De Charlemagne à Bill Gates : la classe électronique multimédia
Un nouveau contexte d’évolution rapide
Les méthodes pédagogiques sont restées pratiquement les mêmes depuis que le monde est monde :
- une structure hiérarchique magister/étudiants, dans laquelle une des préoccupations du Maître est de transmettre aux élèves son savoir et qu’ils soient en mesure de le transmettre aux générations suivantes.
Si, selon la tradition, Charlemagne en a largement étendu le nombre des bénéficiaires en Europe, cette structure est toujours dominante ; - des supports textes qui ont certes bénéficié de l’invention de l’imprimerie mais n’ont pas révolutionné la pédagogie.
La révolution industrielle que connaît le monde depuis le début de ce siècle a bien sûr fait bouger les choses. Toutefois, jusqu’à l’avènement du micro-ordinateur dans tous les milieux professionnels au cours des années 80 et ensuite d’Internet à la fin des années 90, les acteurs de la formation avaient le temps de regarder, expérimenter, évaluer et juger à loisir toutes les nouvelles technologies arrivant sur le marché par vagues : le son et l’image enregistrés, la multiplication des moyens de transmission analogique (téléphone, radio, télévision) et l’accès à la création audiovisuelle non professionnelle par le biais du magnétophone, de la caméra légère et du magnétoscope. Malgré la persistance des progrès réalisés, le rythme constaté des évolutions a laissé aux formateurs et éducateurs le temps d’exercer une force de résistance aboutissant toujours à une utilisation des technologies indépendamment les unes des autres, en montrant par l’exemple leur manque général de pertinence dans l’acte et la relation pédagogiques.
Le monde de la formation se trouve bousculé aujourd’hui par l’accélération des changements touchant les domaines économique, technologique, sociologique et politique : non seulement le rythme, mais aussi la nature du jeu a changé.
D’une part, l’évolution de la technologie entraîne des modifications profondes des comportements sociaux ; d’autre part, la convergence des technologies, chacune exerçant auparavant son effet de façon limitée dans des domaines séparés (télécommunication, audiovisuel, informatique), impose une accélération non seulement du rythme de changement mais aussi et surtout de l’offre de services commerciaux et non commerciaux proposés à ceux qui adoptent ces technologies intégrées.
Pour des raisons de productivité, de communication et de distribution, la publicité, la presse, l’audiovisuel, mais aussi la plupart des grands secteurs de l’économie, voire même la politique, ont largement entamé leur restructuration autour de l’Internet d’aujourd’hui, et plus encore de celui de demain (avec une forte augmentation de bande passante, l’interopérabilité de toutes les machines, la baisse constante des prix et tarifs) ; il est inévitable que l’enseignement et la formation soient eux aussi happés par la vague.
Pour la première fois dans l’histoire depuis la création des réseaux d’université au Moyen Âge les conditions sont favorables à une restructuration des rapports pédagogiques et des modes de distribution de l’enseignement. L’impact en sera d’autant plus important que les opportunités de développement des individus sont aujourd’hui intimement liées à leur niveau d’éducation et de formation.
Pour l’éducation, le fait marquant n’est donc pas seulement l’avènement d’un multimédia véhiculé par des réseaux de communication de plus en plus diversifiés dans leur composition technologique et intégrés dans leur fonctionnement, c’est surtout son adoption massive dans tous les environnements : professionnels, domestiques, publics. Les frontières entre le monde professionnel et la vie privée éclatent, comme en témoignent la diffusion du télétravail et des bureaux mobiles ainsi que la participation des salariés au capital de leur entreprise.
Nous assistons aujourd’hui à la mise en place rapide d’une infrastructure qui permettra le déploiement universel de ressources autrefois localisées et gérées par des experts contrôlant de façon quasi dictatoriale leur champ d’opérations : la salle de cours avec la bibliothèque consacrée comme espace annexe. Nous utiliserons dans cet exposé le terme « classe électronique » mais ce n’est qu’une métaphore qui décrit un aspect d’un environnement pédagogique autant réel que virtuel dont les frontières seront constamment redéfinies dans les années à venir.
