Claudie Haigneré, marraine du prix X-Impact Tech 2022

L’astronaute Claudie Haigneré, marraine du prix X‑Impact Tech 2022

Dossier : Nouvelles du PlatâlMagazine N°775 Mai 2022Par Dominique GENDRE-LAROUDIE (E2020)

Clau­die Hai­gne­ré est la mar­raine du prix X‑Impact Tech 2022 por­té par les alum­ni de l’Executive Mas­ter de Poly­tech­nique. Depuis 2020, ce prix récom­pense l’entrepreneuriat dans les inno­va­tions tech­no­lo­giques envi­ron­ne­men­tales mais aus­si sociales et socié­tales por­tées par des étu­diants ou de jeunes diplô­més de l’X et des autres écoles membres de l’Institut Poly­tech­nique de Paris. Astro­naute et scien­ti­fique de renom­mée inter­na­tio­nale, pre­mière femme fran­çaise et euro­péenne dans l’espace, Clau­die Hai­gne­ré insiste sur la notion d’impact du prix dans sa dimen­sion holis­tique, valeur réso­lu­ment por­tée par l’Europe plus que par­tout ailleurs.

Nous avons accueilli avec joie que vous acceptiez d’être la marraine du prix X‑Impact Tech 2022. Quel est pour vous le sens cet engagement ?

Clau­die Hai­gne­ré : Tout d’abord, j’ai été la mar­raine de la pro­mo­tion 4 de l’Executive Mas­ter qui porte cette année le prix X‑Impact Tech. J’ai trou­vé inté­res­sant de ren­con­trer les alum­ni de l’Executive Mas­ter qui ont des pro­fils expé­ri­men­tés dans des domaines divers et s’investissent pro­fes­sion­nel­le­ment sur des tra­jec­toires d’excellence et de rigueur comme je l’avais évo­qué dans mon dis­cours de la céré­mo­nie des diplômes au mois de février 2022. J’ai accep­té aus­si d’être mar­raine du prix X‑Impact Tech parce qu’il s’inscrit dans la conti­nui­té de cette diver­si­té et porte une vision holis­tique de l’entrepreneuriat tech­no­lo­gique. On y trouve la notion d’accompagnement par les alum­ni, riches de leurs propres par­cours et pro­jets. Aujourd’hui il est indis­pen­sable d’être dans le par­tage d’expériences pour l’accompagnement de l’innovation et la trans­mis­sion des connais­sances C’est cette par­ti­cu­la­ri­té du lien avec les alum­ni au ser­vice de la trans­mis­sion et du par­tage que je trouve inté­res­sante. Ça fait écho à la notion d’équipage, de cohé­sion et de com­plé­men­ta­ri­té pour mener cor­rec­te­ment une mis­sion comme j’ai pu le vivre en tant qu’astronaute.

Le deuxième point inté­res­sant réside dans la notion de « prix » qui témoigne de la recon­nais­sance de l’engagement entre­pre­neu­rial, au-delà de la simple capa­ci­té à faire. Un enga­ge­ment entre­pre­neu­rial fon­dé sur l’usage des sciences, des tech­no­lo­gies, de l’in­gé­nie­rie, comme outil de construc­tion d’un ave­nir à des­si­ner, cet entre­pre­neu­riat tech­no­lo­gique est essen­tiel dans notre socié­té en mutation.

« Au XXIᵉ siècle, l’innovation nécessite de penser son impact. »

Et troi­sième point, c’est aus­si un prix avec la notion d’« impact », qui a un écho par­ti­cu­lier avec mon par­cours. C’est à tra­vers mes dif­fé­rentes car­rières que la notion d’impact a pris tout son sens. Je fais par­tie de la géné­ra­tion Apol­lo, période où la recherche, l’ingénierie et l’in­no­va­tion tech­no­lo­gique étaient syno­nymes de pro­grès. Nous por­tions avec convic­tion une inno­va­tion « tech­no­cen­trée », convain­cus de sa toute-puis­sance. Alors qu’aujourd’hui, au XXIᵉ siècle, l’innovation a besoin de pen­ser son impact. Je dirais que nous entrons dans une ère où l’innovation est « anthro­po­cen­trée » et ques­tionne la place de l’Homme au centre des défis à rele­ver. La notion d’impact du prix se décline selon trois com­po­santes : le social, le socié­tal et l’environnemental.

