Eco-Tech Ceram : l’expert de la valorisation de la chaleur fatale
Avec sa solution clé-en-main, Eco-Tech Ceram s’attaque, entre autres, à la valorisation de la chaleur fatale intermittente, un gisement de décarbonation inexploité jusque-là. Antoine Meffre, fondateur et président d’Eco-Tech Ceram, nous en dit plus dans cet entretien et revient sur le positionnement et l’offre de son entreprise, ainsi que sur ses perspectives de développement.
Quelques mots pour nous présenter votre entreprise.
Eco-Tech Ceram est une entreprise que j’ai créée en 2014 et qui dispose d’environ 1 million d’euros de capitaux propres. Elle emploie aujourd’hui 33 personnes. Son capital est détenu par des acteurs publics (BPI, la Région Occitanie, ADEME) et privés (RGREEN, QAIR, JOHES). En outre, 20 % de nos actionnaires sont des citoyens. En 2022, nous allons réaliser un chiffre d’affaires de plusieurs millions d’euros après plusieurs années de recherche développement et d’innovation.
Au cœur de votre activité, on retrouve la notion de décarbonation. Pouvez-vous nous en dire plus ?
La décarbonation consiste à réduire les émissions de CO2. C’est un concept assez vague, car il existe plusieurs manières de faire de la décarbonation. Parmi celles-ci, une approche assez pragmatique, simple et efficace est de commencer par consommer le moins possible. Concrètement, cela renvoie aux notions de sobriété et d’efficacité énergétique, à la valorisation de la chaleur perdue ou fatale, puis à l’utilisation d’énergies renouvelables.
C’est, en effet, l’enchaînement de ces actions qui permet de décarboner intelligemment une activité industrielle.
En s’appuyant sur cette logique, nous proposons un service de décarbonation clé-en-main aux industriels autour de quatre actions complémentaires :
- Le management de la sobriété et l’efficacité énergétique : nous nous rendons sur le site de nos clients pour procéder à une relève des données que nous analysons afin de pouvoir leur délivrer des recommandations pour un meilleur pilotage de leur consommation ;
- Dans un second temps, nous travaillons sur l’efficacité énergétique en optimisant notamment le réglage des brûleurs. En effet, très souvent, un mauvais réglage à ce niveau peut être une source de surconsommation énergétique. Ce sont des actions qui ne nécessitent pas d’investissement particulier et qui permettent d’obtenir en moyenne de 10 % d’économie. Il s’agit, d’ailleurs, du pourcentage de réduction qui est recherché par l’État français dans le cadre de son plan sobriété ;
- La valorisation de chaleur fatale : on estime que l’industrie perd environ 36 % de l’énergie qu’elle consomme sous forme de chaleur fatale. À ce niveau, nous recherchons la meilleure solution pour capter, valoriser en réinjectant ce gisement de chaleur perdue dans le process. Cela permet une économie d’environ 20 % de gaz, mais nécessite des investissements beaucoup plus conséquents ;
- L’électrification des process ; l’utilisation des énergies renouvelables en substitution d’une partie de la consommation de gaz.
Actuellement, nous disposons d’une installation en opération chez Tegulys depuis déjà 3 ans, un prototype chez ArcelorMittal. Cinq autres installations sont en cours d’installation, notamment chez Wienerberger et Villeroy & Boch.
Dans cette continuité, quelle est votre méthodologie d’intervention ?
Nous proposons une solution clé-en-main technique et financière qui va couvrir le volet diagnostic, études et ingénierie de financement, installation et mise en service. Selon les besoins de notre client, nous pouvons l’accompagner dans la mobilisation des aides gouvernementales comme les certificats d’économie d’énergie et les subventions (ADEME, REGION) notamment. Dans ce cadre, nous finançons les installations pour le compte de nos clients et prenons également en charge l’exploitation et la maintenance. Nous couvrons véritablement toute la chaîne de valeur ce qui, en retour, permet à un industriel d’avoir un interlocuteur unique. En parallèle, nous proposons à nos clients une offre additionnelle qui prend la forme de vente de chaleur décarbonée à partir de 25 euros le mégawattheure. Concrètement, nous allons réinjecter la chaleur fatale que nous avons valorisée dans les process du client moyennant un coût fixe très compétitif. Et cette énergie est non seulement décarbonée, mais elle a aussi un très fort rendement énergétique.
Pouvez-vous nous donner des cas d’usages concrets ?