L’évolution du multimédia dans le monde éducatif
Le multimédia est devenu une réalité commerciale avec un impact universel en 1992 lorsque la carte audio SoundBlaster s’est imposée pour devenir un standard de fait. Une industrie d’édition multimédia, qui avait dans un premier temps et très timidement misé uniquement sur le monde du Macintosh, pouvait commencer à envisager un déferlement du CD-ROM multimédia comme support de logiciels d’un nouveau type pour le divertissement, l’éducation et les applications professionnelles.
On oublie souvent qu’une première génération de technologie multimédia avait vu le jour dans les années 70 et qu’une activité d’édition a connu un succès, réel bien que limité, autour de cette technologie pendant les années 80, surtout dans les pays anglophones. Le disque laser couplé à un micro-ordinateur permettait la réalisation d’une qualité de multimédia que seul le DVD avec le format de vidéo MPEG2 peut commencer à égaler.
Malgré la qualité du résultat, les conditions n’étaient pas réunies pour l’essor d’une activité d’édition : manque de standards, coût et complexité des équipements, incohérence de la distribution. Néanmoins, des sociétés comme Applied Learning et Comsell (États-Unis), IIS et Rank (Grande-Bretagne), et Interaxis (France) ont réussi à occuper un créneau sur le marché professionnel et à intéresser les responsables de formation au concept de l’autoformation multimédia.
Les années 80 furent aussi l’époque des premiers centres de ressources d’entreprise, et le concept de médiathèque commençait à succéder à celui de bibliothèque pour les besoins de stockage et de consultation de documents importants liés à la formation. Certains prétendaient que les vertus des nouveaux outils permettaient de prévoir des formations sans formateurs. Mais l’avènement du marché multimédia autour de CD-ROM et de PC avec carte son et moniteur couleur a orienté l’activité d’édition vers la cible grand public et a étouffé la créativité pédagogique constatée autour du disque laser dix ans plus tôt.
Il n’y a guère que dans le domaine des langues étrangères (et surtout de l’anglais) que les éditeurs se risquaient à lancer des programmes pédagogiques ambitieux. Et même dans ce domaine, le succès était plus dû à des campagnes de marketing classique visant surtout le grand public qu’aux qualités innovantes et pédagogiques des produits.
Aujourd’hui, le monde pédagogique est relativement déçu par les produits multimédias et les enseignants sont souvent heureux de montrer leur peu de succès et leurs lacunes pédagogiques. Certains produits sont pourtant excellents notamment ceux qui ont su intelligemment combiner l’excitation des différents sens auxquels s’adresse le multimédia par le texte, l’image animée et le son ainsi que l’interactivité permise par les CD-ROM.
Les logiciels d’apprentissage des langues développés sous la direction de Peter Isackson : Welcome to business (anglais) et Une journée bien remplie (français langue étrangère), édités depuis 1995 par CMP ont atteint un degré élevé d’interactivité et d’exploitation du multimédia grâce à la vidéo plein écran en MPEG. Mais la démarche « autoformation » que l’on a crue possible n’a pas déclenché de vrai et profond processus d’apprentissage, l’apprenant atteignant rapidement le stade de l’essoufflement et de la lassitude. L’efficacité de la démarche pédagogique traditionnelle (le cours magistral et les classes des cursus standard, accompagnées ou non de travaux pratiques), même s’appuyant sur ces nouveaux moyens multimédias, est également contestée.
On a certes cherché à prendre en compte de nouvelles notions, comme celles d’identité et d’image de soi chez l’apprenant et leur impact sur les résultats d’apprentissage, mais il fallait imaginer d’autres moyens d’intervention dans le processus pédagogique à l’intérieur d’une infrastructure pédagogique renouvelée. C’est ici que l’arrivée des réseaux, et surtout du réseau des réseaux (Internet), permet l’exploitation intensive des apports du multimédia.
