Des financements innovants pour construire et entretenir les infrastructures.
Des travaux publics aux services
Une publicité récente affirme que « Les plus belles performances sont celles qui durent ». Ce slogan ramasse deux idées essentielles : tout d’abord, on ne parle plus de l’investissement (un pneumatique en la circonstance), ses caractéristiques ou son prix mais on parle du service en termes de performances ; enfin, la performance doit s’observer sur le long terme, elle doit être de haut niveau (belle) et constante (durable) dans le temps.
Ce slogan s’applique spécialement aux infrastructures et aux travaux publics qui concernent la plupart du temps des réalisations à longue durée de vie. Au travers des activités que mène l’Institut de la gestion déléguée, nous constatons et encourageons une évolution sensible des mentalités, notamment chez les maîtres d’ouvrages publics, vers une prise en compte des coûts complets de long terme des ouvrages et équipements publics, coûts en rapport avec la durée et les engagements induits par les investissements en termes de fonctionnement, d’entretien, de maintenance et de renouvellement.
Cette démarche est indispensable pour éclairer la programmation et le financement des investissements, aussi bien que l’intérêt de ménager une haute valeur résiduelle. Des correspondances sont instituées sur le plan budgétaire, avec la mise en application de la LOLF et la généralisation de la comptabilité en autorisations d’engagement et crédits de paiement. Ces approches méritent d’être approfondies, car elles reposent essentiellement sur les coûts. Afin de conduire le mouvement vers la culture du résultat en matière de gestion patrimoniale, un changement de perspective doit s’opérer : la gestion des coûts doit être enrichie par celle du service rendu, ce qui implique une approche fonctionnelle fondée sur la répartition des risques et le pilotage par la performance.
Des outils nouveaux et plus affûtés
Les partenariats public-privé (PPP) figurent parmi les instruments les plus adaptés pour appuyer ce changement. Les PPP, qui recouvrent plusieurs mécanismes juridico-économiques, ont en commun de confier à un tiers une mission globale orientée vers le service rendu, mission qui s’inscrit dans une durée elle-même déterminée par un compromis entre pérennité économique et financière du service et capacité contributive de l’utilisateur sous forme de redevances versées par les usagers ou de loyers à la charge des collectivités publiques. La principale caractéristique des PPP est de transférer à l’opérateur tout ou partie des risques liés à la mission qui lui est confiée. En tant qu’ils s’attachent à des missions de service public qui les soumet au principe de mutabilité du service, et en tant qu’ils lient sur une période plus ou moins longue deux parties contractantes pouvant subir des sujétions imprévues ou l’influence de facteurs extérieurs, les PPP sont définis comme des instruments évolutifs et adaptatifs. Le dialogue qui s’ouvre en amont de la relation contractuelle se poursuit tout du long de celle-ci et constitue un scénario continu de recherche d’optimisation entre les partenaires à travers un jeu gagnant-gagnant.
On distingue généralement deux catégories de PPP : institutionnels et contractuels. Les premiers regroupent des acteurs publics et privés au sein d’une seule personne morale sur la base d’une prise de participation (capital, droits de vote ou garanties). Les seconds sont, en droit français, les divers contrats relevant de la délégation de service public (affermage, concession) et ceux créés par l’ordonnance du 17 juin 2004 relative aux contrats de partenariats. Ces PPP contractuels proposent chacun une adaptation des principes nécessaires à la culture du résultat.
Des opportunités conjoncturelles sources de progrès
Les PPP contractuels sont ainsi inspirés par une logique de résultats (le rôle des indicateurs de performance devient central dans la rémunération) plutôt que par une logique de moyens (de coûts). La concordance est forte entre des possibilités offertes par ces contrats et les caractéristiques des infrastructures et travaux publics envisagés sous l’angle du service rendu : longue durée de vie, importantes immobilisations de capital, fortes interactions entre la conception, la construction, l’exploitation, la maintenance et le financement (le partenaire a notamment la charge d’optimiser dans le temps ces interactions entre les missions et y investit tout son savoir-faire), durabilité physique de l’investissement entraînant une demande forte d’innovation dans le service afin de maintenir la valeur ajoutée et d’évoluer avec les attentes des usagers…
À côté de ces raisons profondes, les PPP bénéficient d’une fenêtre d’opportunité qui devrait en favoriser l’utilisation. Les besoins en termes de nouveaux réseaux structurants à l’échelle européenne, en termes de renouvellement et de modernisation des équipements existant en France, dessinent une conjoncture propice pour ce type d’instruments qui, de plus, révèlent l’ensemble des coûts évitant ainsi d’alimenter la hausse des prélèvements publics. Alors que les contraintes s’alourdissent sur les finances publiques et que la dette fait « boule de neige », la disponibilité à des niveaux historiques de l’épargne privée favorise la recherche d’investissements sûrs et de long terme. Sur les huit projets des Réseaux transeuropéens (RTE) qui concernent la France, plusieurs devraient être réalisés en PPP (Canal Seine-Nord, liaisons ferroviaires Perpignan-Figueras et Lyon-Turin…). L’époque des vœux n’est pas si loin : formons celui de voir s’accomplir bientôt l’assomption de l’ouvrage par le service.