Pour un industriel qui opère dans la céramique, nous nous concentrons sur ses process intermittents qui sont les moins efficaces et qui peuvent perdre jusqu’à 70 % de l’énergie consommée dans les fours. Nous récupérons donc cette chaleur fatale afin d’alimenter par exemple le séchoir de l’usine. Il s’agit de deux procédés intermittents qui ne fonctionnent pas de manière simultanée. À ce niveau, l’ajout d’une solution de stockage permet de faire tampon entre les deux processus et de s’adapter selon le besoin. Dans le domaine de la métallurgie, un four de traitement thermique fonctionne généralement à 800 degrés et perd de la chaleur fatale par la cheminée. Nous la récupérons afin de la réinjecter sous forme d’air chaud dans les brûleurs, ce qui permet, entre autres, d’améliorer le rendement de combustion du gaz naturel. La chaleur fatale récupérée peut aussi être utilisée pour produire de la vapeur qui est ensuite turbinée afin de produire de l’électricité.
Quels sont les gains et les avantages pour les industriels ?
Tout d’abord, nous permettons à nos clients de réduire considérablement leur consommation d’énergie fossile et leurs émissions de CO2 sans avoir à investir de CAPEX donc sans aucun risque. Le réglage et l’optimisation de leur processus, au-delà des gains énergétiques, permettent également dans certains cas d’améliorer la productivité en utilisant les mêmes équipements et installations.
En parallèle, au travers de notre offre de vente d’énergie, notre client va bénéficier, durant toute la durée de son contrat, d’un prix fixe qui ne sera pas impacté par les aléas du marché de l’énergie. Les économies générées à ce niveau pourront être utilisées pour l’optimisation et la préservation de l’outil industriel. Enfin, cet engagement en faveur de la décarbonation a un impact très positif en termes de marque employeur, mais aussi vis-à-vis des banques et des financeurs qui sont de plus en plus sensibles à la question de la transition écologique et énergétique.
Dans cette démarche, quels sont peut-être les principaux enjeux et freins qui persistent ?
Nous sommes confrontés à une réglementation assez contraignante qui peut rendre complexe certaines démarches notamment en termes de recyclage et de réutilisation de certains matériaux. En parallèle, il y a encore de nombreux efforts à réaliser en termes de gaspillage de l’énergie alors qu’on estime à 90 TWh la chaleur fatale produite en France (1 % du marché mondial). De nombreux appels à projets, soutiens financiers et subventions existent pour accompagner les industriels dans leur démarche de décarbonation et d’efficacité énergétique. Face à cette multitude d’alternatives qui émanent de différents acteurs nationaux, ces derniers sont démunis et passent souvent à côté des plus pertinents au regard de leur besoin. Il y a aussi, à ce niveau, une réflexion à mener pour faciliter l’accès à ces différents dispositifs et mécanismes.
Quelles sont les opportunités de carrière que vous pouvez offrir à des diplômés de l’école ?
Parce que nous fournissons à nos clients une solution clé-en-main, nos métiers et expertises couvrent l’intégralité de la chaîne de valeur. Dans ce cadre, nous recherchons des profils d’ingénieurs (énergie, conception, process, automatisme), des chefs de projet qui ont une appétence pour le monde des industries, les opérations, ainsi que les sujets liés à la production et la fabrication. Nous avons également besoin de commerciaux.
Et pour conclure, comment vous projetez-vous sur ce marché ? Quelles sont peut-être vos perspectives ?
Aujourd’hui, nous sommes en pleine croissance. Comme mentionné précédemment, le marché de la chaleur fatale a un très fort potentiel qui peut fortement contribuer à la décarbonation et la réduction des émissions de CO2 de l’industrie française, voire européenne. Sur le volume de chaleur fatale produit en France, nous nous intéressons plus particulièrement aux fumées de haute température propres et intermittentes. Sur ce segment, il y a un potentiel de plusieurs milliards d’euros de chiffres d’affaires à réaliser. Et au-delà, nous poursuivons le développement du volet électrification et stockage massif de l’électricité.
Plus que jamais, Eco-Tech Ceram est positionné sur un marché très porteur aux perspectives quasi-infinies dans un contexte d’accélération de la décarbonation. Sur le long terme, notre ambition est d’être reconnu comme un leader européen sur nos domaines d’expertises (tCO2_économisées/ETP), et plus particulièrement sur tout ce qui tourne autour de la valorisation de la chaleur fatale.