L’évolution de l’enseignement à distance
Avec l’accroissement de la mobilité, le désir d’universalité de l’enseignement et de la culture, la multiplication et l’approfondissement des disciplines, la rareté et le coût des experts pour les enseigner, l’enseignement à distance est devenu une nécessité de plus en plus impérieuse. Pratiqué de façon classique (papier et courrier) avec des résultats indéniables même si ceux-ci étaient dus beaucoup au fait qu’il n’y avait souvent pas d’alternative, il a peu évolué : la télécopie, les supports multimédias comme les cassettes vidéo ont certes permis d’améliorer sensiblement la qualité et l’efficacité mais on en est resté aux méthodes pédagogiques traditionnelles.
Avec l’arrivée d’Internet, il y a tout juste trente ans, dont on rappelle que l’infrastructure a été vite mise à la disposition du monde universitaire pour faciliter la recherche, les échanges de documents et la consolidation de communautés de spécialistes, une culture Internet est née chez les pratiquants réguliers qui prenaient l’habitude de partager leurs préoccupations intellectuelles, techniques et autres avec les collègues.
Mais son application directe dans l’enseignement n’a pas donné immédiatement les fruits escomptés, car, comme dans le cadre du multimédia, elle n’a généralement pas fait l’objet d’une réflexion profonde sur l’adaptation des processus pédagogiques en particulier dans le domaine des relations « formateur-apprenant ».
C’est dans le contexte d’un Internet fonctionnellement développé grâce à Unix, mais encore limité à la communication par texte avec la possibilité de transférer des documents complexes à distance pour une lecture ou une utilisation locale que l’un des membres de notre équipe s’est attaché à développer la qualité de cette relation formateur-apprenant. Jacques Levin, qui enseigne la physique, la mathématique et l’informatique à Nova Southeastern University en Floride aux États-Unis, a très tôt saisi l’opportunité de bâtir des programmes d’enseignement pour des apprenants qui n’auraient jamais besoin de se déplacer pour suivre des études supérieures (Ph. D. et Masters).
Pour y arriver, il fallait imaginer comment créer, maintenir, développer et conclure un processus pédagogique se déroulant sur des durées très importantes (l’obtention du diplôme) et moins importantes (la durée d’un cours). Son expérience personnelle de la communication par Internet lui a permis d’imaginer des cours dont les contenus pouvaient être diffusés par le réseau et une communication pédagogique à la fois individuelle et collective initiée et gérée en ligne.
La principale difficulté à laquelle il a dû faire face a été l’adaptation du cours aux besoins réels des apprenants, mais dans le cadre d’Internet. La simple publication d’un premier cours sur Internet donna lieu en effet à une avalanche de messages de demandes d’explications de la part des apprenants. L’examen de ces messages, traités comme des éléments de base de données relationnelles, permit rapidement d’identifier la cause de l’incompréhension et de lui porter remède en modifiant le cours et principalement en y ajoutant des exercices. Dès le deuxième cours, le nombre de messages avait été divisé par 10, le temps de travail par un facteur encore plus grand, car certaines réponses ayant été intégrées dans le cours, elles étaient soit accessibles directement par les apprenants, soit renvoyées en réponse aux questions correspondantes par un simple copié-collé.
Mais c’est bien dans la prise en considération des difficultés des apprenants exprimées par l’intermédiaire de leurs messages et la réaction sous forme de l’adaptation du cours que réside la véritable innovation : ce moyen de contrôle de la communication a alors été instauré en système associant tous les outils, mêmes rustiques du fait du niveau technologique de l’époque, pour la gestion pédagogique et administrative de la formation, la création des cours et de leur structure ; il s’appuyait sur une messagerie intégrée et associait pour la communication de groupe une « classe électronique » qui ressemble superficiellement à un « parloir » (chat), mais qui duplique certains des aspects du rapport pédagogique d’une classe pour éviter l’anarchie de la discussion libre. Grâce à ces outils et à ces nouveaux modes pédagogiques, l’efficacité de l’enseignement à distance a été décuplée dès le début des années 90.