À mon avis, ces trois com­po­santes doivent impré­gner et ins­pi­rer l’innovation et l’entrepreneuriat tech­no­lo­gique. Il faut pou­voir répondre aux quatre ques­tions sui­vantes : pour­quoi ? com­ment ? avec qui ? pour qui ? C’est ain­si que nous avan­ce­rons sur le che­min d’un entre­pre­neu­riat tech­no­lo­gique qui soit res­pon­sable et sage. Désor­mais, la com­pé­ti­tion dans l’innovation tech­no­lo­gique doit inclure ce dif­fé­ren­cia­teur en se posi­tion­nant vers des solu­tions plus wise and sus­tai­nable que sim­ple­ment smart. De mon point de vue, on retrouve le « pour­quoi » dans la com­po­sante sociale. La ques­tion est de savoir pour­quoi veut-on l’innovation tech­no­lo­gique ? Que va-t-elle nous appor­ter ? Est-elle vrai­ment au ser­vice d’un pro­grès dans les condi­tions de vie et de tra­vail, dans un déve­lop­pe­ment maî­tri­sé et par­ta­gé. Ensuite le « com­ment » cor­res­pond à l’impact envi­ron­ne­men­tal, incon­tour­nable aujourd’hui. Nous fai­sons face à des défis contra­dic­toires que sont ceux de la sobrié­té dési­rable ver­sus une crois­sance illi­mi­tée. Et puis par le « avec qui » et le « pour qui », on aborde l’aspect socié­tal : quels sont les nou­veaux par­te­naires et par­ties pre­nantes ? com­ment fait-on en sorte que la socié­té adhère et s’approprie l’innovation, com­ment trou­ver l’équilibre entre inté­rêt par­ti­cu­lier et inté­rêt géné­ral, com­ment conju­guer éthique de la pen­sée et morale de l’action ?


École polytechnique Executive Master – Un diplôme unique en technologie, management et innovation

L’Exe­cu­tive Mas­ter de l’X est une for­ma­tion diplô­mante des­ti­née aux diri­geants et mana­gers ayant en moyenne 18 ans d’ex­pé­rience pro­fes­sion­nelle. Les ensei­gne­ments sont tour­nés vers la tech­no­lo­gie et l’in­no­va­tion et per­mettent aux diri­geants de déve­lop­per leurs capa­ci­tés à desi­gner et déve­lop­per des pro­jets dans des indus­tries variées et avec une pers­pec­tive internationale.


Dans la quête vers l’innovation technologique, doit-on considérer les trois composantes sociale, sociétale et l’environnementale du prix au même niveau ?

Clau­die Hai­gne­ré : Je pense que l’impact envi­ron­ne­men­tal est incon­tour­nable aujourd’hui, on ne peut pas pen­ser la tech­no­lo­gie sans pen­ser à ses exter­na­li­tés au niveau de l’environnement qu’elles soient néga­tives ou posi­tives, en termes de ges­tion des res­sources, impact sur le chan­ge­ment cli­ma­tique, la bio­di­ver­si­té… C’est une corde de rap­pel indis­pen­sable dans la conduite des muta­tions tech­no­lo­giques qu’imposent les tran­si­tions numé­rique, éner­gé­tique et autres. L’impact envi­ron­ne­men­tal doit être une prio­ri­té aujourd’hui, par­tout et par tous, mais cela n’est pas au centre de tous les agen­das poli­tiques. L’Europe démontre une volon­té déter­mi­née à inno­ver pour un monde soutenable.

En Europe, il y a un consen­sus sur la néces­si­té de prendre en compte l’impact envi­ron­ne­men­tal dans les pro­ces­sus d’innovation. Cela me tient à cœur, et luci­de­ment cela doit inclure l’accompagnement de pays en déve­lop­pe­ment pour les­quels le pas à fran­chir n’est pas simple, tant cultu­rel­le­ment qu’économiquement. L’impact social et l’impact socié­tal sont deux com­po­santes inter­con­nec­tées. Ces impacts font rare­ment l’objet d’un consen­sus et sont même par­fois sources de débats très contra­dic­toires. Avec l’importance prise par les nou­veaux modes de com­mu­ni­ca­tion, ces impacts ne peuvent plus aujourd’hui être stric­te­ment trai­tés dans une négo­cia­tion interne à l’entreprise, ils sont ouverts et dis­cu­tés très lar­ge­ment, d’autant plus que l’innovation tech­no­lo­gique a aujourd’hui une puis­sance et un rythme qui bou­le­versent consi­dé­ra­ble­ment notre socié­té glo­ba­le­ment et chaque indi­vi­du (place de l’IA et trans­for­ma­tion du tra­vail, répar­ti­tion des richesses, temps libre, retraite…).

