Etymologie de la Covid-19 : la couronne solaire

Étymologie :
À propos de la Covid-19

Dossier : Covid-19Magazine N°758 Octobre 2020
Par Pierre AVENAS (X65)

L’acronyme COVID-19 désigne la mala­die à coro­na­vi­rus appa­rue en 2019, et deve­nue une pan­dé­mie (du grec pan « tout » et dêmos « peuple ») en 2020. C’est à la base un terme anglais for­mé de COronaVIrus Disease 2019, où disease signi­fie « mala­die », d’où le genre fémi­nin en fran­çais prô­né par l’Académie pour COVID, dont par ailleurs les trois com­po­santes, coro­na, virus et disease, sont d’origine latine.

Virus

Com­men­çons par virus, qui est emprun­té tel quel au latin et qui est au centre de l’acronyme, d’où le genre mas­cu­lin don­né par cer­tains à COVID. En latin, virus a dési­gné d’abord tout liquide d’origine natu­relle, comme le suc d’une plante, qu’il soit bon ou mau­vais, ou la sécré­tion d’un ani­mal telle que par exemple sa semence, ou encore son venin (nom­mé aus­si en latin vene­num, d’où viennent venin, véné­neux, veni­meux). C’est de là que le latin virus a pris le sens géné­ral de poi­son, d’infection, voire d’odeur infecte. Ce sens est pas­sé au fran­çais où, dès le XVe siècle, virus a dési­gné tout agent trans­met­teur de mala­die, virus étant alors plus ou moins syno­nyme de germe ou de microbe, puis de bac­té­rie… Enfin au XXe siècle les bio­lo­gistes ont défi­ni ce qu’est un virus (appe­lé d’abord virus-fil­trant, car pas­sant à tra­vers cer­tains filtres cali­brés) et une bac­té­rie (arrê­tée par ces filtres). On connaît aujourd’hui des mil­liers d’espèces de virus, qui infectent les humains (envi­ron 130 sont patho­gènes, les mau­vais virus), les ani­maux, les plantes… et les bac­té­ries, et dans ce cas ils peuvent être de bons virus. On retrouve ain­si en bio­lo­gie un virus bon ou mau­vais selon les cas, comme le virus au pre­mier sens en latin. 

Il y a d’autres exemples de telles évo­lu­tions de sens entre le bon et le mau­vais. « Tout est poi­son, rien n’est poi­son ; c’est la dose qui fait le poi­son », disait Para­celse au XVIe siècle. La dose fait aus­si le remède. Ain­si le latin potio « bois­son » devient en fran­çais potion, pour un médi­ca­ment, et abou­tit d’autre part à poi­son. En grec ancien, phar­ma­kon dési­gnait tan­tôt un poi­son, tan­tôt un remède, sens qui l’emporte dans la phar­ma­cie. Mais les plus inat­ten­dus peut-être sont ces faux amis : en anglais gift « cadeau » et en alle­mand Gift « poi­son »… ce qui se donne, de bon ou de mau­vais (on parle aus­si de cadeau empoisonné !).

Corona

Le terme coro­na­vi­rus appa­raît en 1968 dans une publi­ca­tion en anglais de Nature, où les auteurs com­parent ce type de virus sphé­rique, avec des excrois­sances arron­dies un peu comme des pétales, au Soleil et ses pro­tu­bé­rances situées dans la cou­ronne solaire, en anglais solar coro­na. En anglais en effet, le latin coro­na « cou­ronne, halo » est uti­li­sé tel quel en astro­no­mie alors que coro­na abou­tit à crown dans le lan­gage cou­rant. Le mot coro­na­vi­rus est donc du latin, mais pas­sé par l’anglais.

Disease

Quant à l’anglais ease « aise », et son oppo­sé disease « mala­die », ils viennent de aise, desaise « malaise, mala­die » en ancien fran­çais, où aise, aisance pro­viennent, par suite d’une éton­nante évo­lu­tion pho­né­tique, du latin adja­cens, adja­cen­tia (formes du verbe adja­cere « se situer à côté, être adja­cent ») dési­gnant de l’espace libre à proxi­mi­té, comme les ter­rains libres autour d’une mai­son, où l’on ins­talle les dépen­dances qui apportent des com­mo­di­tés, donc l’aisance maté­rielle, d’où l’aise, l’aisance en géné­ral, à l’opposé du malaise.

Épilogue

Le comble, c’est que la menace de la Covid-19 nous inter­dit d’être trop adja­cents, et que cela ne nous met pas plus à l’aise pour autant !


Retrou­vez toutes les chro­niques éty­mo­lo­giques de Pierre Ave­nas : Ety­mo­lo­gix

Article Le covid 19 ou La covid 19 sur le site de l’A­ca­dé­mie française

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