Electricité de France, un partenaire pour le Vietnam
Le contexte général du Viêt-nam
Le Viêt-nam a commencé sa transition d’une économie planifiée et centralisée vers une économie de marché en 1986 lors du 6e Congrès du Parti Communiste vietnamien. Ce processus s’est accéléré avec l’accès du Viêt-nam aux financements internationaux en 1993, la levée de l’embargo américain en 1994 et l’adhésion du Viêt-nam à la zone de coopération économique ASEAN (l’Association des Nations de l’Asie du Sud-Est) en 1995.
Tous ces événements ont stimulé l’économie qui a bénéficié d’un taux de croissance annuel de l’ordre de 8 % sur la période 1991–1995. Le PNB, qui s’élevait en 1993 à près de 21 milliards de US $, devait continuer à croître dans les prochaines années à un rythme annuel de 9 à 10 %.
Dans ce contexte de décollage économique, le secteur de l’électricité revêt une importance particulière et est à ce titre considéré comme prioritaire par les décideurs vietnamiens, dans la mesure où il conditionne la poursuite du développement économique et social du pays.
Engagée depuis sa création dans des activités internationales, actuellement au tout premier plan des orientations stratégiques de l’entreprise, il était naturel qu’EDF s’intéresse au secteur électrique du Viêt-nam, pays riche de potentialités.
Description et enjeux actuels du secteur électrique vietnamien
La puissance installée totale au Viêt-nam est de l’ordre de 4 600 MW, dont deux tiers sont d’origine hydraulique. La consommation d’électricité par habitant est de l’ordre de 150 kWh, à comparer à 1 000 kWh pour la Thaïlande et 500 kWh pour les Philippines. La puissance de pointe est de 2 700 MW environ et la production annuelle de l’ordre de 15 TWh.
Près de 98 % des villes et 55 % des villages sont aujourd’hui raccordés au réseau de distribution. Compte tenu d’une croissance moyenne annuelle de la demande d’électricité de l’ordre de 13 % (15 % au sud du Viêt-nam, 11 % au nord) et d’un objectif d’électrification de 80 % des villages, les besoins de production devraient s’élever à 30 TWh environ à l’horizon 2000–2005, les besoins additionnels de capacité de production s’établissant à près de 7 000 MW.
Le secteur électrique vietnamien est aujourd’hui confronté à de nombreux défis, parmi lesquels on peut identifier :
- le besoin urgent de réhabilitation et de renforcement des réseaux de distribution urbains, vétustes, sous-dimensionnés et caractérisés par des taux de perte élevés atteignant 30 % dans certains endroits. Constituant un des principaux goulots d’étranglement actuels occasionnant de nombreuses coupures freinant le développement économique du pays, le secteur de la distribution bénéficie d’une large part des financements multi et bilatéraux actuellement attribués au secteur électrique ;
- le comblement du déficit de production dans le sud du pays, dû à une croissance industrielle rapide. Partiellement réduite grâce à la mise en service en 1994 d’une ligne d’interconnexion à 500 kV de 1 500 km reliant le nord au sud du pays, la pénurie de production au sud devrait progressivement se résorber grâce d’une part, à la construction de nouvelles centrales de production utilisant du gaz provenant des gisements offshore au sud du Viêt-nam et d’autre part, grâce à la mise en service d’aménagements hydroélectriques actuellement en cours de construction ;
- le développement de l’électrification rurale du pays, primordiale au plan politique dans un souci de cohésion nationale, et destinée à freiner le déséquilibre croissant entre le rythme de développement des villes et celui des campagnes ;
- l’amélioration de la gestion, de l’efficacité technique et de l’exploitation du secteur électrique grâce, entre autres, à la mise en place d’une réorganisation institutionnelle qui s’est notamment traduite par la suppression du ministère de l’Énergie et la création en 1995 d’une société nationale intégrée d’électricité (Électricité du Viêt-nam – EVN) ;
- la nécessité de mobiliser des ressources financières considérables afin d’assurer le développement et la modernisation du secteur, besoins évalués à près de 1 milliard de US $ par an, dont 1⁄3 seulement pourra provenir des institutions multilatérales (Banque Mondiale, Banque Asiatique de Développement) et de l’aide bilatérale au développement.
