De Plymouth à Saint-Malo en sous-marin à propulsion humaine
Le défi peut sembler fou : passer une semaine au fond de la Manche, entre Plymouth et Saint- Malo, dans un sous-marin de poche à pédales.
Parce qu’ils le valent bien
Comme l’avouent avec jubilation ses inventeurs, Antoine Delafargue et Michael de Lagarde, ce projet de traversée de la Manche en sous-marin à pédales est un peu fou.
Pourtant, il est étudié avec une grande rigueur : posez leur une question sur la conception du sous-marin, la navigation, les aléas de la Manche, la gestion de la sécurité, les risques de santé, les applications scientifiques ou la communication, et ils vous exposeront leur analyse. Interrogez-les sur les partenaires, industriels, de vulgarisation scientifique, et ils vous présenteront leurs démarches.
Devant un projet à la fois si fou et si construit, je ne pouvais que leur apporter mon soutien. Aidez-les, ils le méritent.
J.-F. Minster (70),
parrain du projet
Pourtant l’entreprise est très sérieuse et longuement réfléchie, puisqu’elle est née d’un authentique rêve de gamin, nourri de Jules Verne, Rackham Le Rouge, J.- Y. Cousteau, et des images des premiers submersibles historiques, à propulsion humaine eux aussi. Avec l’âge et les responsabilités, on oublie trop facilement ces rêves d’exploration et de véhicules exotiques.
Pourtant ils ont bien souvent gardé notre curiosité et notre imagination en éveil et été à l’origine de nos vocations d’ingénieurs. Ce projet est ainsi pour nous une façon de transmettre aux plus jeunes notre passion pour les défis techniques.
Un défi physique et technique
Les obstacles à surmonter sont au rendez-vous et couvrent des domaines variés, des procédures de soudage à la physiologie du sport en passant par l’optimisation hydrodynamique.
Avec l’âge, on oublie trop facilement les rêves d’exploration et de véhicules exotiques
La coque du sous-marin devra notamment résister à la pression de l’eau au plus profond de l’itinéraire (– 120 m), qui exercera sur la trappe d’entrée une force équivalente au poids d’un semi-remorque.
La forme du sous-marin et le train de propulsion doivent être optimisés pour tirer le maximum des 150 watts de nos jambes, dans une région où les courants de marée sont parmi les plus forts au monde.
La navigation le long du fond, à l’estime et sans GPS, pimentera l’aventure, même si un bateau suiveur sera là pour nous prévenir en cas de sortie d’un périmètre prédéfini.
Sur le plan physique, enfin, le pédalage en relais à deux coûtera en calories à chacun de nous l’équivalent d’un marathon par jour. Avec un tel métabolisme, l’air devra être recyclé dans l’habitacle au même rythme que si nous étions cinq au repos. Et nous devrons tenir à deux dans moins de deux mètres cubes pendant une semaine.
Vue de la coque interne en acier et des réservoirs d’oxygène.
Le sous-marin sera ainsi probablement le plus petit sous-marin autonome en haute mer jamais construit, et le premier de ce type à propulsion humaine.
En attendant les tests en grandeur nature, nous nous reposons sur des calculs, tests physiologiques et nos partenaires, notamment Marlin Submarines, spécialistes des marins de poche autonomes situés par chance à Plymouth.
La Manche inconnue
Le choix de la Manche Ouest a été facile. Pour un Breton, la Manche fait partie du paysage, mais sous l’eau ? Les plongeurs locaux téméraires s’y risquent pendant la courte période de renverse des courants, mais les images sous-marines sont quasi inconnues du grand public. C’est dommage, car la Manche regorge d’énergie et de vie sans parler des centaines d’épaves qui y gisent.
Nous comptons donc enregistrer des images du fond en continu sur près de 300 km, mais sans pour autant faire notre tri entre images de faune, flore, épaves ou déchets. Le sous-marin et les images seront ensuite exposés au grand public dans l’un des musées ou aquariums de la région de Saint-Malo.
Nous espérons ainsi que ces images représentatives éclaireront les acteurs des politiques publiques dans leur choix concernant les quotas de pêche, parcs marins, projets éoliens et hydroliens.
Et cette moisson d’images sans précédent intéresse aussi des chercheurs en biologie marine du CRESCO de Dinard (Centre d’études et d’enseignement sur les systèmes côtiers), particulièrement dans la zone centrale plus profonde.
Agenda du projet
- Été 2013 : lancement du projet, ingénierie détaillée et construction du sous-marin.
- Janvier-juillet 2014 : assemblage et tests du sous-marin.
- Août 2014 : traversée de Plymouth à Saint-Malo, puis exposition du sous-marin dans la marina de Saint-Malo.
- Septembre 2014-mi 2015 : exposition du sous-marin et des images de la Manche (probablement au Grand Aquarium de Saint-Malo, avec lequel nous sommes en discussion).
- 2015 et au-delà : le sous-marin est disponible pour des expositions ou d’autres expéditions du même type.