Des données mieux exploitées, un risque mieux maîtrisé
Rencontre avec Stéphane Rio (91), CEO de ICA. Il nous en dit plus sur cette start-up qui révolutionne la maîtrise des risques dans les banques et les institutions financières en misant sur une exploitation plus fine et performante des données.
La complexification de l’environnement financier et réglementaire ainsi que l’accélération des transformations technologiques vous impactent au même titre que vos clients. Comment appréhendez-vous cette dimension ?
Ces deux aspects sont en effet stratégiques pour le monde bancaire et plus généralement, pour les institutions financières. Les règlementations ne cessent de se durcir et changent drastiquement leur environnement.
Récemment, parmi les dernières règlementations financières déployées, il y a notamment les programmes F R T B (Fundamental Review of the Trading Book ) et MiFID 2 , qui demandent, en particulier aux banques, de calculer et/ ou de stocker beaucoup plus de données. Les banques ne peuvent pas répondre à ces impératifs en s’appuyant uniquement sur les technologies existantes.
Cette situation a poussé ces acteurs financiers à sortir de leur “zone de confort technologique” et à considérer de nouvelles alternatives.
« Cette situation a poussé ces acteurs financiers
à sortir de leur “zone de confort technologique”
et à considérer de nouvelles alternatives. »
En parallèle, on assiste à l’émergence de technologies innovantes qui ont fait leurs preuves dans d’autres secteurs d’activités et qui pourraient apporter au secteur financier des solutions aux enjeux réglementaires et législatifs, ainsi que des perspectives d’amélioration et d’efficience.
Ces transformations technologiques issues du monde du digital demandent une réflexion et une approche très différente de ce que les banques et les institutions financières ont connu jusque-là. Elles étaient habituées à des changements incrémentaux et progressifs autour de développements internes ou du recours à des progiciels qui tentaient d’évoluer jusqu’à ce qu’il faille passer à la génération suivante. Leur défi actuel est de se réinventer dans un monde où il n’est plus possible de tout faire seul : la dimension collaborative devient essentielle dans un environnement de plus en plus « open source ».
Cela amène ces acteurs financiers à se poser aussi la question de savoir ce qui doit être conservé en interne et ce qui doit être externalisé. Le gagnant de demain sera, en effet, celui qui pourra intégrer et absorber la technologie le plus rapidement et de la manière la plus efficiente possible.
De note côté, ICA se positionne sur cette rupture technologique en offrant une plateforme de big data analytique qui répond à ces nouveaux enjeux et qui peut facilement s’intégrer au architectures des acteurs de la finance.
Expert sur l’analyse des risques dans le domaine des marchés financiers, quels enjeux percevez-vous chez les institutions financières ? Comment les banques et autres institutions financières répondent-elles à ce problème ?
Depuis la crise de 2008 , la majorité des institutions financières sont soumises à une importante pression : devenir plus rentables malgré un environnement économique défavorable et une réglementation qui amène à engager des coûts supplémentaires.
Nous assistons en particulier au renforcement des équipes « compliance », mais aussi au développement des compétences informatiques pour répondre à ces exigences réglementaires. Se dégagent de cette situation 4 axes d’amélioration dans les domaines des risques et de la donnée :
- Pouvoir analyser encore plus finement les risques, tout en ayant accès à des historiques plus importants permettant de meilleures analyses et ainsi la minimisation de potentielles pertes ;
- Être plus efficace opérationnellement en rendant les processus plus automatisés et efficients, sans perte de qualité ;
- Trouver des solutions techniques adaptées (performantes, peu coûteuses, « scalables »…) répondant aux nouvelles dimensions des calculs et du stockage de données à effectuer.
- Engager une réflexion sur la mutualisation des moyens humains et techniques.
Plus particulièrement, quel est le cœur de métier d’ICA ? Quelles sont vos principales solutions ?
Nous avons fait le choix de nous focaliser sur la donnée, et plus particulièrement sur la donnée numérique qui est manipulée au quotidien par les institutions financières. Ces dernières stockent, en effet, des trillions de données (1012) quotidiennement. Des projets de data lakes ont été mis en place pour normaliser, stock er et archiver toutes ces données. S’est ensuite posée la question de la restitution et de l’exploitation de ces données, puis de la capacité à facilement y « brancher » des analytiques poussées.