Présence d’EDF au Viêt-nam
Dans le cadre du « Dôi Moi », la politique du renouveau engagée à l’occasion du 6e Congrès du Parti Communiste vietnamien, le Viêt-nam a manifesté en 1986 son désir d’ouverture à une coopération élargie avec les pays non communistes.
Société d’État gérée comme une entreprise privée, constituant une sorte de référence pour le secteur électrique vietnamien, EDF a ainsi pu relancer une activité commerciale vers ce pays en 1988, qui s’est traduite dès 1989 par la signature d’un protocole de coopération avec le ministre de l’Énergie vietnamien.
Bénéficiant d’une image positive préexistante, EDF a pu renouer des relations avec le secteur électrique vietnamien grâce à la mise en oeuvre d’actions telle l’opération pilote de réhabilitation de la distribution basse et moyenne tension du quartier de Trang Thi à Hanoi en 1990 ou la réalisation d’études de faisabilité telles l’étude d’un centre de formation au sud du Viêt-nam, ou l’étude d’un dispatching à Hanoi.
Cette approche a permis à EDF d’être en 1990 la première société occidentale à signer un contrat de consultance portant sur les études et la supervision des travaux de l’aménagement hydroélectrique de Vinh Son, situé dans la région Centre du Viêt-nam.
Dans le souci de faire partager ses compétences et d’accroître sa connaissance du contexte électrique vietnamien, EDF a développé des activités d’assistance technique et de vente de services de consultance. Outre cet apport de savoir-faire technique d’EDF, ces actions peuvent le cas échéant préparer d’éventuels projets d’investissement.
EDF a en particulier ciblé les actions de réhabilitation des réseaux de distribution urbains et les programmes d’électrification rurale, qui figurent parmi les premières priorités des électriciens vietnamiens et des bailleurs de fonds. Ainsi, EDF met actuellement en oeuvre un programme de réhabilitation des réseaux électriques des villes de Huê et de Nha Trang, financé pour une part, grâce à l’attribution d’un financement français de 2 tranches de 25 MF inscrites aux protocoles franco-vietnamiens 1994 et 1995, et pour l’autre part grâce à la mise en place d’un financement de la Banque Mondiale.
Outre des actions concrètes de réhabilitation et d’extension des réseaux moyenne et basse tension de la ville de Huê, ainsi que la fourniture d’une nouvelle sous-station 115⁄22 kV permettant de fiabiliser l’alimentation électrique, ce projet prévoit également d’assurer la formation de l’unité fournissant le service de l’électricité dans la ville de Huê à de nouvelles méthodes d’exploitation et de gestion.
Ce projet pilote constitue également une vitrine des techniques françaises de distribution, et permet ainsi d’accompagner le développement international de sociétés françaises du secteur des équipements électriques, parmi lesquelles de nombreuses PME.
Il est à noter que ce projet permet en outre de traduire sur le terrain l’action dans le domaine de la normalisation électro-technique menée par le GIMELEC au Viêt-nam, avec le soutien d’EDF et des principaux constructeurs français.
Autre domaine d’intérêt d’EDF et priorité du gouvernement vietnamien, l’électrification rurale sera un des enjeux majeurs du secteur électrique dans les prochaines années.
Réhabilitation des réseaux de distribution urbains.
© PHOTOTHÈQUE EDF/MARC MARCEAU
EDF a commencé à apporter son assistance à la société EVN afin de réaliser les études de faisabilité de différents projets et définir les méthodes de leur mise en oeuvre sur les plans institutionnel, gestion, normalisation technique, etc.
Un projet pilote dans la province de Thai Binh au nord du Viêt-nam est en cours de développement, dont le financement pourrait être assuré par la Caisse Française de Développement.
Par ailleurs et afin de lancer concrètement des opérations, EDF a financé sur ses propres fonds l’électrification des villages de Pa Nho et de Dong Khanh situés dans la province de Quang Tri au centre du Viêt-nam, ainsi que la révision de l’étude d’électrification de cette province.
