Éric BARBAROUX (81), à l’origine de la Formula E
Ingénieur de l’armement, il a débuté sur le char Leclerc. Puis conseiller au ministère des Sports, il rencontre Alain Prost et s’engage à ses cotés en F1. Nommé directeur de la FFSA, il mesure les résistances dans la France à l’encontre de la Formule 1. C’est pourquoi il décide de montrer que la propulsion électrique atteint déjà un niveau permettant de produire une compétition sportive spectaculaire.
La naissance de cette nouvelle discipline sportive est le résultat de la persévérance d’Éric Barbaroux, à l’issue d’un parcours qui ne l’amenait pas naturellement vers la course automobile.
DU CHAR LECLERC À LA FORMULE 1
Une Formula E présentée par Éric Barbaroux (81).
Ingénieur du corps de l’armement, il a fait ses premières armes sur le châssis du char Leclerc. Après un passage à la Datar, il suit, au sein du cabinet du ministre des Sports, Guy Drut, l’organisation de la Coupe du monde 1998.
C’est à cette époque qu’il rencontre Alain Prost et s’engage à ses côtés dans l’aventure de l’écurie de Formule 1 Prost Grand Prix. Lorsque l’écurie s’arrête au début des années 2000, il aborde un nouveau défi : nommé directeur de la FFSA (Fédération française du sport automobile), il participe à un premier sauvetage du Grand Prix de France de Formule 1 qu’il organise pendant cinq saisons.
Malheureusement, et bien que la France soit l’un des leaders mondiaux de l’industrie automobile, le manque de soutien public et privé autour de cet événement amène la FFSA à arrêter définitivement son organisation en 2009.
Fort de cette expérience, Éric Barbaroux mesure les résistances dans la France moderne à l’encontre d’une compétition comme la Formule 1. Trois jours de course, accompagnés de nuisances sonores et environnementales, ne peuvent prendre place que loin des populations, ce qui pose des difficultés logistiques et d’hébergement majeures. L’aspect écologique d’une telle compétition génère des oppositions fortes.
Enfin, les démonstrations ostentatoires qui accompagnent les courses de Formule 1 rendent tout soutien public difficile dans la France du début des années 2000. À la même époque, du côté des instances du sport automobile qu’Éric côtoie, il mesure combien la voiture électrique souffre d’un déficit d’image alors même que les nouvelles technologies lui laissent espérer un réel potentiel de développement.
CONVAINCRE PAR L’EXEMPLE
Fort de ces constats, en 2010, il décide de montrer que la propulsion électrique atteint déjà un niveau de performance et une maturité permettant de produire une compétition sportive spectaculaire.
Il s’associe à Pierre Gosselin, expert en marketing automobile, fonde sa société, Formulec, et développe, avec le soutien de la société d’ingénierie Segula Technologies, un premier prototype de monoplace qui effectue des démonstrations dans différentes villes à travers le monde.
Ce prototype démontre que la performance poussée à l’extrême est accessible à l’électrique, et permet de produire un spectacle sportif télévisuel d’une heure environ, suffisant pour attirer les téléspectateurs. Il démontre aussi l’intérêt des grandes capitales pour promouvoir cette compétition.
La première pierre posée, il fallait encore construire l’édifice. En parallèle, la FIA (Fédération internationale automobile), dont le président Jean Todt soutient fortement le concept, lance un appel d’offres afin de trouver un promoteur à ce nouveau championnat.
C’est une équipe emmenée par l’homme d’affaires espagnol Alejandro Agag qui relève le défi, et crée alors le Championnat FIA Formula E.
GENÈSE ET ENJEU DU RÈGLEMENT
Les deux parties se rapprochent rapidement, et le projet Formulec s’intègre dans cette nouvelle structure où tout reste à construire. Éric prend en charge la mise en place des opérations du championnat, avec plusieurs objectifs : assurer des performances qui garantissent à Formula E de figurer au premier plan des compétitions automobiles, permettre à cette formule d’évoluer à la vitesse des progrès rapides des technologies électriques, garantir une sécurité au meilleur niveau dans l’exploitation de la propulsion électrique tout en évitant la surenchère technologique et économique toujours problématique en sport automobile.
Il a ainsi fallu identifier les meilleurs compromis entre faisabilité technique, performance, sécurité et spectacle. Cette recherche de compromis amène à imposer un changement de voiture à mi-course pour garantir la performance, tout en évitant des voitures trop encombrantes et lourdes.
Il a aussi fallu travailler le dispositif de charge des voitures et la logistique globale de l’événement jusqu’au calendrier des épreuves autour du monde afin de minimiser les émissions globales de CO2 avant de les compenser pour un championnat écologiquement neutre.
Enfin, le règlement technique a été dès le début conçu pour évoluer au fil des premières années : en 2014, les voitures sont toutes identiques ; dès 2015, les écuries ont pu personnaliser l’électronique de pilotage des machines électriques.
UN CHAMPIONNAT QUI SE DÉMARQUE
Les courses, qui se déroulent au centre des villes, sont accessibles à un public plus large grâce aux infrastructures de transport en commun.
Après deux ans de préparatifs à marche forcée, la première course se déroule à Pékin en septembre 2014. Plusieurs autres capitales du monde entier ont adhéré dès la première saison : Berlin, Moscou, Buenos Aires et Londres. Le défi suivant relevé par Éric a été de faire en sorte que Paris, pionnière de l’écomobilité via Autolib, rejoigne le calendrier dès 2016.
Le plateau est constitué d’équipes provenant de tous les principaux pays de l’automobile : Chine, États-Unis, Japon, Allemagne, Inde, Angleterre et bien sûr France.
Des acteurs majeurs de l’automobile ont déjà mis un pied dans cette formule en détenant ou soutenant des équipes comme Renault, impliqué dès la genèse du projet, BMW, VAG via la marque Audi, et PSA via la marque DS associée à l’écurie Virgin Racing.
Les courses, qui se déroulent au centre des villes, sont accessibles à un public plus large grâce aux infrastructures de transport en commun, la journée prend une dimension plus familiale : le sifflement à peine appuyé des voitures permet à la musique ou à un commentaire audible pour le spectateur d’accompagner la course.
UNE RÉVOLUTION EN DOUCEUR
DES IDÉES NOVATRICES
Un exemple inédit d’innovation est celle apportée au niveau de l’interactivité : le public a à chaque course la possibilité, via un vote sur une appli smartphone ou Internet, de favoriser les pilotes les plus « populaires » par un surcroît de puissance pendant quelques secondes.
Le Championnat FIA Formula E a maintenant connu ses deux premières saisons et le succès populaire, technologique et médiatique est au rendez-vous. Un des principaux talents d’Éric aura été d’avoir su amener cette révolution en douceur par l’exemple et la persuasion.
Il a ainsi créé un vecteur supplémentaire de diffusion et d’acceptation de nouvelles technologies écologiques.
Il a enfin participé à la création d’une discipline où la France est représentée à tous les niveaux, management, ingénierie, team et pilotes.