Grâce au procédé d’électrolyse fractionnée, ERGOSUP produit non seulement de l’hydrogène sous pression, mais propose également une solution de stockage ionique intéressante aussi bien sur le plan technique qu’économique.

ERGOSUP : une solution pour la production et le stockage de l’hydrogène

Dossier : Vie des entreprisesMagazine N°780 Décembre 2022
Par Vincent BIZOUARD (X08)

Grâce au pro­cé­dé d’électrolyse frac­tion­née, ERGOSUP pro­duit non seule­ment de l’hydrogène sous pres­sion, mais pro­pose éga­le­ment une solu­tion de sto­ckage ionique inté­res­sante aus­si bien sur le plan tech­nique qu’économique. Expli­ca­tions de Vincent Bizouard (X08), Direc­teur de l’innovation de cette start-up tech­no­lo­gique française.

ERGOSUP conçoit et fabrique des électrolyseurs destinés à la production d’hydrogène. Pouvez-vous nous en dire plus ? 

Nos élec­tro­ly­seurs sont uti­li­sés pour pro­duire de l’hydrogène vert, en com­pa­rai­son à l’hydrogène gris qui est pro­duit à par­tir d’énergies fos­siles. Alors que la tran­si­tion éner­gé­tique s’accélère, il y a aujourd’hui toute une réflexion afin de rem­pla­cer cette pro­duc­tion d’hydrogène gris par de l’hydrogène vert qui serait notam­ment pro­duit à par­tir d’une élec­tri­ci­té décar­bo­née. Cette trans­for­ma­tion du mar­ché de l’hydrogène néces­site un déve­lop­pe­ment de la filière de pro­duc­tion de l’hydrogène mais éga­le­ment de la filière de sto­ckage : en effet, l’évolution du mix élec­trique s’accompagne éga­le­ment d’une aug­men­ta­tion des besoins de flexi­bi­li­té, aux­quels les élec­tro­ly­seurs peuvent répondre, notam­ment en s’effaçant quand le réseau est sous ten­sion, ce qui cor­res­pond géné­ra­le­ment aux moments où l’électricité est éga­le­ment chère et carbonée.

Dans ce contexte, ERGOSUP a la par­ti­cu­la­ri­té de pro­cé­der à une élec­tro­lyse frac­tion­née en deux étapes : l’électrolyse du zinc puis la cor­ro­sion de ce zinc en milieu acide qui pro­voque la géné­ra­tion d’hydrogène. La somme de ces deux étapes est équi­va­lente à une élec­tro­lyse de l’eau. À l’issue de ce pro­ces­sus de fabri­ca­tion, nos seuls consom­mables sont l’eau et l’électricité.

À partir de ce procédé, vous pouvez non seulement produire de l’hydrogène en pression, mais également le stocker sous forme ionique. Qu’en est-il ? 

Dans une élec­tro­lyse de l’eau, une mem­brane est uti­li­sée pour sépa­rer la pro­duc­tion simul­ta­née de l’hydrogène et de l’oxygène. Notre pro­cé­dé per­met de déco­rel­ler dans le temps la pro­duc­tion d’oxygène qui s’opère lors de la pre­mière étape et la pro­duc­tion de l’hydrogène pen­dant la seconde étape. Cette der­nière étape s’opère de manière spon­ta­née sans consom­ma­tion d’énergies et sans copro­duc­tion d’autre gaz, ce qui per­met notam­ment une pro­duc­tion en pres­sion. Cette décor­ré­la­tion tem­po­relle de la pro­duc­tion des deux gaz per­met par ailleurs de s’affranchir du besoin d’une mem­brane, sim­pli­fiant ain­si la concep­tion des cœurs électrochimiques.

À l’issue de la pre­mière étape, l’énergie peut être sto­ckée sous forme de zinc et d’acide sur une période indé­ter­mi­née et être ensuite res­ti­tuée, selon le besoin et la demande, sous forme d’hydrogène. Nous avons ain­si la pos­si­bi­li­té de sto­cker l’hydrogène sous forme ionique. 

ERGOSUP a bien avancé sur la production de l’hydrogène. Où en êtes-vous actuellement ? 

