Gérard PILÉ (41), un rédacteur en chef humaniste
Sorti dans le corps des administrateurs de l’INSEE, Gérard Pilé a débuté sa carrière au secrétariat général à l’Aviation civile et commerciale (ancêtre de la DGAC actuelle), puis a pris en charge le service « calculs » (mécanographique, disait-on à l’époque) du CEA – sur le plateau de Saclay, un précurseur.
Vers la fin des années 1950 il « pantoufle » chez Simca, devenant l’un des très proches collaborateurs du fondateur H.T. Pigozzi à la direction de la planification et des études économiques.
“ Un caractère ouvert et une grande curiosité intellectuelle ”
À la fin de la décennie suivante, il poursuit sa carrière dans le pétrole, à l’Union des chambres syndicales de l’Industrie pétrolière (UCSIP, aujourd’hui UFIP), dont il devient directeur des études.
Ayant assisté aux premières loges au premier choc pétrolier, il publie en 1975 (avec Alain Cubertafond) Pétrole : le vrai dossier aux Presses de la Cité. Il devient alors président du Comité professionnel du pétrole (CPDP) jusqu’à sa retraite, qu’il commence activement en 1986 en dirigeant le Centre professionnel des lubrifiants avant de rejoindre La Jaune et la Rouge.
De Descartes à Bernanos
Cette carrière témoigne de son caractère ouvert et de sa grande curiosité intellectuelle. Celle-ci se manifestait en particulier en matière littéraire, où sa culture était singulièrement étendue. Il en fit bénéficier La Jaune et la Rouge, par exemple avec des articles sur Descartes, Dostoïevski ou Bernanos.
Il était également féru d’histoire, au point de faire des conférences impromptues sur la révolution de 1848 à l’équipe de rédaction de La Jaune et la Rouge. Cette passion put s’exprimer particulièrement en 1994, année du Bicentenaire de l’X.
Gérard Pilé avait succédé à Jean-Pierre Callot (31), auteur entre autres œuvres d’une célèbre Histoire de l’École polytechnique.
Un sens aigu de la prospective
Au cours de ses années à la tête de La Jaune et la Rouge, la revue avait abordé des thèmes industriels et économiques comme le verre, l’emballage, la qualité, l’ingénierie financière, mais aussi des sujets toujours à l’ordre du jour sur un plan plus général, comme la climatologie, l’environnement, l’eau, l’espace rural ou la Russie, ce qui témoigne de son sens aigu de la prospective.
Gérard Pilé était ami de personnages de tout premier plan comme Maurice Allais (31), Bernard Esambert (54) ou Maurice Lauré (36) et bien d’autres. Il leur avait ouvert les colonnes de la revue, pour des articles fort appréciés.
À l’écoute
Gérard Pilé était un homme charmant et affable, toujours à l’écoute de ses interlocuteurs et peu porté à imposer ses vues, sauf sur les points qu’il estimait, à juste titre, être fondamentaux.
Bien qu’il en parlât peu, c’était un chrétien, mais certainement à cause de sa fonction, qui l’amenait à côtoyer toutes les écoles de pensée et de spiritualité, il était très réservé en ce domaine.
Tant que sa santé le lui permit, il fut très assidu au Comité éditorial de La Jaune et la Rouge, où ses interventions étaient toujours pleines de bon sens et de pertinence.