Toutefois, une deuxième difficulté structurelle freinait les opportunités de développement du système : en dépit de fonctionnalités bien supérieures obtenues grâce à Unix, la faiblesse des interfaces par comparaison à Apple puis à Windows constituait un handicap par rapport aux outils d’autoformation non communicants. L’arrivée des « browsers » a constitué pour l’enseignement à distance un véritable tremplin vers le multimédia communicant.
Les enjeux psychologiques d’un enseignement véhiculé par la technologie
C’est en effet de cette période que date la rencontre des deux types d’expertises pédagogiques : l’une dans la pédagogie à distance par les réseaux et Internet (Jacques Levin) et celle de la pédagogie multimédia non communicante (Peter Isackson). De la confrontation de ces moyens pédagogiques, de l’examen des difficultés rencontrées par l’un et par l’autre et de la constatation d’une véritable complémentarité est née la collaboration qui allait mener à l’élaboration d’un vrai système de formation multimédia communicant et notamment à la classe électronique multimédia.
L’expérience du multimédia conçu comme un support d’autoformation sans une implication directe du formateur dans le déroulement pédagogique a montré que souvent les apprenants ne supportent pas l’idée d’apprendre tout seul. L’effet psychologique peut se traduire par un découragement profond.
De leur côté, les formateurs n’étant pas directement responsables du contenu et pouvant même se trouver en désaccord avec sa façon de développer la matière ou le style de traitement se dégagent en général de toute responsabilité et font un enseignement qui ne s’appuie pas sur le multimédia utilisé par les apprenants. Bref, le multimédia a souvent eu pour effet d’isoler les utilisateurs et de générer une forme plus ou moins sourde d’angoisse. Il est certain que cela ne favorise pas les processus d’apprentissage !
L’expérience de l’Internet montre que les apprenants qui se sentent en interactivité avec un formateur sont capables de se prendre en main et de rester accrochés pendant de très longues périodes, à condition bien entendu d’avoir un objectif général d’apprentissage et un cadre d’animation avec une succession d’objectifs programmés et contrôlés par un formateur. Grâce aux réseaux et à la nature à la fois synchrone et asynchrone de la communication, il est donc plus facile pour le formateur de construire une relation personnelle, ou qui du moins est perçue par chaque apprenant comme personnelle, que dans un cours traditionnel.
Reste néanmoins le problème du contenu et de son impact sur l’apprenant. Le formateur en ligne ne pouvant pas « donner des cours » dans le sens traditionnel, le contenu doit être découpé autrement et présenté non seulement avec un « style » différent mais aussi avec un autre esprit d’animation, à la fois plus complexe et plus proche d’une communication humaine naturelle. C’est là que le multimédia peut, si le formateur prend le soin de l’intégrer au cours, servir de base à une pédagogie qui exploite le potentiel particulier de cette ressource dans un cadre défini et contrôlé par lui.
De la sorte, le multimédia communicant est en mesure de lever les barrières psychologiques tant du côté de l’apprenant qui devient plus autonome et prend en charge son projet personnel de formation que du côté du formateur qui prend alors tout son rôle de gestionnaire de la connaissance et de moniteur de la progression des apprenants.
Certes tous les freins ne disparaissent pas comme par miracle, notamment au plan pratique, la limitation du débit des réseaux, mais le sens de l’histoire et de l’industrie permet de situer à un horizon très proche la disparition de ce handicap.
L’apport du multimédia communicant
Le multimédia se présente sous deux formes :
1. un produit fini, en général caractérisé par une structure interne complexe,
2. un ensemble de ressources qui vont des médias simples (collections d’images et de sons, associés ou non) aux activités pédagogiques construites.
Le formateur qui prendra le temps de choisir et d’examiner les contenus des supports multimédias pourra les exploiter de façon très variée. Le multimédia permet d’animer, d’illustrer, de créer du contexte, de présenter des cas complexes, de présenter des raisonnements ou des processus sous un angle original.
Même si le formateur n’est pas entièrement d’accord avec le programme multimédia qui lui est proposé, il bénéficie de l’intérêt du multimédia pour fournir un prétexte à un travail personnel conséquent et établir un contexte ou un ensemble de références qui peuvent être exploités par le formateur avec des groupes entiers ainsi qu’avec chacun des apprenants.