« En Europe, il y a un consensus sur la nécessité de prendre en compte l’impact environnemental dans les processus d’innovation. »

La com­po­sante sociale de l’innovation se retrouve dans les chan­ge­ments qui néces­sitent la créa­tion de nou­veaux métiers ou induisent de nou­velles formes de tra­vail. Il fau­dra notam­ment être atten­tif aux poten­tielles frac­tures sociales entre ceux qui auraient la pos­si­bi­li­té de trans­for­mer leur vie et ceux qui n’auraient pas la pos­si­bi­li­té de cette trans­for­ma­tion. Impacts social et socié­tal doivent prendre en compte l’adhésion, l’approbation de la socié­té à pro­pos des avan­cées tech­no­lo­giques. Le mot « accep­ta­bi­li­té » est impor­tant mais insuf­fi­sant, car il sous-entend que d’autres auraient déci­dé pour vous, ce qui est ques­tion­né aujourd’hui dans nos socié­tés. La socié­té actuelle a évo­lué et doit être par­tie pre­nante dans l’organisation du pro­ces­sus d’innovation pour en favo­ri­ser son accep­ta­tion et ses chances de réus­site. Le mot accep­ta­bi­li­té doit donc évo­luer lui aus­si pour englo­ber l’adhésion, l’appropriation du participatif.

On a vu les consé­quences d’une non-concer­ta­tion par­ti­ci­pa­tive avec les Gilets jaunes ou encore les mani­fes­ta­tions anti­vac­cin. Ces deux exemples illus­trent l’évolution de la socié­té qui sou­haite être impli­quée dans la codé­ci­sion et rejoignent les ques­tions « pour qui » et « avec qui » on fait ces inno­va­tions. Je ren­contre encore assez sou­vent des inter­pel­la­tions sur l’exploration spa­tiale habi­tée notam­ment quand j’interviens dans des écoles d’ingénieurs où on me dit : « Mais aujourd’hui, on ne peut plus se le per­mettre ? ». Mais au contraire, par l’exploration, on peut pen­ser autre­ment en pen­sant l’ailleurs (éco­no­mie cir­cu­laire, ges­tion de res­sources rares, sto­ckage de l’éner­gie, auto­ma­ti­sa­tion des pro­ces­sus qui sont des champs d’innovation essen­tiels aux enjeux glo­baux ter­restres). Pour cela, il faut élar­gir notre champ de vision. Le dia­logue ain­si que le par­tage sont essen­tiels et c’est un des inté­rêts de la struc­ture de l’Executive Mas­ter, au sein duquel vous ne faites pas exclu­si­ve­ment de la tech­no push, ni de la « tech­no solu­tion­niste ». Ce mas­ter com­porte toute une diver­si­té de pro­fils où on retrouve des pro­fils socio-éco­no­miques, juri­diques… ce qui est un véri­table atout lié à la diver­si­té autour de votre prix. C’est ce que j’inclus dans une vision holis­tique et trans­ver­sale à por­ter sur l’innovation et ses impacts.

L’astronaute Claudie Haigneré lors de la cérémonie de remise du prix X-Impact Tech 2022

Quel est votre opinion sur le sens d’urgence pour l’innovation technologique appliquée à des sujets à impact positif ?

