Étienne SCHLUMBERGER (36), exemplaire et indocile
Né à Paris en 1915, l’année même de la mort de son père, ingénieur et capitaine d’aviation, Étienne Schlumberger entre à l’École en 1936. Descendant d’une lignée de trois X (et ancêtre de deux autres), il s’illustre comme géné‑K et ne manque pas d’embarrasser une administration qui ne peut ni le punir ni l’empêcher de sortir dans le Génie maritime.
L’évasion des sous-marins
Après sa croisière sur la Jeanne‑d’Arc et l’école d’application, il est affecté à la réparation des sous-marins à Cherbourg au début de 1940. C’est là qu’il organise, dès le 19 juin, « l’évasion » de quatre sous-marins français vers l’Angleterre puis son propre départ sans avoir entendu l’appel du général de Gaulle.
“ Il organise son propre départ sans avoir entendu l’appel du général de Gaulle ”
Il veut par-dessus tout continuer à combattre, refuse de revenir en France et se rallie à la France libre en juillet. Muté à sa demande dans la Marine, il est rapidement embarqué comme officier et fait campagne à bord de divers avisos ou aux côtés de l’amiral Thierry d’Argenlieu jusqu’au début de l’année 1942.
Il rejoint le sous-marin Junon en février 1942 et le commande de mars 1943 à août 1944, allant de la Norvège à Alger, et déposant ou embarquant agents ou commandos.
Son caractère indépendant et généreux se manifeste notamment quand, ignorant les ordres, il s’éloigne du convoi marchand qu’il protège et sauve un équipage dont le navire avait été coulé par un sous-marin allemand.
Il arme ensuite le sous-marin Morse puis rejoint à nouveau l’état-major et suit l’amiral Thierry d’Argenlieu en Indochine.
De retour en France à sa demande en 1947, il poursuit sa carrière militaire mais supporte mal ce qu’il ressent comme un isolement de gaulliste et démissionne en 1953.
Au sein de la société Shell, il se consacre alors à l’architecture navale – pétroliers ou transporteurs de gaz liquéfié – puis s’intéresse au stockage géologique de gaz et crée la société Géostock qu’il dirige jusqu’à sa retraite en 1975.
Compagnon de la libération
Condamné aux travaux forcés à perpétuité par un tribunal de Vichy en 1943, il regrettera longtemps qu’on ne l’ait pas jugé digne de la peine capitale. Après l’annulation de cette sentence en 1944, il est fait Compagnon de la Libération en 1945 et recevra notamment la prestigieuse DSO britannique.
Grand amateur de voile, Étienne Schlumberger a profité du « début » de sa retraite pour faire le tour du monde et a séjourné régulièrement en Polynésie jusqu’en 2001.
Il vivait depuis en Bretagne et avait accueilli avec humour sa récente promotion au titre de grand officier de la Légion d’honneur.
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1. Les Combats et l’honneur des Forces navales françaises libres,
Éditions du Cherche-Midi, 2007.