ENGIE : réinventer l’énergie
Quel est le positionnement d’ENGIE au Royaume-Uni et en Irlande ?
Wilfrid Petrie : Le groupe ENGIE compte environ 17 000 personnes au Royaume-Uni et en Irlande, pour un chiffre d’affaires de 3,5 milliards de livres en 2016. Nos activités couvrent la production d’électricité, la vente d’énergie (électricité et gaz) et la fourniture de services.
Le groupe est présent dans la région depuis de nombreuses années à travers différentes sociétés. Nous avons aussi réalisé des acquisitions récentes pour proposer des offres d’énergie et de services plus proches des besoins de nos clients, comme Balfour Beatty Workplace (facility management) en 2013 ou encore Keepmoat Regeneration (rénovation de bâtiments) en 2017.
Vue de Fenway Park à Boston, ENGIE y est fournisseur d’électricité
En parallèle de notre développement dans les services, nous avons décidé de faire évoluer notre portefeuille de production d’électricité en arrêtant la production à partir de charbon (1 000 MW à Rugeley) et en développant celle d’origine renouvelable. Le tout reposant à présent principalement sur une croissance organique : nous disposons des compétences nécessaires et avons atteint la taille critique pour développer ces activités.
C’est dans cette optique que nous participons notamment à un projet d’éolien en mer de près de 1 000 MW, au large de l’Écosse. Sur le volet de la vente d’énergie, nous nous sommes récemment lancés sur le marché des clients particuliers avec une promesse unique sur le marché : nous nous engageons à offrir à nos clients le plus bas tarif disponible lorsque leur contrat d’énergie arrive à échéance, pour récompenser la fidélité.
En parallèle, nous poursuivons l’élaboration d’offres combinant énergie et services pour nos clients « BtoB » (collectivités locales, entreprises…). Nous travaillons également de plus en plus avec les villes auxquelles nous pouvons désormais proposer des offres d’énergie, mais aussi de rénovation des quartiers grâce notamment à Keepmoat Regeneration (rénovation et efficacité énergétique des bâtiments, chauffage et infrastructures électriques, services connectés et de proximité).
Qu’en est-il en Amérique du Nord ?
Frank Demaille : Au Canada et aux États-Unis, ENGIE emploie 4 000 personnes et réalise un chiffre d’affaires de 4 milliards de dollars. Nous sommes présents sur ces marchés depuis des décennies, essentiellement à travers le développement de Tractebel Suez.
Les deux étapes marquantes de notre implantation dans la région ont été la fusion avec International Power en 2010 et, plus récemment, le changement d’orientation stratégique profond du groupe : comme au Royaume-Uni, nous avons décidé de nous éloigner de la production d’électricité dite « classique », notamment à partir de charbon, pour nous diriger davantage vers les énergies renouvelables, en particulier l’éolien et le solaire.
Installation solaire OpTerra à Fresno State en Californie.
Nous avons également décidé de nous développer dans les services à l’énergie et le facility management, pour proposer des solutions sur-mesure à nos clients, qu’ils soient des industriels, des petites entreprises ou encore des villes.
En parallèle, nous investissons dans des technologies disruptives, notamment liées au stockage d’énergie. Depuis environ deux ans, nous nous positionnons de plus en plus sur des contrats de long terme avec des villes, des hôpitaux, des universités.
Cette année, nous avons d’ailleurs signé un contrat emblématique, d’une durée de 50 ans, avec l’une des plus grandes universités des États-Unis, l’Ohio State University. Nous allons notamment gérer toute leur demande en énergie, avec des obligations de réduction de consommation énergétique sur les 10 prochaines années.
Cela représente la gestion de 5 hôpitaux et près de 500 bâtiments. Nous cherchons ainsi à accroître notre empreinte géographique aux États-Unis et au Canada, en développant des offres décarbonées, pour des clients publics comme privés, le tout avec du développement organique, mais aussi en étant à l’écoute d’opportunités d’acquisitions.
Dans le cadre du plan de transformation lancé par le groupe ENGIE en 2016 afin de devenir leader du monde de l’énergie de demain, quels sont les objectifs que vous vous êtes fixés et quelles sont les actions que vous déployez pour y parvenir ?
W.P : Au Royaume-Uni, nous nous inscrivons dans la vision 3D de l’énergie de demain, portée par le groupe : une énergie qui sera décarbonée (nous avons notamment arrêté nos activités dans les centrales à charbon), décentralisée (et intégrée dans les bâtiments, avec un recours accru aux services de gestion et de diminution de sa consommation pour une meilleure efficacité énergétique) et digitalisée (par l’intermédiaire d’objets connectés).
Dans ce contexte et en ligne avec la transition énergétique mondiale que nous vivons, nous avons l’ambition : de devenir le 1er partenaire des villes et territoires ; de réaliser d’ici 2020 50 % de notre chiffre d’affaires pour les clients industriels et privés dans la vente d’offres combinant énergie et services ; devenir une référence pour les clients résidentiels grâce à notre gamme d’énergie et services fondée sur 3 principes : l’intérêt du client avant tout, des outils connectés pour gérer sa consommation, l’accompagnement de communautés.
