En finir avec le « mal logement »

Dossier : ExpressionsMagazine N°654 Avril 2010
Par Bernard de KORSAK (60)

La Région Île-de-France concentre une bonne par­tie des élites de ce pays et de sa richesse patri­mo­niale. Elle concentre les situa­tions d’ex­clu­sion, notam­ment du loge­ment. C’est une crise du vivre ensemble qui gan­grène notre socié­té urbaine. Savoir la sur­mon­ter dépend de notre capa­ci­té à retis­ser un lien social autour de nous, de notre loge­ment, dans notre quartier.

Plus des deux tiers des poly­tech­ni­ciens habitent en Région pari­sienne, ou plus pré­ci­sé­ment dans l’un des huit dépar­te­ments qui com­posent la Région Île-de-France. Plus des deux tiers des pro­blèmes d’ac­cès à un loge­ment décent sont concen­trés sur la Région Île-de- France.

Simple hasard des chiffres ? La solu­tion des pro­blèmes du » mal loge­ment » ne relève-t-elle pas des poli­tiques publiques, de l’a­mé­lio­ra­tion des méca­nismes du mar­ché du loge­ment, ou d’une com­bi­nai­son des deux ?

Une région duale

Si nous appro­fon­dis­sons l’a­na­lyse, on s’a­per­çoit que la Région Île-de- France est deve­nue une région « duale » : d’un côté, elle concentre une bonne par­tie des élites de ce pays, mais aus­si de sa richesse patri­mo­niale (plus des deux tiers des rede­vables de l’im­pôt de soli­da­ri­té sur la for­tune résident en Île-de- France), d’un autre côté, elle concentre les situa­tions d’ex­clu­sion, notam­ment du loge­ment, favo­ri­sées par l’ex­plo­sion des valeurs immo­bi­lières de cette der­nière décennie.

Si nous regar­dons de plus près, nous voyons que cette dua­li­té recouvre en fait des situa­tions d’évitement.

Comme la géo­gra­phie poly­tech­ni­cienne, les plus favo­ri­sés se concentrent sur quelques quar­tiers de Paris, cer­taines villes des Hauts-de- Seine et des Yve­lines, alors que les plus fra­giles se concentrent dans la Seine-Saint-Denis et d’autres villes d’Île-de-France où se foca­lise le « loge­ment social « . Il ne s’a­git pas du résul­tat du hasard, mais comme l’a bien mon­tré Éric Mau­rin (81), d’une stra­té­gie de « ghet­toï­sa­tion » pro­fon­dé­ment à l’œuvre au sein des élites ain­si que des classes moyennes qui aspirent à leur ressembler.

Agir concrètement

Cha­cun peut donc être acteur de la lutte contre le » mal loge­ment », et nous spé­cia­le­ment, poly­tech­ni­ciens habi­tant en majo­ri­té des villes et des quar­tiers équi­li­brés d’Île-de- France, nous pou­vons agir concrè­te­ment pour rendre plus accueillant notre envi­ron­ne­ment proche aux plus fragiles.

Cha­cun peut être acteur de la lutte contre le » mal logement »

Nous pou­vons, par exemple : favo­ri­ser les ini­tia­tives des maires en faveur de la créa­tion de petites uni­tés de loge­ment social en centre-ville, plu­tôt que de s’as­so­cier au tra­di­tion­nel comi­té de défense qui accom­pagne ce type de pro­jet ; confier un loge­ment vacant à notre Asso­cia­tion qui s’en­gage, avec toutes les garan­ties néces­saires, à faire fruc­ti­fier le bien, tout en lui confé­rant rapi­de­ment une uti­li­té sociale ; consa­crer un peu de temps à mettre nos talents à dis­po­si­tion de ceux qui n’ont pas eu les mêmes oppor­tu­ni­tés ; etc.

Retisser le lien social

En Île-de-France, comme dans la plu­part des grandes métro­poles, plus qu’une crise du loge­ment, c’est une crise du vivre ensemble qui gan­grène notre socié­té urbaine. Le carac­tère durable de celle-ci, outre les enjeux envi­ron­ne­men­taux lar­ge­ment média­ti­sés, dépend sur­tout de notre capa­ci­té à retis­ser ce lien social autour de nous, de notre loge­ment, dans notre quartier.

Habi­tat et Huma­nisme Île-de-France : 
Ile-de-France@habitat-humanisme.org
www.habitat-humanisme.org

Habi­tat et Huma­nisme a été fon­dé, il y a vingt-cinq ans. Son action consiste à loger les plus fra­giles au sein de quar­tiers équi­li­brés ; mettre en pra­tique une soli­da­ri­té de voi­si­nage ; mettre l’é­co­no­mie et la finance au ser­vice de l’ac­cès à un loge­ment décent au tra­vers de l’u­ti­li­sa­tion de pro­duits de par­tage (action­na­riat, fonds com­muns de pla­ce­ment, livrets d’é­pargne, épargne sala­riale, etc.), construi­sant ain­si un par­te­na­riat public pri­vé pour le finan­ce­ment de la poli­tique sociale du logement.

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