­diales. Cet immense mar­ché est aujourd’­hui ouvert aux inves­tis­se­ments étran­gers tant dans l’in­dus­trie que dans les infra­struc­tures et les services.

Des contrastes encore saisissants

Si le reve­nu per capi­ta est infé­rieur à 500 $ pour 50 % de la popu­la­tion, il est cepen­dant supé­rieur à 1 000 $ dans les pro­vinces côtières voire même à 3 500 $ autour de Shan­ghai. Les inves­tis­se­ments étran­gers qui repré­sentent plus de 50 mil­liards annuels sont concen­trés à plus de 80 % dans les pro­vinces côtières de Liao­ning à Guang­dong. Les infra­struc­tures archaïques des cam­pagnes contrastent avec celles des zones urbaines où aéro­ports, métros et réseaux d’as­sai­nis­se­ment et de dis­tri­bu­tion d’eau ont reçu de fortes dota­tions de l’É­tat. Les Jeux Olym­piques de Pékin en 2008 et l’Ex­po­si­tion uni­ver­selle de Shan­ghai en 2010 donnent lieu à une course au moder­nisme des équi­pe­ments. Enfin, l’ou­til de pro­duc­tion qui se carac­té­ri­sait par l’u­ti­li­sa­tion inten­sive d’une main-d’œuvre à bon mar­ché est en train de s’in­dus­tria­li­ser sous l’ef­fet des inves­tis­se­ments étran­gers et des efforts impor­tants de R & D finan­cés par le gou­ver­ne­ment chinois.

Adopter une stratégie d’entrée et de croissance ad hoc

Les ensei­gne­ments des tra­vaux du cabi­net en Chine montrent que les condi­tions de suc­cès résident d’a­bord dans une com­pré­hen­sion appro­fon­die des sec­teurs concer­nés, des règles du jeu et des moteurs de la consom­ma­tion. Le choix des lieux de pro­duc­tion, des moyens logis­tiques et des réseaux de dis­tri­bu­tion ain­si que la construc­tion d’une rela­tion forte tant avec le gou­ver­ne­ment cen­tral qu’a­vec ceux des pro­vinces et des muni­ci­pa­li­tés repré­sentent la deuxième étape du par­cours vers le suc­cès. Enfin, une coen­tre­prise est sou­vent néces­saire et le choix du par­te­naire chi­nois est pri­mor­dial. Bien des lettres d’in­ten­tion signées dans la hâte abou­tissent à des décep­tions lorsque l’en­tre­prise occi­den­tale s’a­per­çoit que le par­te­naire chi­nois n’ap­porte pas les élé­ments atten­dus et néces­saires au suc­cès de la coentreprise.

Repenser ses fondamentaux occidentaux

Trop d’en­tre­prises pensent qu’il suf­fit d’ap­pli­quer les recettes qui ont fait leurs preuves sur d’autres mar­chés pour réus­sir en Chine. La véri­té est tout autre, il faut accep­ter que la taille du mar­ché chi­nois et ses règles du jeu en affaires néces­sitent de repen­ser com­plè­te­ment ses fon­da­men­taux, de s’en­ga­ger à long terme et de for­mer et fidé­li­ser des cadres locaux qui accom­pa­gne­ront la crois­sance. Les oppor­tu­ni­tés des cinq pro­chaines années seront nom­breuses et tirées par la crois­sance éco­no­mique et le déve­lop­pe­ment des infra­struc­tures. L’ou­ver­ture de nou­veaux sec­teurs aux inves­tis­se­ments étran­gers et des lea­ders poli­tiques aux niveaux cen­tral, régio­nal et muni­ci­pal pro­gres­sistes et orien­tés vers le déve­lop­pe­ment des affaires accroî­tront les oppor­tu­ni­tés. La pour­suite de la migra­tion rurale et de la crois­sance urbaine va éga­le­ment entraî­ner, en com­plé­ment d’un mar­ché de biens indus­triels et de consom­ma­tion déjà impor­tant, un déve­lop­pe­ment expo­nen­tiel du sec­teur des ser­vices aux par­ti­cu­liers, aux entre­prises et aux auto­ri­tés locales par­ti­cu­liè­re­ment dans les domaines des loi­sirs, de l’en­vi­ron­ne­ment et de la santé.

Un retard à rattraper

Il est impé­ra­tif de faire en sorte que l’an­née de la France en Chine soit l’oc­ca­sion pour nos entre­prises de rat­tra­per le retard pris par rap­port aux acteurs éco­no­miques des autres grands pays industrialisés.

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