Clau­die Hai­gne­ré : Au-delà de l’urgence envi­ron­ne­men­tale à agir, j’associe la notion d’urgence à celle de la com­pé­ti­tion tech­no­lo­gique inter­na­tio­nale et de l’aide à l’émergence des talents, qui exigent de l’Europe une impul­sion nou­velle et dif­fé­ren­ciée. C’est impor­tant d’élargir la por­tée de ces sujets tech­no­lo­giques et de leur impact au niveau euro­péen. Ce prix valo­rise et recon­naît la capa­ci­té de ces jeunes entre­pre­neurs qui se lancent dans le défi de l’innovation res­pon­sable à faire rayon­ner leurs valeurs et ces prin­cipes d’impact posi­tif sur notre ter­ri­toire euro­péen et à l’extérieur. Il est impor­tant de les recon­naître et de les accom­pa­gner et c’est ce qu’encourage ce prix X‑Impact Tech. C’est aus­si une façon de les inci­ter à res­ter en Europe et ne pas être aspi­ré par des sirènes outre-Atlan­tique. C’est une mise en visi­bi­li­té qui a aus­si valeur péda­go­gique. Une édu­ca­tion par l’exemplarité est indis­pen­sable même si, bien sûr, c’est sans doute anti­no­mique d’évoquer une urgence à long terme.

Concernant la partie européenne, vous avez été ministre déléguée aux Affaires européennes en 2004. Nous voudrions connaître votre avis sur les mécanismes qu’on peut enclencher au niveau de l’Europe pour aider également les start-up à un stade très early stage. Nos start-up n’attirent pas encore assez les investisseurs car la rentabilité de leur modèle n’est pas visible à court terme.
L’Europe n’aurait-elle pas son rôle à jouer pour propulser nos start-up ? 

Clau­die Hai­gne­ré : Par expé­rience, je dirais qu’il n’est pas simple de mobi­li­ser une volon­té una­nime au niveau euro­péen. Mais on peut consta­ter que l’analyse de l’impact posi­tif de l’innovation y est bien enga­gée : une réflexion sur la régu­la­tion ou l’é­thique, que ce soit sur la tran­si­tion numé­rique (GPRD, DMA, DSA) ou sur la tran­si­tion éco­lo­gique et éner­gé­tique et le lea­der­ship envi­ron­ne­men­tal. L’Eu­rope, enga­gée dans la twin tran­si­tion (c’est-à-dire conci­lier tran­si­tion numé­rique et tran­si­tion éco­lo­gique), doit appor­ter une meilleure recon­nais­sance de la notion d’impact comme prin­cipe de départ de l’innovation. Elle doit en faire un atout et un outil, tant pour encou­ra­ger l’audace de ces entre­pre­neurs d’un nou­veau genre que pour pro­mou­voir des inves­tis­se­ments publics ciblés et des inves­tis­se­ments pri­vés accom­pa­gnant les risques de ces ini­tia­tives de valeurs.

Cette notion liée à l’impact posi­tif est beau­coup moins mise en valeur et recon­nue en Chine ou aux États-Unis. Cette ambi­tion cou­plant l’audace à la res­pon­sa­bi­li­té, exprime une voie et une voix euro­péenne. C’est un levier au ser­vice de cette vision plus wise d’une inno­va­tion anthro­po­cen­trée, atten­tive à la place et au deve­nir de l’humain (human inside), revi­vi­fiant la phro­ne­sis d’Aristote aux côtés des notions d’épis­té­mé et de tech­né. Si on se sou­cie de l’im­pact, alors on doit obli­ga­toi­re­ment sor­tir de son silo d’expertise pour déve­lop­per une vision holis­tique. Je n’exclus pas la recherche d’innovation tech­no­lo­gique dis­rup­tive émer­geant d’un silo, et elle est encore plus exi­geante en termes d’anticipation de l’impact.

« L’Europe pourrait apporter une meilleure reconnaissance de la notion d’impact comme principe de départ de l’innovation. »

La matu­ri­té que j’ai acquise avec mes dif­fé­rentes expé­riences pro­fes­sion­nelles, que ce soit en tant qu’astronaute (en étant à dis­tance de la pla­nète avec cette per­cep­tion de la com­plexi­té et de l’interconnexion des fra­gi­li­tés, l’appréciation de la néces­saire soli­da­ri­té), soit dans les res­pon­sa­bi­li­tés minis­té­rielles sur les poli­tiques de recherche et d’in­no­va­tion, soit dans mes fonc­tions de pré­si­dente d’Universcience (Cité des sciences et de l’industrie et Palais de la décou­verte) m’autorise à pen­ser qu’il nous manque un lan­gage com­mun utile à la péda­go­gie tout autant qu’au dia­logue construc­tif. Le lan­gage scien­ti­fique ou celui de l’ingénieur doit être sim­pli­fié et tra­duit pour être acces­sible par le plus grand nombre.