En effet, nous nous sommes d’abord concen­trés sur la pro­duc­tion sous pres­sion d’hydrogène pour des petits sys­tèmes, entre 100 g et 2 kg par jour. 

L’idée est main­te­nant d’augmenter la pro­duc­tion pour atteindre 5 à 10 kg par jour en pres­sion de 100 à 300 bars. Aujourd’hui, le prix de l’hydrogène est impac­té par le coût de l’électrolyseur et de la com­pres­sion quand celle-ci est néces­saire, par­ti­cu­liè­re­ment pour les petits sys­tèmes où l’amortissement du CAPEX est la prin­ci­pale com­po­sante du prix de l’hydrogène. C’est notam­ment le cas pour la petite mobi­li­té ou les drones qui doivent embar­quer de l’hydrogène à 200 à 300 bars et pour les­quels il faut actuel­le­ment com­pri­mer l’hydrogène ce qui sou­lève des pro­blé­ma­tiques de poids, d’autonomie, de ges­tion ther­mique, de main­te­nance, de ren­de­ments éner­gé­tiques et de coûts. Le prin­ci­pal enjeu tech­nique est de sim­pli­fier la pro­duc­tion pour gagner en CAPEX.  Actuel­le­ment, nous avons déve­lop­pé trois sys­tèmes de pro­duc­tion sous pres­sion de l’hydrogène :

  • Le sys­tème HYRIS LAB déve­lop­pé en 2018 per­met de pro­duire 100 g d’hydrogène par jour déli­vrés à 100 bars pour ali­men­ter des petits réseaux comme des labo­ra­toires. Nous avons des sys­tèmes déployés à Lyon et à Marseille ;
  • Le sys­tème pour drones a été conçu pour pro­duire 500 g d’hydrogène par jour à 300 bars. Il s’inscrit dans le cadre d’un pro­jet, que nous avons appe­lé HYDRONE, en par­te­na­riat avec le fabri­cant fran­çais de drones DELAIR ;
  • Le sys­tème pour la pro­duc­tion de 2 kg d’hydrogène par jour jusqu’à 200 bars pour la petite mobi­li­té. C’est le pre­mier sys­tème avec des stacks qui per­mettent de com­pac­ter le cœur élec­tro­chi­mique où s’opère la réac­tion. Cela per­met d’avoir une pro­duc­tion plus intense pour un volume donné.

Qu’en est-il pour le stockage ionique de l’hydrogène ?

Le sto­ckage ionique de l’hydrogène a un inté­rêt éco­no­mique, car il peut être plus com­pé­ti­tif que le sto­ckage de l’hydrogène sous forme gazeuse et sous pres­sion. Par ailleurs, les sites de sto­ckage ionique ne sont pas sou­mis à la régle­men­ta­tion Seve­so. Alors que la filière de l’hydrogène se struc­ture et se déve­loppe rapi­de­ment, le sto­ckage est un des maillons de cette chaîne de valeur qui reste le moins développé. 

Nous tra­vaillons sur cette brique et menons des études tech­ni­co-éco­no­miques pous­sées pour déter­mi­ner les débou­chés de cette appli­ca­tion afin, in fine, de pou­voir sto­cker de grands volumes d’hydrogène à un coût com­pé­ti­tif sur une période indéterminée. 

Quels sont les enjeux qui persistent ? 

Aujourd’hui, notre prin­ci­pal enjeu est de fia­bi­li­ser nos tech­no­lo­gies indus­trielles et sys­tèmes. Cela demande un impor­tant tra­vail de R&D ain­si qu’un retour sur expé­rience per­ti­nent afin de pou­voir notam­ment sim­pli­fier l’ingénierie et opti­mi­ser nos machines. Il s’agit aus­si de pou­voir nouer des par­te­na­riats stra­té­giques qui vont nous per­mettre de dyna­mi­ser le déve­lop­pe­ment de nos solu­tions sur cette filière de l’hydrogène en pleine structuration. 

Enfin, dans le contexte actuel, nous sommes sou­mis, comme beau­coup, à une cer­taine incer­ti­tude due aux aléas géo­po­li­tiques qui impactent le prix des maté­riaux et l’électricité, et donc notre activité. 


En bref

  • Créa­tion il y a une dizaine d’années
  • Une ving­taine de collaborateurs

Poster un commentaire