Contourner l‘obstacle du référencement des fournisseurs
Depuis quelques années, la plupart des entreprises françaises ont mis en place ce système de référencement de leurs fournisseurs. Ce sont les très grandes entreprises qui ont commencé, puis la plupart des autres les ont imitées. Quatre raisons sont à l’origine de cette démarche.
REPÈRES
Dans les sociétés importantes, les fournisseurs informatiques sont choisis dans une liste établie à l’initiative du service informatique. Ce dernier dresse une liste des fournisseurs qui seront autorisés à répondre aux appels d’offres émis par la société, liste ensuite validée par le service des achats. Les critères le plus souvent retenus pour cette sélection sont d’abord des critères de taille de la société référencée – chiffre d’affaires, nombre de salariés –, et des critères de sérieux – étude du bilan, rencontre avec les dirigeants. En outre, il est fréquent que le nombre de fournisseurs par domaine soit limité.
Limiter les risques de défaillance des fournisseurs
La première raison qui conduit à cette situation est de ne faire appel qu’à des sociétés sérieuses qui pourront répondre sans risque de défaillance aux appels d’offres émis. Dans le cas de la sous-traitance informatique, cette raison est parfaitement logique pour les missions au forfait, mais pas pour celles en régie.
En régie, c’est la qualité de la personne déléguée qui importe
Au forfait, le fournisseur s’engage sur un résultat, met en place ses propres procédures pour l’atteindre et paye des pénalités s’il n’atteint pas ce résultat. Il est donc compréhensible que les missions au forfait soient confiées à de grands groupes qui peuvent mieux prendre en charge ces procédures et ces risques.
En régie, le fournisseur met à disposition du client un informaticien ayant les compétences qui correspondent au besoin. Il travaille chez le client et c’est le client qui le gère. Dans ce cas, la taille de la société n’intervient pas et c’est la qualité des compétences de la personne déléguée qui importe. Le risque se limite au coût de recherche d’un remplaçant si le fournisseur est défaillant.
Un argument pas toujours fondé
La deuxième raison qui motive le référencement est d’ordre économique : pour obtenir d’être référencés, les fournisseurs acceptent des remises tarifaires liées aux volumes des commandes espérées. Mais, en pratique, ce n’est pas toujours une bonne affaire.
Si l’on considère par exemple le cas des missions confiées en régie à des SSII, on constate que, grâce au référencement, les clients arrivent à négocier une remise de l’ordre de 10 %. Mais ces sociétés référencées (et donc de taille importante) pratiquent des tarifs de référence qui sont fréquemment de 20% plus élevés que ceux de plus petites sociétés. Au total le client aurait pu gagner 10% en s’adressant à ces dernières.
Des fournisseurs connus en nombre limité
Y a‑t-il un syndrome Cap Gemini ?
Dans les années 1970, lorsque l’achat de matériel informatique constituait une part importante du budget informatique, on parlait du « syndrome IBM ». Les machines IBM étaient chères, mais un incident sur une machine IBM provoquait seulement une colère du client sans conséquence pour l’acheteur. Alors qu’un incident sur une machine d’une autre marque pouvait conduire au licenciement de celui qui avait fait l’erreur de l’acheter. Aujourd’hui, on peut se demander si, en matière de services informatiques, il n’y a pas un « syndrome Cap Gemini ».
Les deux autres motivations tiennent à l’incapacité du service des achats à gérer un nombre important de références à des coûts acceptables. Cette justification est logique : réduire le nombre de fournisseurs et donc les frais administratifs. Elles tiennent aussi à l’assurance, au moins théorique, que représente une grande marque.
