Démocratiser le financement participatif de la transition énergétique
Pour relever les défis que posent la décarbonation de nos économies, la souveraineté énergétique et la lutte contre le dérèglement climatique, le financement de la transition énergétique joue un rôle stratégique. Au travers de Lendosphere, Laure Verhaeghe, Cofondatrice et Présidente de cette plateforme de financement participatif de projets d’énergies renouvelables, permet aux investisseurs privés et aux porteurs de projets de contribuer de manière concrète à ces enjeux. Elle nous en dit plus dans cet interview.
Comment la plateforme Lendosphere a‑t-elle vu le jour ?
Lendosphere a vu le jour fin 2014, à l’époque où le cadre réglementaire sur le financement participatif se mettait en place. Nous avons créé notre plateforme autour d’une ambition : mettre le financement participatif au service de la transition énergétique. Notre objectif est de permettre au grand public et aux professionnels de financer des projets d’énergies renouvelables, afin de favoriser leur ancrage local au cœur des territoires, mais aussi pour que les investisseurs bénéficient des retombées financières de ces projets via la plateforme.
Dans le monde du financement, comment vous positionnez-vous ?
Lendosphere est un acteur dédié à la transition énergétique. Notre plateforme 100 % digitale contribue à démocratiser l’investissement dans les énergies renouvelables et donne également la possibilité aux investisseurs particuliers de décarboner leurs investissements.
Concrètement, nos investisseurs peuvent choisir les projets dans lesquels ils souhaitent investir : ils s’assurent que leur investissement finance bien des infrastructures d’énergies renouvelables tout en bénéficiant d’un couple rendement risque favorable, avec des taux de l’ordre de 7 % et une absence de défaut (chiffre 2023).
Pour les porteurs de projets dans les énergies renouvelables, c’est la possibilité d’avoir accès à un financement réactif et compétitif tout en apportant un volet extra-financier important. Côté financement, nous couvrons des besoins principalement en dette, allant jusqu’à 8 millions d’euros (notre maximum réglementaire) pour accompagner la croissance des entreprises ou accélérer la construction des infrastructures d’énergie renouvelable qu’elles développent. Le fait que ces projets soient financés par le grand public contribue à leur appropriation sur le terrain. C’est alors un vecteur de pédagogie et d’implication des investisseurs qui ont la possibilité de flécher leurs investissements vers le projet de leur territoire.
Depuis sa création, Lendosphere a contribué à lever plus de 200 millions d’euros. Plus de 450 projets d’énergies renouvelables dans le solaire, l’éolien, les réseaux de chaleur, la biomasse ou encore la méthanisation ont ainsi bénéficié de ces fonds. Lendosphere s’appuie sur une base de plus de 25 000 investisseurs qui augmente chaque année de près de 40 % en moyenne. Enfin, Lendosphere fait partie de la société de gestion 123 IM, acteur historique de l’investissement privé dans l’économie réelle, et qui investit via le fonds 123 Transition Energétique aux côtés des particuliers dans certains projets mis en ligne.
Concrètement, comment fonctionne Lendosphere ?
Les investisseurs particuliers peuvent placer leur épargne à partir de 50 euros sans frais dans les projets d’énergies renouvelables qu’ils choisissent en ligne sur le site, et dont le financement a été analysé et structuré par nos équipes. Il faut au préalable s’inscrire, en quelques clics, et fournir trois documents (justificatifs d’identité, de domicile et RIB). Le crédit du compte Lendosphere se fait par carte ou virement, puis les remboursements sont perçus directement sur ce compte et peuvent être réinvestis ou récupérés vers son compte bancaire. En termes de fiscalité, c’est le prélèvement forfaitaire unique qui s’applique, et Lendosphere fournit chaque année leur imprimé fiscal unique aux investisseurs. Plus de 75 % des investisseurs sont récurrents (ils ont investi dans plusieurs projets) et le ticket moyen investi s’élève à 1 700 euros.
Sur quels critères sélectionnez-vous les projets financés via Lendosphere ?
