Gestion des risques et adaptation aux enjeux météo-climatiques en Nouvelle-Calédonie
Exposée à des phénomènes météorologiques extrêmes comme les cyclones ou la sécheresse, la Nouvelle-Calédonie est « météo-sensible » : la performance de secteurs économiques calédoniens importants dépend des conditions climatiques (transports aériens et maritimes, mines, tourisme, agriculture…). La prévision météorologique et la connaissance du climat sont essentielles pour y préserver la sécurité des personnes et des biens ainsi que pour mettre en œuvre le développement durable.
La loi organique de 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie précise que la Nouvelle-Calédonie est compétente en matière de météorologie. Météo-France apporte son concours pour l’exercice de cette compétence grâce à la direction interrégionale de Nouvelle-Calédonie et de Wallis et Futuna (DIRNC), dont le rôle est précisé dans une convention avec le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie. La DIRNC bénéficie de moyens humains et financiers de Météo-France et de la Nouvelle-Calédonie et d’appuis techniques des directions centrales de Météo-France. Compte tenu de la forte météo-sensibilité de la Nouvelle-Calédonie, la DIRNC travaille en étroite interaction avec plusieurs entités calédoniennes comme les directions chargées de la sécurité civile, de l’aviation civile, de l’agriculture, de l’eau et de la santé.
REPÈRES
La Nouvelle-Calédonie est un territoire français d’outre-mer situé à 17 000 km de la France. Sa population est de près de 270 000 habitants, sa superficie de 18 577 km2. Au plan maritime, elle est entourée d’un lagon
de 24 000 km2 et est au centre d’une zone économique exclusive de plus de 1,4 million de kilomètres carrés. Le climat y est de type tropical chaud et humide avec des cyclones fréquents et dévastateurs.
Contribuer à la sécurité des biens et des personnes
La première des missions de la DIRNC, comme en métropole et dans tous les territoires ultramarins, consiste à contribuer à la sécurité des personnes et des biens, en lien étroit avec la sécurité civile. Cette mission est assurée par une veille permanente du temps, l’élaboration et la diffusion de prévisions ainsi que par l’étude et le suivi du climat. Elle se traduit entre autres par la mise en œuvre des dispositifs de vigilance météorologique et Prévifeu pour les feux de forêt ainsi que la participation au système d’alerte cyclonique.
La double insularité du territoire rend les problématiques aéronautiques très sensibles. L’assistance météorologique à l’aéronautique se traduit par diverses prestations telles que l’installation et la maintenance des systèmes d’observation et la fourniture d’observations et de prévisions météorologiques.
Minimiser l’impact des cyclones
Compte tenu, entre autres, des infrastructures de la Nouvelle-Calédonie (usines métallurgiques, hôtels, hôpitaux, routes…), les dégâts potentiels d’un cyclone pourraient être de plusieurs milliards de francs Pacifique (CFP, 1 euro vaut près de 120 francs Pacifique). Le cyclone Pam qui a dévasté le Vanuatu en 2015 est passé à quelques dizaines de kilomètres de la Nouvelle-Calédonie. Des cyclones de moindre intensité occasionnent aussi des dégâts significatifs : en 2019, les effets du cyclone Oma ont donné lieu à des indemnités pour les agriculteurs à hauteur de 323 millions de francs Pacifique.
La météorologie et la climatologie permettent de minimiser les impacts des cyclones sur la Nouvelle-Calédonie. Les prévisions de trajectoires éclairent les autorités qui peuvent décider des niveaux pertinents d’alerte pour garantir la sécurité en interdisant la circulation lors du passage du cyclone et minimiser la durée de l’arrêt des activités. Par ailleurs, grâce à la climatologie des cyclones des quarante dernières années, il a été possible de mieux cerner le risque cyclonique pour mettre à jour les normes de construction en Nouvelle-Calédonie en précisant la valeur de vent de référence pour les constructions.
