David HENRI (13), prix Norbert SEGARD 2017 du meilleur “ jeune espoir ”
Le prix récompense le travail de la société Exotrail qui veut proposer bientôt un propulseur spatial à effet Hall miniaturisé et pourra le produire en série avec une approche low-cost. Aujourd’hui, il n’existe pas de système de propulsion adapté à la taille des petits satellites que l’on veut lancer en constellation autour de la terre.
Exotrail s’inscrit dans le New Space, un mouvement d’initiative privée qui agite le domaine du spatial : réutilisation des lanceurs spatiaux, composants sur étagère, envoi de constellations de satellites, production en série et approche low-cost.
“ Il n’existe pas de système de propulsion adapté à la taille des petits satellites ! ”
Cela permet d’envisager de nouveaux services, notamment dans les télécoms (fournir un accès Internet tout autour du globe, avec un débit plus performant et à moindre coût) et l’imagerie (très haute revisite temporelle).
Mais aujourd’hui, ces constellations de petits satellites souffrent d’un manque majeur : il n’existe pas de système de propulsion adapté à leur taille !
Leur durée de vie en orbite basse est du coup très limitée (moins de six mois en dessous de 400 km), ils ne peuvent pas changer d’orbite en cours de mission, et de manière générale leurs performances sont sous-optimales.
D’où est venu ce projet ?
La propulsion à effet Hall est la technologie employée sur les gros satellites depuis des dizaines d’années. Fiable, efficace, reconnue dans le milieu spatial et utilisant un gaz neutre non polluant pour le satellite ou les caméras optiques, cette technologie était réputée difficile à miniaturiser.
CubeSat réalisé par le Centre spatial étudiant de l’École polytechnique.
Cependant entre 2002 et 2014, l’équipe de Marcel Guyot, chercheur au GEMaC (CNRS / Université de Versailles Saint-Quentin) a mené d’importants travaux de recherches en ce sens, et a réussi en 2014 à allumer un prototype de chambre de propulsion à effet Hall consommant 3 W pour une poussée de 0,1 mN.
La puissance d’une LED pour le poids d’un timbre-poste, soit trois ordres de grandeur en dessous des propulseurs classiques !
Notre projet d’entreprise Exotrail est né en 2014–2015 suite au projet d’étude de l’un de mes camarades de promotion, Paul Lascombes, au sein du GEMaC sous la direction de Marcel Guyot. Nous avons tous deux rapidement perçu l’opportunité entrepreneuriale apportée par l’innovation de Marcel Guyot.
Nous avons alors développé le projet avec Jean-Luc Maria, responsable de la Plateforme d’intégration et de tests (PIT) à l’Observatoire de Versailles St-Quentin-en- Yvelines, et nous avons eu la chance de le voir sélectionné par la Société d’accélération de transfert de technologies (SATT) de Paris-Saclay en novembre 2015.
La SATT nous apporte ainsi un soutien technique et financier important afin de poursuivre le développement de notre technologie, et parvenir d’ici le début de l’année 2018 à un prototype de système opérationnel complet (avec réservoir de gaz, alimentation, réseaux, etc.), le tout tenant dans le format imposé d’un « CubeSat » (10 x 10 x 10 cm). Nous sommes aujourd’hui au milieu de cette phase de maturation technologique qui se révèle extrêmement prometteuse.
En effet, là où certains s’attendaient à ce que les moteurs à effet Hall perdent en efficacité en étant miniaturisés, les simulations obtenues par un laboratoire extérieur montrent que leurs performances sont au moins équivalentes à celles des propulseurs traditionnels.
La suite de l’aventure ?
Nous montons cet été notre structure juridique, Exotrail SAS, poursuivons le développement du produit avec le soutien de la SATT Paris-Saclay et continuons d’aller à la rencontre de nos clients et plus largement, de notre écosystème.
“ Le prix SÉGARD apporte une validation sérieuse de notre projet, gage de crédibilité ”
Nous prévoyons de démontrer la validité de notre technologie dans l’espace au second semestre 2018, pour amener sur le marché, d’ici 2019, le plus petit propulseur à effet Hall au monde.
Pour mener à bien ce projet ambitieux, nous réaliserons une levée de fonds d’amorçage au cours du premier semestre de l’année 2018. Le marché est en attente d’une solution de propulsion pour petits satellites fiable et efficace. Exotrail a l’ambition d’y répondre dès 2019.
Exotrail a remporté plusieurs prix depuis 2016, dont celui de la Fondation Norbert Ségard dans la catégorie « Jeune Espoir » en mars dernier, parmi une quarantaine de projets candidats. Très important, ce prix apporte une validation sérieuse de notre projet, gage de crédibilité ; il nous permet également de nous faire connaître d’un vaste réseau, préalable obligatoire à la réussite de toute entreprise entrepreneuriale.
Pour finir, le coup de pouce financier nous donne la possibilité de nous rendre à des conférences en France et à l’étranger.
Premier prototype du micropropulseur à effet Hall – allumage réalisé en 2014. © GEMAC – CNRS – UVSQ
Propulseur à effet Hall de gamme 200 W – héritage de l’équipe d’Exotrail. © CNRS
Quel a été ton parcours ?
Originaire de Poitiers, prépa à Montaigne (Bordeaux). J’ai fait beaucoup de mécanique à l’X, puis je me suis progressivement dirigé vers la stratégie d’entreprise et l’innovation.
J’ai découvert l’univers de l’entrepreneuriat dans le secteur spatial lors de mon stage de troisième année chez Swiss Space Systems, une start-up qui développait une navette spatiale réutilisable.
PROPULSION À EFFET HALL
Cette technologie de propulsion réputée pour sa fiabilité et son efficacité apporte une réelle agilité aux petits satellites, rendant possibles de nombreuses applications innovantes à destination du plus grand monde :
Internet partout dans le monde, agriculture de précision grâce aux images recueillies, suivi de bateaux de pêche illégaux ou d’avions en situation de détresse – et encore bien d’autres.
J’ai complété mon parcours académique par un master en Stratégie, Innovation et Entrepreneuriat en 3A à l’X, puis par un stage de six mois en venture capital. J’ai effectué ma quatrième année en master II en « Industrial Systems, Manufacturing and Management » à Cambridge (GB), avant de revenir en septembre en France pour m’engager avec hâte dans Exotrail à plein temps.
Paul Lascombe (2013) a suivi un cursus proche du mien à l’X. Ayant toujours à cœur de développer ses connaissances techniques, il effectue avec moi un stage à Swiss Space Systems en 2A, puis à l’université Caltech en 3A pour finalement aller à Toulouse se former spécifiquement au spatial à Sup’Aéro (S2017).
Il est maintenant en stage de fin d’études chez Airbus DS dans le département Advanced Systems, et représente Exotrail dans l’important écosystème du spatial toulousain, tout en continuant à travailler en parallèle sur le projet, dans ses aspects missions et opérations spatiales.
Comment l’écosystème de l’X peut-il vous aider ?
Nous rejoignons l’incubateur X‑Tech du Drahi‑X Novation Center en septembre, car nous sommes convaincus que la confrontation de notre projet entrepreneurial à un environnement de qualité sera salutaire à son développement.
L’X nous a beaucoup apporté de par l’excellente formation prodiguée et nous espérons inscrire notre aventure dans sa continuité.
Par ailleurs, toute personne intéressée par le projet et désireuse de nous accompagner est la bienvenue !