Engelbert Humperdinck : Hansel et Gretel
Les contes de fées sont très rarement des sujets d’opéras. Tous les personnages des mythologies antiques, de L’Énéide et de l’histoire romaine, de l’Arioste, de la Bible, de Shakespeare, Hugo, Walter Scott ont leurs opéras. Très peu d’opéras se sont inspirés de Grimm, Andersen ou de Perrault comme Rusalka de Dvořák, dont le thème est proche La Petite Sirène. Hansel et Gretel est un opéra féérique beaucoup joué au Royaume-Uni et très souvent à Covent Garden, le grand opéra de Londres. Très facile d’accès, permettant des mises en scène traditionnelles plaisant à tous, il est très « payant » et Karajan et Solti qui l’ont dirigé et enregistré ne s’y sont pas trompés. Richard Strauss l’a créé en 1893, et Mahler l’a dirigé dès 1894.
Librement adapté des frères Grimm (les parents sont dans l’opéra de bien meilleurs parents), le livret reprend textuellement les passages rimés du conte, notamment les charmes de la sorcière. Première adaptation depuis que les frères Grimm ont immortalisé, le sujet a été depuis de très nombreuses fois adapté au XXe siècle (au cinéma, en manga, avec Mickey, un téléfilm de Tim Burton, un musical, etc.).
Humperdinck est un élève de Wagner. Dans cet opéra de 1893, il mêle l’orchestre et les couleurs de Wagner (on croit reconnaître parfois les murmures de la forêt) aux chansons enfantines et chants folkloriques. Dans cet opéra plus court que le prologue du Crépuscule des dieux, la musique est très adaptée à l’esprit féérique, et on se croit parfois plus proche de Mozart que de Wagner. Comme Bruno Bettelheim le rappelle dans son analyse des contes de fées, un tel conte transmis de génération en génération doit se lire à plusieurs degrés, la musique aussi.
Cette production est dirigée à l’opéra de Londres de Covent Garden en 2008 par Sir Colin Davis, qui adore cette musique, et qui a été le directeur musical de Covent Garden dès 1971. Quelle distribution ! Les stars qui tiennent les premiers rôles sont tous des piliers de Covent Garden. Magnifique Gretel de Diana Damrau, habillée en gamine, parfaite Angelika Kirchschlager (comme dans le Jules César commenté ici en juin 2020), Hansel courageux. La légendaire Anja Silja, en sorcière Grignote maléfique et dépoitraillée, est terrible dans Hocus-Pocus. Et l’impressionnant Thomas Allen, en père truculent. Les décors et costumes sont beaux et élégants, parfaitement adaptés.
Colin Davis dirige un orchestre très bien enregistré (et très bien filmé dans l’ouverture et la course des sorcières). C’est donc un enchantement pour petits et grands.
Covent Garden, Londres, Diana Damrau, Angelika Kirchschlager, Anja Silja, dir. Sir Colin Davis
DVD ou Blu-ray