F.D : Depuis le lancement du plan de transformation du groupe, nous avons complètement réorienté notre portefeuille de production d’électricité en Amérique du Nord pour le rendre moins carboné et moins dépendant de l’évolution des prix de marché.
Nous avons cédé une trentaine de centrales (gaz ou charbon) pour plus de 4,5 milliards de dollars avec l’objectif de réinvestir ce capital dans le développement des énergies renouvelables. D’ici 5 ans, nous voulons accroître de 3 GW notre capacité de production d’électricité d’origine renouvelable (contre 0,7 GW aujourd’hui), mais aussi élargir notre gamme d’offres de services à l’énergie.
Il y a un an, nous avons finalisé le rachat d’Opterra Energy Services en Californie, nous permettant de devenir le numéro trois américain des services à l’énergie. Cette société, dont les clients sont principalement des écoles, collèges, universités, entreprises commerciales et industrielles, développe des solutions intégrées leur permettant de maîtriser leur consommation d’énergie (stockage, production sur site, systèmes de préservation de l’eau…).
Nous avons aussi acquis une start-up californienne pionnière dans l’optimisation des batteries et, plus récemment, une société spécialisée dans l’optimisation des systèmes de climatisation de bâtiments publics et privés. Depuis début 2016, nous avons amorcé ainsi une transition, passant d’une gestion d’actifs de grande taille qu’étaient les centrales, à un focus sur des unités de production d’énergie plus petites, décentralisées, majoritairement renouvelables, et couplées à des offres de services de plus en plus sophistiquées.
Dans le cadre de la Transition Énergétique et des enjeux qui en découlent, quels sont les défis auxquels vous êtes confrontés ?
W.P : Le premier défi est de décarboner, de développer des offres à faible empreinte carbone. Le second est d’apporter une énergie au plus proche de nos clients, en l’intégrant par exemple dans les bâtiments : nous devenons un monde de solutions intégrées avec des bâtiments intelligents. À cela s’ajoute un troisième défi, technologique, porté par l’évolution toujours plus rapide des technologies et l’émergence de la digitalisation.
Il nous faut pouvoir intégrer cela dans nos offres, voire l’anticiper. Enfin, il nous faut maintenir une véritable raison d’être, un « purpose », qui sera garante de notre contribution aux solutions attendues pas nos clients et les utilisateurs finaux.
F.D : Le premier défi est d’améliorer constamment la réponse que nous apportons à nos clients : nous devons les accompagner à tous les niveaux, les aider à exprimer leurs besoins, que nous traduisons ensuite en services et actions concrètes.
Le deuxième défi est d’ordre interne : il y a toute une transformation interne à entreprendre. Aujourd’hui, il faut être plus agile et flexible, car nous sommes en permanence amenés à nous remettre en question et à repenser notre manière de travailler. Il est aussi important de s’ouvrir sur notre écosystème en nouant des partenariats avec d’autres groupes et start-ups, pour compléter notre palette d’offres.
ENGIE est un fournisseur de services intégrés de gestion de l’énergie et des installations dans le parc olympique Queen Elizabeth à Londres, avec un approvisionnement supplémentaire en énergie à faible teneur en carbone pour les communautés environnantes.
Vue aérienne de la centrale électrique de Dinorwig, dans le nord du Pays de Galles, qui fait partie de l’installation de pompage-turbinage First Hydro d’une capacité totale de 2 GW. Elle peut fournir 1,7 GW d’énergie au réseau national en seulement 16 secondes.
Quelles sont vos perspectives ?
W.P : Nous sommes sur un marché excitant qui ne cesse de se réinventer. Nous avons des perspectives de croissance sur de nombreux nouveaux marchés grâce à notre proactivité et à notre agilité.
LE GROUPE ENGIE EN BREF
-
150 000 collaborateurs dans le monde
-
Des activités dans 70 pays
-
Un chiffre d’affaires de 66,6 milliards d’euros dans le monde
-
1er producteur indépendant d’électricité dans le monde
-
1er fournisseur de services d’efficacité énergétique dans le monde
Notre développement au Royaume-Uni et en Irlande tournera autour de trois marchés principaux : le résidentiel (maison connectée, services de proximité, voiture électrique et fourniture classique d’énergie) ; les bâtiments intelligents (gestion de ces bâtiments au-delà de la fourniture d’énergie, pour les clients publics et privés) ; les villes (via la rénovation des quartiers notamment et le développement de nouveaux services pour « la ville intelligente »).
F. D : Les perspectives sont porteuses pour les métiers d’ENGIE aux États-Unis et au Canada. Indépendamment du positionnement de l’administration fédérale, de nombreux États américains et de nombreuses villes et entreprises américaines souhaitent aller de l’avant en développant des projets d’énergie renouvelable et d’efficacité énergétique.
Il ne faut pas oublier que les États- Unis et le Canada partent de plus loin que la France ou le Royaume-Uni sur ces questions de maîtrise de l’énergie, ce qui accentue le potentiel de développement.
Le champ d’opportunités est vaste et nous avons la conviction profonde que notre positionnement sur ces marchés va nous permettre de répondre à une demande et une prise de conscience croissantes en termes de consommation.