Lancement du premier tunnelier du Grand Paris Express

Grand Paris Express : une maîtrise d’ouvrage XXL

Dossier : Les mégaprojetsMagazine N°745 Mai 2019
Par Thierry DALLARD

Avec ses 200 km de lignes de métro auto­ma­tique et ses 68 gares, le Grand Paris Express chan­ge­ra le visage de l’Île-de-France. À la tête du pro­jet urbain le plus impor­tant d’Europe : la Socié­té du Grand Paris, créée en 2010 pour se consa­crer à la réa­li­sa­tion du nou­veau métro. Dans les deux ans qui viennent, elle ver­ra ses effec­tifs tripler.

Déjà plus de 65 sites en phase de génie civil début 2019 sur les seules lignes 15 Sud et 16 : le Grand Paris Express, dont les tout pre­miers tra­vaux ont démar­ré en juin 2016, entame une nou­velle étape de son his­toire. Un chan­ge­ment d’échelle qui se tra­duit dans tous les aspects du projet.


REPÈRES

On dénom­brait, à la fin 2018, 4 800 per­sonnes sur les chan­tiers de construc­tion du nou­veau métro. Déjà 1 967 entre­prises inter­viennent sur les neuf lots de génie civil des lignes 15 Sud et 16. Par­mi elles, plus de 1 300 PME, essen­tiel­le­ment fran­ci­liennes. En effet, la Socié­té du Grand Paris impose aux grou­pe­ments d’entreprises qui répondent à ses appels d’offres qu’une part d’au moins 20 % des tra­vaux soit exé­cu­tée par des PME et que 5 % des heures tra­vaillées soient réser­vées à l’insertion. Résul­tat : le nombre d’heures d’insertion a déjà fran­chi le seuil des 480 000.


Place aux tunneliers

Cette dyna­mique des tra­vaux s’amplifie natu­rel­le­ment depuis que les tun­ne­liers sont à l’œuvre. Quatre sont déjà entrés en action sur la ligne 15 Sud. À la fin de l’année, une quin­zaine de ces engins spec­ta­cu­laires seront mobi­li­sés pour creu­ser le Grand Paris Express. Du jamais vu en France et en Europe !

Tan­dis que ces tra­vaux se déploient, le maté­riel rou­lant des lignes 15, 16 et 17, lui, est déjà choi­si. Six sites fran­çais d’Alstom conce­vront et fabri­que­ront ce nou­veau maté­riel. Le mar­ché porte sur 150 voi­tures, sur les quelque 300 rames ame­nées à cir­cu­ler sur le réseau.

Enfin, autre indi­ca­teur de cette entrée dans une nou­velle dimen­sion : cinq mil­lions de tonnes de terre seront extraits en 2019 des chan­tiers du Grand Paris Express, contre trois mil­lions en 2018 et un en 2017. Les pre­mières barges s’apprêtent à entrer en scène : le nou­veau métro n’oublie pas qu’il est l’un des pro­jets phares de l’après COP 21 en France et que sa dimen­sion éco­lo­gique doit s’affirmer dès la phase de travaux.

“Le plus grand débat public mené en Europe
a rassemblé plus de 15 000 personnes”

Plus de 2 millions de voyageurs par jour

Issu du plus grand débat public mené en Europe, qui a ras­sem­blé plus de 15 000 per­sonnes, le Grand Paris Express est deve­nu, par l’ampleur de ses chan­tiers, une réa­li­té dans le pay­sage fran­ci­lien. Une fois mises en ser­vice, les quatre nou­velles lignes (15, 16, 17, 18), connec­tées au réseau de trans­port exis­tant et aux­quelles s’ajoute le pro­lon­ge­ment de la ligne 14 au nord et au sud, relie­ront les pôles d’activité et d’habitat des petite et moyenne cou­ronnes ain­si que les trois aéro­ports pari­siens et deux gares TGV (Mas­sy et Rois­sy-Charles-de-Gaulle). Les rames trans­por­te­ront 2 à 2,5 mil­lions de voya­geurs par jour en moyenne. Elles cir­cu­le­ront à une vitesse com­mer­ciale éle­vée de 55 à 60 km/h selon les lignes et seront capables d’atteindre une vitesse de pointe de 110 km/h entre deux gares.