Ainsi les citoyens, les entreprises et les administrations peuvent se préparer au mieux et prendre des mesures qui réduisent l’impact négatif des cyclones.
“Les dégâts potentiels d’un cyclone pourraient être
de plusieurs milliards de francs Pacifique”
Optimiser la gestion des mines
L’industrie du nickel, avec l’exploitation de nombreuses mines sur la Grande Terre et trois usines métallurgiques de transformation, est un des piliers essentiels de l’économie calédonienne – de 5 à 10 % suivant les années et le cours du minerai. Ces activités sont soumises à une concurrence internationale féroce et dépendent des conditions climatiques de plusieurs manières.
La productivité d’une mine dépend de la météorologie. Elle est altérée significativement par les intempéries, même non exceptionnelles. Lorsque la pluie est trop intense, il n’est pas possible de travailler dans les mines. Les prévisions servent ainsi à optimiser la gestion des mines.
L’usine métallurgique de Doniambo à Nouméa dépend également étroitement des conditions atmosphériques. Le lien entre le fonctionnement de l’installation et la météorologie est complexe, essentiellement lié à la consommation électrique : il implique à la fois le taux de remplissage du barrage hydroélectrique de Yaté, la situation météo (en particulier le vent) et les enjeux de pollution atmosphérique sur Nouméa. Par vent d’est, il est possible d’utiliser du fuel lourd, moins cher, dans la centrale électrique alimentant l’usine – le vent pousse les particules vers des zones non habitées. En l’absence de vent ou par vent d’ouest, il faut exploiter au maximum l’hydroélectricité du barrage et utiliser du fuel léger, plus cher, pour minimiser la pollution de l’air.
Aider l’agriculture
La Nouvelle-Calédonie souhaite améliorer le taux de couverture de ses besoins alimentaires. Cela passe par une agriculture performante, mais qui se révèle très sensible aux conditions météorologiques, avec une dépendance exacerbée lors des sécheresses ou des inondations. En dehors de ces événements extrêmes, une meilleure connaissance de la climatologie et des prévisions saisonnières, en lien avec les variations climatiques majeures que connaît l’océan Pacifique (notamment El Niño – oscillation australe), peut permettre des choix plus pertinents de culture. Les prévisions météo à quelques jours sont indispensables pour optimiser l’irrigation et les traitements phytosanitaires.
Trois leviers d’action pour demain
Ces quelques exemples illustrent combien l’économie calédonienne dépend de la météorologie et de la variabilité climatique. Comme pour tous les territoires et les collectivités, trois leviers d’action principaux permettent de réduire la météo-sensibilité et d’améliorer la compétitivité économique tout en préservant l’environnement et des conditions de vie durables aux populations : primo, améliorer les services météorologiques et climatiques ; secundo, mieux prendre en compte, en amont des choix économiques ou politiques, les caractéristiques climatiques locales ; enfin, éduquer, communiquer et informer sur les risques actuels et les évolutions climatiques que connaîtront les territoires du Pacifique Sud-Ouest.
Un atout déterminant
La DIRNC s’attache ainsi à augmenter les interactions entre les spécialistes de météo et climat, en lien avec les chercheurs de l’Institut de recherche pour le développement (IRD), et les décideurs, autorités et acteurs des secteurs météo-sensibles. C’est dans cet esprit que les Assises de la météorologie ont été organisées en 2016. Elles ont permis des progrès dans le secteur aérien et dans le domaine de l’eau, et accru la compréhension des enjeux des évolutions climatiques en cours. En Nouvelle-Calédonie aussi, les enjeux combinés de l’eau, l’énergie, l’alimentation, sans même évoquer de potentiels nouveaux risques, sont un défi collectif.
L’action et le rôle de la DIRNC constituent un atout déterminant pour le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie et plus particulièrement pour la conduite de politiques publiques adaptées. Le soutien et l’expertise de l’État, à travers son établissement public Météo-France, sont appréciés, et représentent pour le territoire un apport de très grande qualité.