Si vous sou­hai­tez pro­mou­voir l’impact, vous devez trou­ver un lan­gage com­mun pour une conver­sa­tion audible, car vous n’impactez pas une seule filière, une seule com­mu­nau­té, vous vous pré­oc­cu­pez d’avoir un impact plus holis­tique (envi­ron­ne­men­tal, social et socié­tal) qui touche jusqu’aux biens com­muns de notre humani­té. La notion d’im­pact amène obli­ga­toi­re­ment à cette trans­ver­sa­li­té, cette inter­dis­ci­pli­na­ri­té qu’on retrouve aus­si dans ce prix. En com­plé­ment, la diver­si­té cultu­relle euro­péenne, béné­fi­ciant d’une mobi­li­té faci­li­tée (au-delà d’Erasmus élar­gi) est évi­dem­ment une richesse à cultiver.

Cette année marque les cinquante ans de l’admission des femmes à l’X. Vous l’aurez compris, vous êtes un modèle pour beaucoup de jeunes femmes aujourd’hui dans le monde des sciences qui est encore très masculinisé, alors quel(s) conseil(s) prodigueriez-vous à ces jeunes femmes qui veulent entreprendre dans la tech et plus précisément dans l’entrepreneuriat ?

Clau­die Hai­gne­ré : Pour avoir été astro­naute, ministre et pré­si­dente d’établissement public, je pré­fè­re­rais avoir un rôle d’inspiratrice plu­tôt que de modèle. Je ne suis pas fémi­niste mili­tante pour autant. Cepen­dant, je suis quelqu’un d’engagé et per­sé­vé­rant qui pense que la diver­si­té de genre est un impé­ra­tif et une richesse. Le prix sou­tient l’entrepreneuriat fémi­nin en impo­sant que l’équipe pro­jet com­porte au moins une femme. Quand je parle de diver­si­té, je parle aus­si de la diver­si­té au sens large du terme comme la diver­si­té de par­cours avec les dif­fé­rents pro­fils pré­sents au sein de l’Executive Mas­ter, mais aus­si de la diver­si­té géné­ra­tion­nelle. Il y a des roo­kies et des vété­rans comme on en voit dans le monde du spa­tial. Il s’agit ici aus­si des diver­si­tés cultu­relles illus­trées par les dif­fé­rents domaines repré­sen­tés. Je met­trai éga­le­ment en avant la diver­si­té des niveaux de for­ma­tion. En effet, la for­ma­tion de tech­ni­ciens et tech­ni­ciennes per­met de com­plé­ter le champ de l’ingénierie pour créer les condi­tions d’un éco­sys­tème qui amène à la réus­site d’une inno­va­tion tech­no­lo­gique. C’est une richesse consi­dé­rable que de pou­voir abor­der des enjeux com­plexes et de pen­ser les solu­tions avec dif­fé­rents points de vue. Si dès le départ, on a une approche de diver­si­té face à la com­plexi­té de l’enjeu, on a plus de chance de par­ve­nir à l’objectif, avec une solu­tion sou­te­nable, pas for­cé­ment avec plus de rapi­di­té, mais avec plus de chance de suc­cès. Bien sûr, il n’y a pas de solu­tion unique.

La richesse de la diver­si­té, c’est aus­si de pou­voir pro­po­ser une solu­tion plus large avec plus de che­mins de tra­verse, avec des embran­che­ments, des points d’étape et des choix qui per­met­tront d’avancer avec plus de rési­lience, en pen­sant des inno­va­tions qui donnent plus de capa­ci­té à rebon­dir face à la dif­fi­cul­té et l’incertitude. La richesse de la diver­si­té inclu­sive, c’est aus­si l’intelligence col­lec­tive et la soli­da­ri­té. Aujourd’hui, il est com­pli­qué de créer une entre­prise seule. Il faut avoir plu­sieurs champs de com­pé­tences et savoir écou­ter les autres, c’est ce que pro­pose le prix et que je trouve inté­res­sant. Cela fait écho à mon expé­rience de la sélec­tion d’astronautes pour la consti­tu­tion de l’équipage. On recherche des gens, qui quelles que soient leur exper­tise et leurs expé­riences, mettent en pra­tique leur ouver­ture d’esprit, enga­gés ensemble pour la réus­site de la mis­sion, et pas for­cé­ment des lea­ders qui savent tout faire et décident seuls. Au sein de l’Executive Mas­ter, les pro­jets éla­bo­rés par les par­ti­ci­pants le sont à plu­sieurs et en groupe, et la réus­site des pro­jets tient à l’ou­ver­ture d’esprit mais aus­si à l’ha­bi­le­té de tous à trou­ver un lan­gage com­mun pour avan­cer ensemble vers un même objectif.

