Desserrer l’étreinte du déficit public et du déficit extérieur
Si la France ne veut pas suivre le chemin de l’Irlande, de la Grèce ou de l’Espagne, elle doit se reprendre, se retrousser les manches, comme l’a fait avec succès l’Allemagne de Schröder et comme le fait avec courage l’Italie de Monti. La France doit avoir ce sursaut préconisé par la commission Camdessus en 2004, rompre avec la facilité de la dette, comme préconisé par la commission Pébereau en 2005, et réformer sans tabou ses structures périmées comme conseillé par la commission Attali en 2008.
Le temps est venu de s’attaquer aux nombreux mythes qui sclérosent l’économie nationale
Il est encore temps, mais il ne faut pas tarder.
Un modèle social périmé
La France vit dans le déni d’un modèle social périmé auquel s’accrochent nos hommes politiques de tous bords, comme le peintre s’accroche à son pinceau, avec des réformettes qui ne règlent rien et que beaucoup considèrent pourtant comme excessives.
Le temps n’est plus au débat entre doux utopistes et réalistes aux pieds sur terre. Le réaliste est l’iconoclaste, pour lequel il n’y a aucun tabou et qui, du passé, fait table rase.
La crise du logement
Le logement des Français constitue, à juste titre, un objectif primordial des pouvoirs publics. Une multitude de textes législatifs, réglementaires et d’organismes publics ou parapublics y veille.
La facture augmente sans cesse, mais la crise du logement perdure. De moins en moins d’investisseurs placent leur argent dans la pierre, malgré les nombreux avantages fiscaux y afférents.
Pourquoi cette situation spécifique à la France ? La réponse remonte à la guerre de 14, à l’issue de laquelle les anciens combattants et victimes de la guerre ont dû, à juste titre, être protégés contre les exigences des propriétaires. Depuis lors, droite et gauche ont poursuivi sans relâche cette politique de protection des locataires, sans s’apercevoir qu’elle décourageait, par ses excès, les meilleures volontés des investisseurs tant privés qu’institutionnels et qu’elle obligeait, en contrepartie, à multiplier les incitations fiscales coûteuses.
L’emploi des seniors
Dans le but, fort louable, de dissuader les entreprises de se débarrasser de leurs vieux salariés, une « contribution » pouvant atteindre 12 mois de salaire avait été instituée en 1987. Votée par le Parlement à l’unanimité, toutes tendances confondues, la contribution Delalande, du nom de son instigateur, député UMP, frappait toutes les entreprises licenciant un salarié de plus de 50 ans.
Le résultat ne s’est pas fait attendre : les entreprises ont licencié par anticipation beaucoup de salariés proches de la cinquantaine. Elles ont au surplus fortement réduit les embauches de salariés à partir de 45 ans, afin d’éviter le risque d’avoir à payer cette pénalité quelques années plus tard si le salarié ne faisait plus l’affaire.
Il a fallu près de vingt ans avant que les effets néfastes de cette contribution soient enfin reconnus, ouvrant la voie à sa suppression définitive en 2008.
Les deux déficits
On continue à agir principalement par substitution d’un impôt à un autre
Déficit extérieur et déficit public sont les deux plaies de la France. Contrairement à une opinion répandue, ces deux problèmes sont largement indépendants et doivent être traités l’un et l’autre avec détermination et en priorité sur tous les autres : quand la maison brûle, on éteint l’incendie toutes affaires cessantes, sans se demander comment on va la repeindre.
Le déficit du commerce extérieur, 51 milliards d’euros en 2010, puis 70 milliards en 2011, jamais équilibré depuis dix ans, est un des deux problèmes. La France souffre d’un déficit de compétitivité et vit depuis des années au-dessus de ses moyens, important beaucoup plus qu’elle n’exporte.
Le déficit public, près de 100 milliards d’euros en 2011, exprimé en pourcentage du PIB (6 %), pour faire moins peur qu’en pourcentage des recettes (47 %), comme le ferait n’importe quel emprunteur. Curieusement, il occulte le déficit extérieur aux yeux de l’opinion alors qu’il est d’une autre nature. Le déficit extérieur traduit un déséquilibre commercial, qui est compensé par des entrées de capitaux de l’extérieur. Le déficit public traduit un déséquilibre budgétaire structurel des administrations publiques, financé depuis trente ans par un accroissement incontrôlé de la dette publique.
Insupportable et immorale
Cette situation est insupportable et immorale.
Insupportable, car elle nous met à la merci de prêteurs internationaux qui ne nous feront pas de cadeaux lorsqu’ils auront le moindre doute sur notre capacité à les rembourser.
Immorale, car elle conduit la génération aux commandes à faire financer sa consommation par les générations futures.
Le groupe X‑Sursaut a organisé le 13 décembre dernier un colloque destiné à examiner les conséquences à court et à long terme de différentes politiques possibles, dans des secteurs aussi variés que les transports, l’énergie, le logement, l’enseignement supérieur, la santé ou les retraites, tant au niveau des finances publiques que du solde extérieur, dont l’hémorragie doit être jugulée par tous les moyens, sans tabou et sans attendre.
« Travailler plus pour produire plus, tel doit être notre leitmotiv pour desserrer l’étreinte du déficit public et du déficit extérieur. »