Emmanuel GRISON (37), la force de conviction
À sa sortie de l’École, ingénieur des poudres, Emmanuel Grison se lance dans la recherche, menant ses travaux de cristallographie à Paris, à Zürich et au MIT. Docteur ès sciences, il est bientôt nommé au CEA, y créant un service de « radio-métallurgie ».
Soutenu par Jacques Friedel, appelé par lui comme Conseiller scientifique, il lance un des tout premiers programmes, en France, de science des matériaux, ici dédié aux métaux et aux céramiques à base de transuraniens (Pu, Np, etc.).
La « Commission des 400 »
COLLECTION ÉCOLE POLYTECHNIQUE
Demeuré très proche de l’X, il fait partie, dès les années 1950, des dix membres de la fameuse « Commission des 400 » (référence à l’objectif de 400 élèves par promo) où il prône d’importantes réformes (options, recherche, etc.) pour une École qu’à l’époque il voit « endormie dans une autosatisfaction centenaire ».
Les trépidations de 1968
Nommé professeur de chimie en 1964 et membre du conseil de perfectionnement de l’École, il vit de près les trépidations de 1968 qu’il décrit dans un passionnant ouvrage où l’on suit celles-ci au jour le jour.
Puis, en 1969, c’est le retour au CEA où lui sont confiées, à Saclay, l’importante responsabilité de la direction des matériaux nucléaires puis, de 1975 à 1978, la direction du centre.
Moderniser lenseignement à l’École
Emmanuel Grison revient alors à l’École comme directeur de l’enseignement et de la recherche (DER), le premier à occuper cette fonction qu’il ne quitte qu’à sa retraite en 1984.
“ Il prône d’importantes réformes pour l’École ”
Il entreprend là de moderniser un enseignement encore marqué par des traditions dont certaines, à l’époque, oscillent entre le vénérable et le vétuste.
Il se bat pour élargir le bassin de recrutement des professeurs, moderniser certains des cours, ouvrir l’enseignement aux options tout en veillant à la rigueur du concours de sortie, trouver un équilibre, dans les cours, entre le théorique et l’expérimental, renforcer les départements d’humanités sciences sociales (HSS) et de langues, etc.
Une conviction ferme et souriante
LE FONDATEUR DE LA SABIX
Retraite venue, il se lance avec enthousiasme dans l’histoire des sciences, fonde la Société des amis de la Bibliothèque de l’École polytechnique (SABIX), crée son remarquable Bulletin, et rédige articles et livres passionnants dont L’Étonnant Parcours du républicain J.-H. Hassenfratz, lequel fut le premier professeur de physique de l’École.
Au long de tous ces travaux et de toutes ces responsabilités, Emmanuel Grison a toujours frappé collègues, chercheurs et étudiants par une conviction ferme et souriante qui l’animait dans toutes les dimensions de sa vie, par la rigueur intellectuelle, le talent pédagogique et la recherche de l’efficacité qu’il mettait au service de chacune de ses décisions, en même temps que par le charme qui émanait de lui et l’aménité qui marquait sa relation avec autrui.
C’est, avec le décès d’Emmanuel Grison, une personnalité exceptionnelle que nous perdons. L’École, le CEA et la Nation lui doivent beaucoup. Il importe que tous ceux qui ont connu et aimé l’homme privé sachent, dans leur tristesse, combien l’homme public a été éminent.