Lorsque le multimédia contient de la vidéo ou des simulations, le cours construit par le formateur se trouve enrichi d’une matière qu’il est difficile, voire impossible d’exploiter dans un cours collectif sans tomber dans la banalité d’un discours banalisé. Un multimédia de qualité permettra à chacun des apprenants d’acquérir une expérience privée, personnelle, indépendante qui peut ensuite être utilisée par un formateur averti pour approfondir non seulement la compréhension, mais aussi son préalable, la perception des questions et problèmes étudiés.
Autrement dit, c’est le formateur qui manie un ensemble de ressources dont la richesse dépasse souvent l’intention des auteurs du multimédia grâce à sa programmation des événements pédagogiques. Ceux-ci incluent l’échange personnel avec chaque apprenant (qui peut être à la fois très standard et personnalisé) à la séance collective de la classe électronique, en passant par des animations de type « simulation de rôle » (où deux ou plusieurs apprenants entrent en communication pour négocier ou résoudre un problème) et toute autre forme de travail en sous-groupe.
La place de l’apprenant
Dans une telle logique, la position de l’apprenant diffère radicalement à la fois de sa situation « d’élève » dans une classe, et de celle de « l’autoformé » qui reçoit son instruction d’une machine. Elle est même plus variée que la somme des deux. Tantôt, l’apprenant sera l’élève qui reçoit des consignes de son professeur, tantôt il sera le partenaire de celui-ci dans un processus de cogestion d’un plan de formation individuel.
Mais il sera également un membre actif d’un groupe avec des relations potentiellement complexes et une géométrie très variable, et ces relations seront le résultat des techniques d’animation de groupe appliquées avec une grande facilité par le formateur en ligne.
Quels sont les avantages d’une telle démarche pour l’apprenant ? Premièrement, la variété des relations sera stimulante et motivante. Ensuite, l’apprenant sera moins sujet à l’angoisse du jugement inhérent à des situations où il se trouve soit en compétition avec tous les autres, soit seul devant le professeur-juge.
Troisièmement, cette méthode permet de développer une dimension sociale (travail en commun, construction de relations humaines dans le groupe) qui manque totalement dans la démarche autoformation et se trouve souvent négligée dans la formation « présentielle » (en général, faute de temps de la part du formateur qui ne développe lui-même des relations qu’avec le groupe en tant qu’entité collective et ne peut gérer les phénomènes de communications latérales à l’intérieur du groupe qui se développeront spontanément mais en marge du programme pédagogique).
Enfin, cette méthode permet d’intégrer dans les stratégies pédagogiques les notions d’identité sociale et professionnelle ainsi que celle de l’évolution de l’image de soi (dans son parcours vers la maîtrise d’une compétence), notions rarement reconnues par les formateurs mais qui sont toujours présentes dans un parcours pédagogique réussi et en général absentes dans les cas d’échec.
Le rôle du formateur
Le formateur devient ainsi un gestionnaire de parcours, un programmeur d’événements pédagogiques (aussi variés que nécessaires) et un animateur, et tout cela, dans certains cas, sans jamais rencontrer en direct ses apprenants. L’effet de variété devrait être aussi stimulant pour le formateur que pour l’apprenant, bien que beaucoup résistent à toute redéfinition de leur rôle par crainte d’une remise en cause de leur statut d’expert en la matière.
