Dormez tranquilles jusqu’en 2100
Jean-Marc appelle au « retour de la compétence technique dans les débats de société » et déplore que des responsables politiques prennent des décisions influencées par les médias
En 200 pages d’un texte dense, bourré de chiffres puisés aux meilleures sources, Jean-Marc Jancovici démystifie bon nombre de questions relatives aux choix énergétiques et à leurs conséquences sur l’environnement, sur notre mode de vie et sur notre santé.
Dès le premier chapitre, il appelle au « retour de la compétence technique dans les débats de société » et déplore que des responsables politiques avant tout soucieux de leur réélection prennent finalement dans ces domaines des décisions fortement influencées par des médias « caisse de résonance des rouspéteurs de tout poil ».
Jean-Marc Jancovici rappelle quelques vérités salutaires :
- Rien n’est plus urgent que de réduire le plus rapidement possible l’utilisation du charbon (et tout particulièrement du lignite) gros émetteur de gaz à effet de serre qui continue de tuer chaque année des milliers de mineurs et d’habitants de la planète victimes de la pollution générée par sa combustion.
- Penser que les chouchous des médias (donc des politiques) que sont le solaire et l’éolien permettront à eux seuls de mettre fin rapidement au règne catastrophique du charbon est une chimère en raison du rythme d’investissements qui serait nécessaire.
Dès que la part de ces technologies dans la production d’électricité devient significative, il faut en effet tenir compte du coût des systèmes de stockage massif d’énergie nécessaires pour pallier leur caractère intermittent.
Jean-Marc Jancovici souligne également combien les chiffres avancés par certains peuvent être trompeurs :
- Les chiffres globaux d’énergies renouvelables incluent, souvent sans le dire explicitement, l’électricité hydraulique, totalement dépendante de la configuration des cours d’eau sur lesquels ont été installés des barrages bien avant que quiconque se préoccupe du réchauffement climatique.
La Suède est souvent citée comme un pays champion des énergies renouvelables, mais on oublie généralement d’indiquer que c’est en grande partie parce que près de la moitié de son importante production d’électricité est d’origine hydraulique ;
de plus, on ajoute rarement que ses faibles rejets de CO2 viennent également du fait que chacun de ses habitants dispose d’à peu près autant d’électricité nucléaire qu’un Français.
- En l’absence d’une capacité de stockage d’énergie significative, les chiffres élevés d’électricité éolienne et solaire affichés par le Danemark et l’Allemagne ne peuvent être généralisés rapidement à toute l’Europe car ils correspondent à une production intermittente dont une bonne partie doit être exportée à certaines heures (et à bas prix) vers des pays voisins qui n’ont pas suivi la même politique.
Le chiffre, véritablement significatif, n’est pas la part de ces énergies dans la production de ces pays, mais la part, très inférieure et jamais citée, dans leur consommation d’énergie.
Au-delà de mesures consensuelles d’économie d’énergie dans la production, le transport, les services, l’habitat, Jean-Marc Jancovici se fait l’avocat du nucléaire en montrant, statistiques à l’appui, que ses nuisances, même dans le cas de sinistres extrêmes, résultent d’erreurs humaines (Tchernobyl) ou de catastrophes naturelles (Fukushima).
Ces sinistres ont fait beaucoup moins de victimes que l’utilisation du charbon. Bien évidemment, ce point de vue ne recueillera pas l’assentiment des opposants irréductibles à cette technologie.
On peut aussi penser que l’utilisation du nucléaire ne peut guère être envisagée que dans les pays ayant la capacité scientifique et technologique nécessaire, et que sa généralisation à l’ensemble des nations de la planète est peu vraisemblable.
Commentaire
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Concernant le stockage d’énergie
Bonjour,
il s’agit là d’un livre que je ne manquerai pas de trouver dans les temps à venir !
Cependant, je souhaitais mentionner que concernant la viabilité économique du stockage massif d’énergie, la question – et le challenge – selon moi, restent ouverts. Avec l’air comprimé isotherme, il y a la possibilité de faire propre, sûr et peu cher – suffisamment peu cher pour que ce soit viable dans l’économie énergétique actuelle et future.
Surtout lorsqu’une techno innovante réduit d’un ordre de grandeur la complexité mécanique, et donc, réduit d’autant les pannes, pour mettre cette techno au même niveau de fiabilité qu’une pile chimique, mais en gardant les 30 ans de durée de vie. Et 70% d’efficacité AC-AC.
Tout ceci n’est pas encore prouvé, mais la voie est clairement là. Des startups issues de l’X se battent pour cette idée, obtiennent des fonds pour cette idée, et s’arque-boutent dans un seul but – rendre cette idée réelle. Ainsi, je ne peux pas encore affirmer dans les faits ce qui sera le moins cher, tous coûts inclus, s’ils sont déployés massivement au niveau mondial – le nucléaire, ou les énergies renouvelables. Ce que je peux dire, c’est que nous travaillons d’arrache-pied à rendre le stockage massif d’énergie viable, et que les résultats attendus arrivent bel et bien, l’un après l’autre.
Nous sommes encore en phase de R&D mais les obstacles sautent devant nous à la bonne vitesse. RDV en 2017 puis fin 2018 pour les premiers résultats puis le premier produit !
Andreï Klochko (07), président d’Airthium