Euronext, la “La Bourse paneuropéenne”

Dossier : L'EuropeMagazine N°586 Juin/Juillet 2003Par Jean BLONDEAU (55)

Issue de la fusion, en sep­tembre 2000, des Bourses de Paris, Amster­dam et Bruxelles, Euro­next a éten­du en jan­vier 2002 sa cou­ver­ture géo­gra­phique et ren­for­cé sa dimen­sion éco­no­mique. Elle a en effet acquis à cette époque la socié­té bri­tan­nique, Liffe, gérant à Londres une impor­tante Bourse de pro­duits finan­ciers déri­vés, et la socié­té des Bourses de Lis­bonne et Por­to, qui regroupe l’en­semble des mar­chés bour­siers portugais.
Au début de l’an­née 2002 ce sont 1 600 socié­tés qui étaient cotées sur Euro­next et leur capi­ta­li­sa­tion bour­sière était de 2 170 mil­liards d’eu­ros (la crise bour­sière de l’an­née 2002 a entraî­né une légère dimi­nu­tion de ces chiffres).

L’ob­jec­tif pour­sui­vi à la consti­tu­tion du groupe Euro­next était de par­ti­ci­per à l’in­ter­na­tio­na­li­sa­tion des mar­chés de capi­taux et de créer un mar­ché glo­bal euro­péen capable d’of­frir aux opé­ra­teurs euro­péens une liqui­di­té accrue et des coûts de tran­sac­tions plus faibles. Cet objec­tif se concré­tise avec la mise en place d’une plate-forme de négo­cia­tions com­mune aux quatre places du conti­nent pour les mar­chés « cash » et la concen­tra­tion à Londres des opé­ra­tions sur les pro­duits déri­vés. Le groupe Euro­next devient ain­si la pre­mière Bourse euro­péenne intégrée.

La stra­té­gie du Groupe aujourd’­hui demeure défi­nie selon trois axes :

  • faci­li­ter la crois­sance des mar­chés de capi­taux en Europe en orga­ni­sant un véri­table mar­ché euro­péen effi­cace et créa­teur de valeur pour tous les uti­li­sa­teurs du sys­tème boursier ;
  • défi­nir des stan­dards glo­baux en matière de négo­cia­tion, com­pen­sa­tion, règle­ment-livrai­son et ser­vices d’information ;
  • res­ter un meneur dans la conso­li­da­tion euro­péenne par la réa­li­sa­tion de fusions et d’al­liances pour avoir en Europe un mar­ché de capi­taux plus large et plus efficace.

Euro­next NV, la socié­té mère du Groupe, est de droit néer­lan­dais : elle est cotée sur toutes ses places depuis juillet 2001 et son capi­tal est répar­ti depuis lors entre de nom­breux action­naires euro­péens et amé­ri­cains. Elle est admi­nis­trée par un Conseil de sur­veillance et un direc­toire. C’est un Fran­çais, Jean-Fran­çois Théo­dore, qui est le pré­sident du direc­toire. Comme le direc­toire, le Conseil de sur­veillance est com­po­sé de per­son­na­li­tés des cinq pays : il est pré­si­dé par un Néer­lan­dais et il com­prend trois Fran­çais, dont deux polytechniciens.

Le groupe Euro­next emploie près de deux mille sala­riés. Il a réa­li­sé en 2002 un chiffre d’af­faires proche de un mil­liard d’eu­ros, pour un résul­tat net de cent soixante-six mil­lions d’euros.

Depuis le début de l’an­née 2003, le groupe Euro­next est entré dans une phase d’in­té­gra­tion en se struc­tu­rant en lignes de métiers trans­na­tio­nales ; ain­si, trois « Stra­te­gic Busi­ness Units » (SBU) ont été créées :

  • la SBU « Cash and Lis­ting », dont la direc­tion et l’es­sen­tiel des moyens sont à Paris, est en charge du mar­ché des titres (actions, war­rants, tra­ckers…) et de la ges­tion de la cote (rela­tion avec les émet­teurs, admis­sions en Bourse…). Le sys­tème infor­ma­tique de négo­cia­tion, iden­tique sur l’en­semble des places cou­vertes, est le sys­tème NSC, déve­lop­pé à Paris à la fin des années quatre-vingt-dix ;
  • la SBU « Deri­va­tives », dont la direc­tion est confiée au Liffe (Londres), est en charge des mar­chés de pro­duits déri­vés, qu’ils soient de taux, d’ac­tions ou de com­mo­di­ties. Déjà déployé à Londres, Paris et Bruxelles, le sys­tème de négo­cia­tion « Connect », déve­lop­pé par le Liffe, sera géné­ra­li­sé à l’en­semble des implan­ta­tions du Groupe en 2004 ;
  • la SBU « Clea­ring », dont l’es­sen­tiel des moyens et la direc­tion sont à Paris, assure la com­pen­sa­tion des négo­cia­tions sur titres et pro­duits déri­vés des places de Paris, Bruxelles, Amster­dam, et pro­chai­ne­ment de Por­to et Lis­bonne. Elle uti­lise la plate-forme infor­ma­tique « C21 » mise en place par la chambre de com­pen­sa­tion pari­sienne Clear­net depuis quelques années. Les opé­ra­tions trai­tées par le Liffe sur la place de Londres sont, quant à elles, com­pen­sées par la Lon­don Clea­ring House (LCH), donc à l’ex­té­rieur du groupe Euronext.

La chambre de com­pen­sa­tion a deux fonc­tions : par la simple com­pen­sa­tion des opé­ra­tions réa­li­sées entre les membres des mar­chés, elle réduit méca­ni­que­ment le nombre de flux finan­ciers à trai­ter, donc les coûts cor­res­pon­dants. En s’in­ter­po­sant en contre­par­tie cen­trale entre les membres auprès des­quels elle couvre son risque, quo­ti­dien­ne­ment ou même en intra-day en cas de varia­tion bru­tale des mar­chés, elle se posi­tionne en coupe-cir­cuit en cas de défaillance d’un inter­ve­nant. Elle assure ain­si une fonc­tion de sécu­ri­té, limi­tant les risques d’ef­fet domi­no, et par consé­quent le risque systémique.

En sor­tie de la chambre de com­pen­sa­tion, les règle­ments et livrai­sons résul­tant de négo­cia­tions sur les titres peuvent être réa­li­sés soit chez les dépo­si­taires cen­traux natio­naux (Euro­clear France, ex-Sico­vam, pour la France, Neci­gef pour les Pays-Bas, CIK pour la Bel­gique), soit chez Euro­clear Bank.

Ain­si, lorsque les conver­gences déjà lar­ge­ment enga­gées seront ache­vées, le mar­ché paneu­ro­péen des titres et des pro­duits déri­vés aura une réa­li­té : étant réa­li­sées dans un uni­vers euro­péen deve­nu domes­tique, les tran­sac­tions jus­qu’à pré­sent trans-fron­ta­lières s’ef­fec­tue­ront au meilleur coût et avec le maxi­mum de sécu­ri­té. Elles béné­fi­cie­ront d’une liqui­di­té accrue par le seul fait de l’é­lar­gis­se­ment du mar­ché. Au bout du compte, ce sont bien les entre­prises émet­trices et les épar­gnants qui en sor­ti­ront gagnants.

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