Les super­man et super­wo­man sont des héros de bandes des­si­nées et pas les acteurs inno­vants du quo­ti­dien. Mais peut-être ce prix don­ne­ra-t-il des super pou­voirs à ses lau­réats. Ad astra !

Qu’est-ce que vous souhaiteriez mettre en évidence de votre parcours dont vous êtes particulièrement fière ?

Clau­die Hai­gne­ré : Je pré­fère le mot « ins­pi­rante » qui me convient davan­tage que le mot « fière ». J’ai un par­cours cou­ron­né de beau­coup de suc­cès ce qui montre en réa­li­té une capa­ci­té à sur­mon­ter l’obstacle ou l’échec : c’est ce qui, aujourd’hui, peut être ins­pi­rant pour une jeune géné­ra­tion et ça, je suis fière de pou­voir en témoi­gner. L’entrepreneuriat, c’est aus­si sur­mon­ter cer­tains obs­tacles, sur­tout au début où il faut mon­trer de l’audace et sur­mon­ter ses doutes. Rien ne sera facile et un exemple ins­pi­rant peut aider, en y retrou­vant les lignes de force que sont la pas­sion, la convic­tion, la déter­mi­na­tion, le tra­vail et la patience. C’est pour cela aus­si que j’apporte mon sou­tien à ce prix. Et il est clair que je suis heu­reuse lorsque des jeunes femmes et des jeunes hommes voire des moins jeunes me disent que ça a été impor­tant pour leur par­cours, de voir que des caps inédits pou­vaient être fran­chis pour atteindre l’objectif que l’on désire.

Ma déter­mi­na­tion repose sur des fon­da­men­taux qui me struc­turent : l’importance des sciences et des tech­no­lo­gies, le rôle à jouer à son échelle dans l’avenir de l’humanité et l’Europe. En avan­çant dans mes vies, j’ai déve­lop­pé cette conscience qu’on se construit avec les autres et par les autres, que cela passe par l’éducation ini­tiale et la for­ma­tion tout au long de la vie qui sont essen­tielles à la décou­verte de soi même, que l’on s’enrichit dans le par­tage d’expérience et la trans­mis­sion, et que prendre de la hau­teur pour déca­ler son regard vers une vision holis­tique peut redon­ner de l’espérance « en ral­lu­mant les étoiles ». Je dirai donc que je suis fière d’appartenir à une humani­té vision­naire et entre­pre­neuse, que je sou­haite curieuse, soli­daire, res­pon­sable, auda­cieuse et sage. Plus qu’un sou­hait, j’ai eu la chance de le vivre vrai­ment dans l’exceptionnelle aven­ture de l’exploration spa­tiale habi­tée. Pour ter­mi­ner, je dirai que je suis plu­tôt fière de ne jamais vrai­ment avoir subi mais plu­tôt d’être l’entrepreneure de ma vie.

Pro­pos recueillis par Domi­nique Gendre-Larou­die (E2020)


L’Executive Master en chiffres

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Pour finan­cer la dota­tion de 25 000 €, nous avons lan­cé une col­lecte de fonds dédiée, enca­drée par la Fon­da­tion de l’École poly­tech­nique. Le prix a d’ores et déjà béné­fi­cié du sou­tien de la com­mu­nau­té des alum­ni de l’Executive Mas­ter, de Medi­kal et LeG­SM, mais nous n’avons pas encore atteint notre objectif.

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Pour contri­buer à finan­cer la dota­tion du prix, ren­dez-vous avant le 30 juin 2022 sur le site de la Fon­da­tion de l’X : https://don.fondationx.org/prix-x-impact-tech-2022


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