Nous accompagnons uniquement des projets portés par de belles PME / ETI ou des filiales de grands groupes français. Nous les sélectionnons pour leur solidité, leur expérience et la structuration financière des projets qui font l’objet d’analyses techniques, financières et juridiques poussées. Au-delà, nous nous intéressons en priorité à des technologies matures, notamment l’éolien et le solaire, qui offrent une bonne visibilité sur leur rentabilité et viabilité. À date, nous n’avons aucun défaut sur l’ensemble des projets que nous avons accompagnés et avons remboursé 75 millions d’euros de capital et versé 12 millions d’euros d’intérêt.
En quoi le modèle et l’approche de Lendosphere sont-ils différenciants aussi bien pour les investisseurs que les porteurs de projets ?
Le premier vecteur de différenciation de Lendosphere est son positionnement exclusif sur le financement de la transition énergétique. Côté investisseur, notre principale différence réside dans le fait que nous leur donnons la possibilité d’investir directement dans des actifs réels et tangibles : les énergies renouvelables.
Les investisseurs bénéficient ainsi d’une mesure précise de l’impact de leurs placements, tant en termes de puissance installée (MW), de production renouvelable réalisée (MWh) et de tonnes de CO2 évitées – ce qui répond à une attente croissante de transparence et de clarté sur les placements « verts ». Nous accordons aussi une attention particulière à l’ancrage local des projets que nous finançons. Une partie des campagnes de financement est réservée « géographiquement » afin de permettre aux riverains des projets d’investir en priorité et de devenir des financeurs de la transition énergétique de leur territoire.
Pour les porteurs de projets, c’est la possibilité de mobiliser de façon réactive des financements de 100 000 à 8 millions d’euros, couvrant un éventail assez large de besoins qui correspondent à la forte croissance du secteur (financement bridge, corporate, mezzanine notamment).
Aujourd’hui, comment vous projetez-vous sur le marché en très forte croissance ?
Le financement participatif des énergies renouvelables est un marché qui a représenté plus de 300 millions d’euros en 2022, soit une croissance de 57 % en un an. Comme précédemment mentionné, Lendosphere a levé plus de 200 millions depuis sa création en 2014, dont un tiers en 2022 ! Depuis le début de l’année 2023, la collecte sur Lendosphere est déjà deux fois supérieure à la collecte réalisée l’an dernier sur la même période.
Cette croissance s’explique notamment par le fait que le financement participatif répond avec pertinence aux attentes des investisseurs en matière de décarbonation de leur portefeuille, et des porteurs de projet pour lesquels c’est un levier de financement éprouvé dans un contexte largement favorable à l’investissement dans des actifs réels verts. En effet, le cadre réglementaire, l’accélération de la lutte contre le dérèglement climatique, la question stratégique de la souveraineté énergétique ont donné un nouvel élan à ce secteur des énergies renouvelables – secteur très capitalistique auquel le financement participatif apporte une brique intéressante.
Alors que ce marché va poursuivre sa très forte croissance afin que notre pays puisse atteindre les objectifs fixés en matière de décarbonation de l’économie et, in fine, de neutralité carbone, nous visons une croissance annuelle moyenne compris entre 50 et 100 %. En 2022, nous avons créé un premier fonds dédié à la transition énergétique avec 123 M et, cette année, nous en lançons un second pour poursuivre notre montée en puissance.
Dans cette démarche, quels sont vos enjeux ?
Au cœur de nos enjeux se retrouvent la question de la démocratisation du financement privé des énergies renouvelables ainsi que celle de l’investissement dit « à impact ». Nous enregistrons aujourd’hui une base de plus de 25 000 investisseurs, une « goutte d’eau » dans le marché colossal de l’épargne française. Notre priorité est de faire connaître de manière plus large notre solution de financement participatif, qui est accessible à des profils très diversifiés d’investisseurs, tant particuliers que professionnels, tout en étant un vecteur de pédagogie sur les enjeux de la transition énergétique.
Les enjeux de finance verte sont aujourd’hui essentiels, tant pour les investisseurs institutionnels – pour lesquels ce sujet est devenu central dans toute logique d’investissement, avec de vrais leviers mis en place pour encourager les gestionnaires de fonds dans leur démarche RSE – que pour les investisseurs particuliers, qui demandent également un suivi précis de l’impact de leurs placements. Dans cet univers, nous structurons des outils de mesure et des politiques d’investissement qui répondent à ces enjeux cruciaux pour une finance réellement au service de la transition énergétique.