La complémentarité des technologies
L’animation est donc bâtie sur la notion de la complémentarité des ressources et des événements dans un environnement où les technologies sont intégrées. La nouvelle génération de formateurs doit apprendre à manier une variété d’outils, chacun simple d’utilisation, et en même temps assumer les responsabilités d’un animateur et d’un gestionnaire d’événements et de ressources. Voici un résumé de sa « boîte à outils » :
- Multimédia
Des produits ou des objets complémentaires au programme de formation à faire utiliser dans un cadre défini par le formateur. - Messagerie
Communication personnalisée avec chacun des apprenants. - Stockage et traitement documentaire
La mise à disposition de documents existants ou créés par le formateur pour les besoins du groupe. - Les sous-groupes
La mise en rapport par l’utilisation de la messagerie et de la classe électronique de certains membres du groupe pour un travail en commun. Ceci peut aller vers la constitution de communautés d’intérêt. - La vidéophonie et la vidéoconférence
La technologie vidéo peut être associée lorsqu’on dispose des équipements nécessaires pour personnaliser encore plus le rapport pédagogique. - Les forums
Lieux de discussion librement ouverte aux formateurs. - La classe électronique
Le rassemblement de tout le groupe pour des séances où les objectifs peuvent être variés : présentation de travaux, présentation ou discussion d’un nouveau thème, commentaires sur des thèmes choisis, méthodologie…
La figure ci-contre représente le tableau de bord du formateur du système ClassLeader et illustre les moyens mis à la disposition du formateur. Un tableau de bord analogue est mis à la disposition de l’apprenant pour les fonctionnalités qui lui sont propres : faire des exercices, communiquer avec les autres apprenants, prendre des notes, etc.
Le futur : la classe électronique comme « nœud » de la connaissance
Dans une certaine mesure, on peut dire que la « Classe électronique » est la matérialisation de la révolution technologique et pédagogique qui est proposée par le système d’enseignement à distance multimédia par les réseaux. Élèves et formateur travaillent chacun à son rythme et à sa place selon le programme défini par le formateur et connu de tous. Au moment déterminé, la classe électronique les réunit et permet de mettre en phase les connaissances acquises par les uns et les autres depuis la dernière rencontre.
Ensuite chacun repartira avec ses objectifs propres pour acquérir un nouveau morceau de connaissance, sous le monitorat du formateur jusqu’à un prochain rendez-vous avec le formateur ou avec d’autres élèves du groupe, éventuellement avec d’autres groupes.
La classe électronique est peut-être en apparence la matérialisation la plus concrète de la transposition de la pédagogie traditionnelle dans le domaine des nouvelles technologies. Replacée dans le contexte global d’un système d’enseignement à distance elle n’est que l’une des nombreuses opportunités de faire avancer la connaissance offerte par ce système complexe dont on pourrait mentionner encore bien des aspects et des avantages, comme la nature des relations interpersonnelles qui se créent entre les acteurs ou les capacités à développer et gérer toutes sortes de projets suivant le même schéma.
Depuis la banalisation d’Internet, beaucoup de systèmes ont vu le jour dans le domaine de l’enseignement à distance par les réseaux : notons ClassDirect (Webcity), Webtutor (France Télécom), First Class, Lotus Notes Learning Space et bien d’autres. La plupart, sinon la totalité, ont été développés à partir d’une technologie mais reposent sur une pédagogie traditionnelle.
Glossaire
Browser : interface installée sur le poste de l’utilisateur et permettant la présentation des données et la navigation sur le réseau Internet.
DVD : Digital Video Disk, version optimisée des CD-ROM dont il a dix fois la capacité de stockage.
MPEG : algorithmes de compression et décompression de données permettant une réduction importante des volumes de données à transmettre dans le cas d’images et de sons.
Bien entendu, Microsoft n’est pas resté inactif, car Bill Gates a bien compris les enjeux de l’éducation à distance : enjeux culturels, sociétaux, industriels et bien entendu financiers par la taille du marché prévu pour les années qui viennent : le marché mondial progressera de 200 millions de dollars en 1997 à 2 milliards de dollars en l’an 2000 pour dépasser 50 milliards de dollars en 2002.
Même s’il n’utilise que des outils standard, notamment ceux de Microsoft, le système que nous avons développé, ClassLeader, prétend tirer sa supériorité d’une intégration complète du multimédia et de la communication à distance par Internet grâce à une pédagogie nouvelle fondée sur la communication entre les apprenants et les formateurs et visant à valoriser le rôle de chacun d’eux.
L’avenir dira si ce choix se concrétisera par le succès…