Courrier des lecteurs
Vive le vent
Vive le vent
L’article paru dans La Jaune et la Rouge de novembre sous le titre » Produire de l’électricité par le vent, ce n’est pas raisonnable » me paraît réducteur et inutilement tapageur. Comment ne pas s’interroger sur les raisons qui poussent nombre de pays développés à promouvoir l’éolien comme générateur d’électricité ? Comment ne pas s’interroger sur les raisons qui poussent de grands groupes industriels à acquérir, pour les développer, tout ou partie de PME innovantes spécialisées dans la promotion et l’exploitation de fermes éoliennes ? Il est probable que le fait de connaître pour vingt ans ce que coûtera l’énergie éolienne produite, sans aucune dépendance au coût d’approvisionnement de l’uranium, constitue en soi un solide avantage. Loin de moi l’oubli du caractère aléatoire d’Éole, qui justifia naguère l’abandon de la marine à voiles au profit de la vapeur. Mais, en rester là serait sous-estimer le potentiel éolien français. Et le fait que les gisements éoliens français sont décorrélés. Selon les données fournies par Météo France, la puissance fournie par le parc éolien actuel ne descend qu’un jour sur trente en dessous de 10 % de la capacité installée. On ne connaît pas, en vingt ans, d’absence de vent dans l’Hexagone. À 50 mètres au-dessus de l’eau, on trouve, plus de deux mille heures par an, des vents de plus de 8 mètres par seconde, en Manche et mer du Nord comme dans le golfe du Lion. Pour produire de l’électricité, un bon vent comme d’ailleurs un beau soleil sont complémentaires d’autres sources d’électricité comme l’uranium ou le pétrole.
Alain GRILL (51), de l’Académie de Marine
Économie forcée
Le récent dossier » Europe et énergie » me rappelle une expérience d’économie d’énergie vécue, il y a presque cinquante ans. J’étais à l’époque ingénieur à l’arsenal de Bizerte, gros consommateur d’oxygène et d’acétylène. Chaque jour cinq » camions » de bouteilles venaient nous approvisionner. De sérieux différends avec la Tunisie amenèrent un blocus des livraisons pendant près de cinq mois. La solution de secours, le ravitaillement par avion, dut s’accompagner de sérieuses mesures d’économie de cette énergie devenue soudain rare et coûteuse. Des consignes très strictes furent données, en particulier au niveau des pratiques courantes d’utilisation des chalumeaux. Très rapidement, on put se contenter de l’équivalent d’un seul camion au lieu de cinq. Les pratiques d’économies perdurèrent un certain temps après la fin du blocus, puis la consommation revint progressivement à son niveau initial. Cet exemple montre que des marges significatives d’économie d’énergie peuvent donc être trouvées si les circonstances l’imposent et si l’encadrement est sensibilisé au problème et fait observer rigoureusement ses consignes. Dès que la pression disparaît, on retourne aux mauvaises habitudes.
Henri ARNOUX (46)
Deux modèles pour réduire les émissions de CO2
Toute politique énergétique et climatique doit retenir comme critère fondamental la réduction des gaz à effet de serre qu’elle est susceptible d’entraîner. Il y a lieu de se concentrer sur un seul objectif : la réduction des émissions de CO2, les économies d’énergie et le recours aux énergies renouvelables n’étant encouragés ou développés que dans la mesure où ils concourent à l’objectif principal. C’est dans le domaine du chauffage des logements et bureaux que les actions sont les plus payantes et donc les plus urgentes : isoler, certes, mais aussi décourager l’usage du chauffage au fioul, au gaz et au charbon, en allant jusqu’à l’interdiction de l’usage de ce type de chauffage pour les constructions neuves ou les rénovations lourdes. Dans le secteur des transports, grâce à une électricité produite avec de faibles émissions de CO2, la France est remarquablement placée pour réduire considérablement les émissions. Il s’agit, tout d’abord, d’encourager l’usage des transports en commun électriques. Notre pays est un des rares où l’utilisation des véhicules hybrides rechargeables, dans lesquels une fraction importante de l’énergie est produite par l’électricité, ou de véhicules purement électriques, conduirait à une forte réduction des émissions de CO2. En Europe, deux variantes de politiques énergétiques sont développées. L’une, suivie depuis longtemps par le Danemark, à laquelle l’Allemagne et l’Espagne se sont ralliées, repose sur le refus du nucléaire, le développement de l’électricité renouvelable (plus particulièrement de l’éolien) et le maintien d’un important recours à l’électricité fossile. L’autre, suivie par la France, la Suisse et la Suède, repose sur un très faible recours à cette dernière. Les rejets de CO2 dans les premiers pays sont de l’ordre de 10 tonnes par habitant. Ils sont de l’ordre de 6 tonnes pour les autres. Pourquoi vouloir imposer le premier modèle au détriment du second ? Ne serait-il pas plus intelligent d’organiser une compétition vertueuse entre eux, en fixant un délai à l’issue duquel on pourrait évaluer leur efficacité relative. Au bout de ce délai, l’Europe pourrait choisir le modèle ayant donné les résultats les meilleurs en ce qui concerne les émissions de CO2, puisque c’est bien de cela qu’il s’agit. Notre pays a des atouts exceptionnels à faire valoir. Laissons l’expérimentation trancher.