Chronologie d’un physicien
Autoportrait
Ce texte de 300 pages est l’autoportrait d’un jeune polytechnicien, de la promotion 1954, sorti dans le corps des Mines. Cet autoportrait est fascinant et intéressant à deux titres.
C’est d’abord une description minutieuse de l’activité scientifique de Maurice Kleman. Ce récit assez technique va de sa découverte du traité sur les Dislocations de Jacques Friedel, aux travaux plus récents sur les pavements de Penrose et les quasi-cristaux.
Sur près de cinquante ans, l’œuvre scientifique de Maurice Kleman est très vaste : elle touche à divers aspects de la physique de la matière condensée, du microscopique au macroscopique.
Cette partie de son récit intéressera les lecteurs ayant une certaine curiosité scientifique, ceux qui ont approché cette physique, et ceux qui veulent mieux comprendre le monde de la recherche scientifique publique en France depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale.
Mais ce qui est le plus fascinant, c’est le portrait que l’auteur fait de lui-même. La caractéristique la plus notable de cet autoportrait est l’extrême lucidité du peintre qui le conduit sans faiblesse à rapporter les réussites et les échecs d’un parcours tout à la fois prestigieux et compliqué !
Cette peinture sans fard du milieu de la recherche publique française au siècle dernier captivera bien des lecteurs et, naturellement, les historiens.
Maurice Kleman commence par occuper plusieurs postes relevant du corps des Mines, comme le BRGM, avant de débuter une carrière de chercheur, dans diverses affectations : Irsid, Orsay, etc. Il passera vingt ans au Laboratoire de physique des solides, ce prestigieux Laboratoire créé par Friedel à Orsay.
Mêlé à plusieurs conflits internes, il transférera, non sans difficultés, ses équipes dans le milieu universitaire parisien à Jussieu, au Laboratoire de minéralogie et de cristallographie de Paris. Lorsque des difficultés surgiront à nouveau, Maurice Kleman, poussé par une volonté farouche de poursuivre sa carrière de chercheur, se retrouvera à l’Institut de physique du globe.
Maurice Kleman s’interroge sur sa propre personnalité. Il mentionne sa timidité et ses problèmes de rapports humains. C’est ainsi qu’il commence son récit en racontant en détail son enfance si particulière : sa famille a eu la chance de passer une partie de la guerre au Chambon-sur-Lignon, ce havre exceptionnel où tant de familles juives ont réussi à échapper à la déportation.
À l’école, il sentait bien qu’il était perçu comme différent par ses camarades et cela a dû marquer pour toujours son rapport à autrui.
Ses souvenirs se concentrant sur ses bons résultats scolaires, on comprend pourquoi il ne rapporte rien du stress que les Juifs ont subi en France de 1940 à 1945 !
Maurice Kleman a trouvé sa forme de résilience dans une brillante formation scientifique et, ainsi, il a su vivre la « Bonne Vie » que recherche toute philosophie.