En plus de la mise en oeuvre d’actions ou de projets à caractère technique, l’action d’EDF au Viêt-nam s’inscrit également dans les réflexions en cours actuellement sur les structures, l’organisation et le mode de fonctionnement du secteur électrique vietnamien.
EDF apporte notamment son soutien à la nouvelle société EVN, en mettant à la disposition des électriciens vietnamiens son expérience nationale et internationale acquise dans les domaines de l’organisation institutionnelle et de l’économie générale des systèmes électriques.
Les perspectives
Le contexte historique entre la France et le Viêt-nam, la situation privilégiée de ce pays au coeur d’une région en plein développement, la richesse de la ressource humaine ont poussé EDF à participer activement au développement du secteur électrique vietnamien.
C’est la raison pour laquelle, à la suite des premières actions de coopération technique, limitées par nature mais néanmoins primordiales pour mieux appréhender l’environnement, EDF explore depuis peu les modalités de mise en oeuvre à moyen terme d’une opération majeure d’investissement au Viêt-nam, dans un projet de production indépendante d’électricité, qui pourrait être développé suivant des schémas de type Build – Operate – Transfer (BOT) ou Joint Venture.
Malgré les difficultés prévisibles d’une telle opération, en particulier liées à l’absence de contexte réglementaire et institutionnel stabilisé, quelques opportunités d’investissement apparaissent possibles à moyen terme.
En effet, les Autorités vietnamiennes doivent faire face à d’énormes besoins de financement, auxquels ne pourront pas répondre en totalité ni les bailleurs de fonds multi et bilatéraux, ni l’électricien vietnamien EVN, compte tenu de la faiblesse de ses capacités d’autofinancement, résultant en partie du bas prix de l’électricité dans le pays. Elles devront donc ouvrir partiellement le secteur de la production d’électricité aux intervenants étrangers, en adaptant leur législation afin d’attirer des investisseurs potentiels.
Dans ce contexte et à titre d’exemple, EDF s’intéresse depuis mi-96 au projet de centrale à cycle combiné 450⁄600 MW de Phu My, qui devrait donner lieu en 1997 à un appel d’offres international qui se déroulera dans un contexte très concurrentiel. Il faut effectivement noter que, malgré un poids économique encore très faible comparé à celui de ses voisins, le Viêt-nam représente pour tous les acteurs du jeu asiatique – américains, japonais, etc. – un enjeu de premier ordre.
Au-delà d’opérations ponctuelles d’investissement, l’action d’EDF au Viêt-nam dans les prochaines années s’inscrira dans une stratégie globale de présence dans l’ensemble de la zone du Sud-Est asiatique. On peut en effet constater qu’un processus d’intégration économique régionale se met progressivement en place, sous l’impulsion de l’ASEAN, du Japon et de la Banque Asiatique de Développement. Le secteur des infrastructures et en particulier celui de l’énergie constitueront un élément fondamental de cette intégration.
Dans le domaine de l’électricité, le processus d’intégration pourrait porter sur la mise en oeuvre progressive d’une interconnexion électrique régionale et d’un développement des échanges d’énergie entre les pays de la zone, à l’image de ce qui se pratique déjà entre le Laos et la Thaïlande. Il est à ce titre significatif de noter qu’un accord portant sur l’exportation par le Laos d’environ 1 500 MW d’origine hydroélectrique à l’horizon 2010 a été signé en 1995 entre le Laos et le Viêt-nam.
L’intégration énergétique pourrait également se traduire par une amélioration de la concertation entre les pays riverains du Mekong, dont fait partie le Viêt-nam, en vue de la mise en valeur des immenses ressources hydroélectriques de ce fleuve et de ses affluents.
Forte de sa présence dans l’ensemble des trois pays de la péninsule indochinoise et s’appuyant sur le développement en cours du projet BOT hydroélectrique de Nam Theun 2 au Laos, dont l’énergie produite sera totalement exportée vers la Thaïlande, EDF devrait être en mesure de jouer un rôle significatif dans ces processus d’intégration.