La vie difficile des petites structures
Ces pratiques ne réduisent guère la marge des grandes sociétés référencées, qui ont de vraies capacités de négociation et peuvent exiger des efforts de leurs propres sous-traitants, en général de petites sociétés ou des travailleurs indépendants (free-lance) qui sont les premiers à pâtir de la situation. Il est en fait presque impossible aux free-lance de se faire référencer. Ils doivent donc passer par de grandes sociétés qui sont référencées et dont le seul travail est d’émettre une facture par mois. Ce travail est rémunéré par une différence entre leur prix de vente et leur prix d’achat, qui peut atteindre 20 %, voire plus.
Sortir de l’impasse
Pour un travailleur indépendant, il existe plusieurs solutions pour lutter contre cette situation. Une première solution (qui est déjà utilisée) consiste à se limiter aux missions délicates et compliquées pour lesquelles le client final ne trouve pas de compétence correspondante via les sociétés référencées. En effet, presque tous les systèmes de référencement acceptent des exceptions : le demandeur, quand il ne trouve pas la compétence dans les sociétés référencées, a le droit de signer avec des sociétés non référencées.
Il est presque impossible aux free-lance de se faire référencer
Une deuxième consiste à sous-traiter par l’intermédiaire des sociétés référencées. Si l’on a déjà trouvé le client et que le travail de la société référencée ne consiste qu’à émettre une facture par mois, les 20 % de marge habituelle semblent un peu importants. En revanche, si la société référencée apporte aussi le client, ces 20% paraissent justifiés.
Troisième voie
Une troisième solution que je suggère pour les free-lance est de faire référencer une société qui ne prendrait que 10 % pour sous-traiter les missions réalisées par ses affiliés. Dans ce schéma, le travail de la société référencée se limiterait à être l’intermédiaire de facturation entre le client final et les free-lance ou les petites sociétés (non référençables) et à les payer en prenant seulement 10 % de marge.
Un partenaire pour les free-lance
Dans le schéma suggéré, les free-lance pourraient s’appuyer sur un partenaire pour travailler dans les grands comptes. Une telle société devrait être assez grosse pour être référencée par les grands comptes, mais avoir une taille limitée pour pouvoir établir des factures avec des frais inférieurs à 10% de leur montant.
Il faudrait évidemment que les grands comptes valident ce schéma : cette opération peut se faire, a priori, auprès des clients ou bien, au coup par coup, à la demande des freelance ayant une mission chez un client qui pratique le référencement et leur demande de passer par une société référencée.
Cette troisième voie pourrait ne pas plaire à certains clients car ils auraient affaire à un « fournisseur-écran ». Mais c’est déjà ce qui se passe avec les SSII référencées pour leurs missions en régie : elles sous-traitent, en effet, nombre de leurs missions en régie dans d’autres SSII non référencées ou auprès de free-lance et perçoivent à ce titre une part du chiffre d’affaires, souvent autour de 20 %. Le schéma proposé amène donc à réduire la marge conservée par le fournisseur référencé.
Il peut donc séduire des clients qui cherchent à optimiser leur sous-traitance tout comme la société intermédiaire qui pourra développer son flux d’affaires.
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Délivrer une prestation de conseil via une société référencée
Pour un sous-traitant, les problèmes de passer par un intégrateur global de service sont les suivants :
– 1. perte de chance de développer sa marque ou réputation
- 2. perte de chance d’apprécier directement sa valeur ajoutée à la solution finale
– 3. risque d’aliénation (dilution) de son savoir-faire et de ses méthodes.
A ces problèmes, voici quelques remèdes
- 1. déclaration d’identité du sous-trait au client final
– 2. facturation directe du sous-traitant
– 3. accords de propriété intellectuelle sauvegardant les capacités d’innovation le long de la chaîne de fourniture
Ces remèdes peuvent naître pourvu que le client final y invite via ses conditions générales d’achat. Depuis 2009, la commande publique montre la voie. A la commande privée de s’en inspirer.
Contourner l‘obstacle du référencement des fournisseurs
Bonjour,
Ce sujet date de 2013.
Je trouve que rien n’a changé … et vous ? Du mieux dans la chaîne d’intermédiation ?
Merci
LM