ERGOSUP : une solution pour la production et le stockage de l’hydrogène
Grâce au procédé d’électrolyse fractionnée, ERGOSUP produit non seulement de l’hydrogène sous pression, mais propose également une solution de stockage ionique intéressante aussi bien sur le plan technique qu’économique. Explications de Vincent Bizouard (X08), Directeur de l’innovation de cette start-up technologique française.
ERGOSUP conçoit et fabrique des électrolyseurs destinés à la production d’hydrogène. Pouvez-vous nous en dire plus ?
Nos électrolyseurs sont utilisés pour produire de l’hydrogène vert, en comparaison à l’hydrogène gris qui est produit à partir d’énergies fossiles. Alors que la transition énergétique s’accélère, il y a aujourd’hui toute une réflexion afin de remplacer cette production d’hydrogène gris par de l’hydrogène vert qui serait notamment produit à partir d’une électricité décarbonée. Cette transformation du marché de l’hydrogène nécessite un développement de la filière de production de l’hydrogène mais également de la filière de stockage : en effet, l’évolution du mix électrique s’accompagne également d’une augmentation des besoins de flexibilité, auxquels les électrolyseurs peuvent répondre, notamment en s’effaçant quand le réseau est sous tension, ce qui correspond généralement aux moments où l’électricité est également chère et carbonée.
Dans ce contexte, ERGOSUP a la particularité de procéder à une électrolyse fractionnée en deux étapes : l’électrolyse du zinc puis la corrosion de ce zinc en milieu acide qui provoque la génération d’hydrogène. La somme de ces deux étapes est équivalente à une électrolyse de l’eau. À l’issue de ce processus de fabrication, nos seuls consommables sont l’eau et l’électricité.
À partir de ce procédé, vous pouvez non seulement produire de l’hydrogène en pression, mais également le stocker sous forme ionique. Qu’en est-il ?
Dans une électrolyse de l’eau, une membrane est utilisée pour séparer la production simultanée de l’hydrogène et de l’oxygène. Notre procédé permet de décoreller dans le temps la production d’oxygène qui s’opère lors de la première étape et la production de l’hydrogène pendant la seconde étape. Cette dernière étape s’opère de manière spontanée sans consommation d’énergies et sans coproduction d’autre gaz, ce qui permet notamment une production en pression. Cette décorrélation temporelle de la production des deux gaz permet par ailleurs de s’affranchir du besoin d’une membrane, simplifiant ainsi la conception des cœurs électrochimiques.
À l’issue de la première étape, l’énergie peut être stockée sous forme de zinc et d’acide sur une période indéterminée et être ensuite restituée, selon le besoin et la demande, sous forme d’hydrogène. Nous avons ainsi la possibilité de stocker l’hydrogène sous forme ionique.
ERGOSUP a bien avancé sur la production de l’hydrogène. Où en êtes-vous actuellement ?
En effet, nous nous sommes d’abord concentrés sur la production sous pression d’hydrogène pour des petits systèmes, entre 100 g et 2 kg par jour.
L’idée est maintenant d’augmenter la production pour atteindre 5 à 10 kg par jour en pression de 100 à 300 bars. Aujourd’hui, le prix de l’hydrogène est impacté par le coût de l’électrolyseur et de la compression quand celle-ci est nécessaire, particulièrement pour les petits systèmes où l’amortissement du CAPEX est la principale composante du prix de l’hydrogène. C’est notamment le cas pour la petite mobilité ou les drones qui doivent embarquer de l’hydrogène à 200 à 300 bars et pour lesquels il faut actuellement comprimer l’hydrogène ce qui soulève des problématiques de poids, d’autonomie, de gestion thermique, de maintenance, de rendements énergétiques et de coûts. Le principal enjeu technique est de simplifier la production pour gagner en CAPEX. Actuellement, nous avons développé trois systèmes de production sous pression de l’hydrogène :
- Le système HYRIS LAB développé en 2018 permet de produire 100 g d’hydrogène par jour délivrés à 100 bars pour alimenter des petits réseaux comme des laboratoires. Nous avons des systèmes déployés à Lyon et à Marseille ;
- Le système pour drones a été conçu pour produire 500 g d’hydrogène par jour à 300 bars. Il s’inscrit dans le cadre d’un projet, que nous avons appelé HYDRONE, en partenariat avec le fabricant français de drones DELAIR ;
- Le système pour la production de 2 kg d’hydrogène par jour jusqu’à 200 bars pour la petite mobilité. C’est le premier système avec des stacks qui permettent de compacter le cœur électrochimique où s’opère la réaction. Cela permet d’avoir une production plus intense pour un volume donné.
Qu’en est-il pour le stockage ionique de l’hydrogène ?
Le stockage ionique de l’hydrogène a un intérêt économique, car il peut être plus compétitif que le stockage de l’hydrogène sous forme gazeuse et sous pression. Par ailleurs, les sites de stockage ionique ne sont pas soumis à la réglementation Seveso. Alors que la filière de l’hydrogène se structure et se développe rapidement, le stockage est un des maillons de cette chaîne de valeur qui reste le moins développé.
Nous travaillons sur cette brique et menons des études technico-économiques poussées pour déterminer les débouchés de cette application afin, in fine, de pouvoir stocker de grands volumes d’hydrogène à un coût compétitif sur une période indéterminée.
Quels sont les enjeux qui persistent ?
Aujourd’hui, notre principal enjeu est de fiabiliser nos technologies industrielles et systèmes. Cela demande un important travail de R&D ainsi qu’un retour sur expérience pertinent afin de pouvoir notamment simplifier l’ingénierie et optimiser nos machines. Il s’agit aussi de pouvoir nouer des partenariats stratégiques qui vont nous permettre de dynamiser le développement de nos solutions sur cette filière de l’hydrogène en pleine structuration.
Enfin, dans le contexte actuel, nous sommes soumis, comme beaucoup, à une certaine incertitude due aux aléas géopolitiques qui impactent le prix des matériaux et l’électricité, et donc notre activité.
En bref
- Création il y a une dizaine d’années
- Une vingtaine de collaborateurs