Les solutions « natives » des data lakes sont très lentes et sont réservées aux experts techniques. Les solutions les plus utilisées aujourd’hui consistent à « monter en mémoire » les données numériques, mais elles sont limitées en termes de capacité (seuls des extraits du data lake sont exploités) et ont des coûts d’infrastructure extrêmement élevés. Pour répondre à cette problématique cruciale de l’industrie financière, nous avons développé une solution disruptive qui permet aux utilisateurs finaux (risk managers, asset managers, traders) d’avoir accès très simplement à l’intégralité des données stockées, sans avoir à les mettre en mémoire. Nette solution innovante permet de manipuler d’énormes quantités de données et combine simultanément l’agilité d’un Excel, la performance des solutions en mémoire, la « scalabilité » des data lakes et la spécialisation dans la gestion des risques (calculateur de risques réglementaires intégrés tel que FRTB).
A propos d’ICA
- Création en 2015 ;
- 18 employés à Paris et à Londres ;
- Des clients à Paris, Londres et New York ;
- Objectif : révolutionner le data mining.
En parallèle, quels sont les sujets qui vous intéressent ? Vos perspectives de développement ?
Nos collaborations avec de grandes institutions financières, telles que la Société Générale, sont très fructueuses, sur plusieurs plans :
- D’une part, nous réduisons massivement les coûts d’infrastructure (par un facteur de 30 à 80 comparé à des solutions en mémoire)
- D’autre part, nous rendons les processus plus efficients en donnant un accès simple et agile aux utilisateurs finaux en lieu et place de développements informatiques longs et coûteux.
- Et enfin, nous rendons possible une mutualisation entre acteurs aux besoins similaires, et permettons également une mutualisation opérationnelle pour ceux qui basculent en mode SaaS (notre solution est opérable tant en SaaS sur n’importe quel cloud public, qu’en mode « on premise » sur une infrastructure privée).
« Le secteur des hedge funds est très prometteur. »
ICA travaille également étroitement avec un hedge fund américain (l’un des top 5 mondiaux). Le secteur des hedge funds est très prometteur compte tenu de la réactivité de ses acteurs et de leur recherche permanente des meilleurs outils pour améliorer leur compétitivité. Par ailleurs, nous avons également identifié de nombreux « use cases » avec d’autres acteurs de la finance (banque de détail, asset managers, assurances…). Enfin, nous étudions aussi comment notre technologie pourrait apporter des solutions à d’autres secteurs et industries, tout en conservant cette valeur importante de double maîtrise de la technologie et du « métier ».
En termes de développements géographiques, nous allons renforcer nos équipes de R & D à Paris, développer fortement notre bureau à Londres et nous prévoyons également une implantation à New York dès 2020. Pour soutenir notre développement, nous recrutons donc des talents et des compétences techniques. Au sein de l’équipe, nous avons déjà plusieurs X (dont le CEO et CTO) et nous serions ravis d’accueillir de nouveaux polytechniciens parmi nous. Nos métiers s’adressent plus particulièrement à des profils qui s’intéressent au monde de la data, de l’ingénierie de la data à la data science, et qui veulent construire les outils analytiques de demain dans un environnement stimulant à la fois techniquement exigeant et humainement décontracté.
Jean-François Grégoire, Head of Global Markets, Société Générale
« Dans le contexte actuel, Société Générale doit permettre à ses traders et risk managers d’accéder au niveau d’information le plus granulaire et sur de longs historiques pour analyser les risques sous de nouveaux angles. Nous étions limités sur le volume de données accessibles simultanément, ralentis par des temps de manipulations inadaptés et contraints par les coûts d’infrastructure nécessaires. En utilisant des innovations externes et en collaborant avec ICA, nous avons résolu ces problèmes et permettons à nos utilisateurs d’analyser et piloter avec plus de justesse et d’efficacité nos risques et nos allocations de capital. »