Grâce au Grand Paris Express, il sera donc plus simple de se rendre d’un point à l’autre de l’Île-de-France sans pas­ser par Paris, mais aus­si de rejoindre plus rapi­de­ment le cœur de la capi­tale depuis sa péri­phé­rie. En période de pointe, l’intervalle entre deux trains varie­ra selon les lignes entre 85 secondes et 3 minutes envi­ron. Par sa rapi­di­té et son tra­cé, le métro du Grand Paris rédui­ra ain­si signi­fi­ca­ti­ve­ment les temps de trans­port au sein de la région : par exemple, un étu­diant rési­dant à Cli­chy-Mont­fer­meil se ren­dra à l’université de Cré­teil en 20 minutes, contre 1 h 20 aujourd’hui ; des cher­cheurs en visite se ren­dront de l’aéroport d’Orly au cam­pus uni­ver­si­taire Paris-Saclay en 15 minutes, au lieu de 1 h 06…

Travaux du Grand Paris Express
Tra­vaux, Vil­le­juif Ins­ti­tut Gus­tave-Rous­sy © Socié­té du Grand Paris / David Delaporte

Au service de toutes les mobilités

Le nou­veau métro va aus­si des­si­ner les mobi­li­tés de demain : ain­si, les gares et les par­vis du Grand Paris Express offri­ront des ser­vices répon­dant aux besoins en per­pé­tuelle évo­lu­tion des voya­geurs. L’enjeu prin­ci­pal est d’optimiser les temps de par­cours des Fran­ci­liens et de faci­li­ter leur vie quo­ti­dienne par la mise à dis­po­si­tion, à l’intérieur et aux abords des gares, d’espaces dédiés aux com­merces et à des ser­vices de proxi­mi­té. Il s’agit dès à pré­sent d’imaginer les nou­velles cohé­rences entre tous les modes de dépla­ce­ment et de prendre en compte le déve­lop­pe­ment des mobi­li­tés élec­triques et numériques.

Bien plus qu’un réseau de trans­port, le Grand Paris Express est enfin le point d’appui du déve­lop­pe­ment urbain de la métro­pole. Ain­si, de grands pro­jets d’aménagement s’organisent autour de son réseau et de ses 68 gares. En témoigne l’ambitieux appel à pro­jets « Inven­tons la Métro­pole du Grand Paris », dont un tiers des sites rete­nus lors de la pre­mière édi­tion de ce concours se situent à proxi­mi­té d’une future gare.

Travaux du Grand Paris Express
Tra­vaux, Vil­le­juif Ins­ti­tut Gus­tave-Rous­sy © Socié­té du Grand Paris / David Delaporte

Une entreprise dédiée au nouveau métro

Le nou­veau métro fran­chit les étapes et joue déjà son rôle de trem­plin pour l’économie locale, régio­nale et natio­nale. Sans cesse confor­té par les gou­ver­ne­ments qui se sont suc­cé­dé, il béné­fi­cie, depuis février 2018, d’une nou­velle feuille de route qui garan­tit la réa­li­sa­tion des 200 kilo­mètres du réseau, essen­tiel­le­ment en sou­ter­rain, et des 68 gares. Le calen­drier des mises en ser­vice a été revu, pour tenir compte de l’organisation à Paris et en Île-de-France des Jeux olym­piques et para­lym­piques et des capa­ci­tés des entre­prises d’ingénierie et de construc­tion à répondre à la demande. L’investissement, lui, est appré­cié en 2017 à 35 mil­liards d’euros valeur 2012, y com­pris les pro­vi­sions pour risques et aléas. Fin 2019, quelque 20 mil­liards d’euros seront d’ores et déjà engagés.


Facteur de croissance

Dans l’ouvrage Le Grand Paris Express, les sept clés du suc­cès (édi­tions Eco­no­mi­ca, jan­vier 2019), Domi­nique Bureau (74), Jean-Claude Pra­ger (64) et Émile Qui­net (55) estiment que le nou­veau métro « pour­rait être à l’origine d’une crois­sance sup­plé­men­taire au mini­mum de 2 % à 3 % du PIB de la région capi­tale », ce qui repré­sente entre 0,5 et 1 point du PIB national.


Un acteur majeur de la finance verte

Pour mener à bien sa mis­sion mais aus­si contri­buer à d’autres pro­jets de trans­port dans la région (Eole, pro­lon­ge­ments des lignes 14 et 11…), la Socié­té du Grand Paris dis­pose d’un modèle de finan­ce­ment unique, ali­men­té par une taxe addi­tion­nelle d’équipement payée par les ménages et les entre­prises, ain­si qu’une frac­tion de la taxe sur les sur­faces de bureaux, locaux com­mer­ciaux, locaux de sto­ckage et sta­tion­ne­ment en Île-de-France, payée par les pro­prié­taires. Dans l’ensemble, ces recettes ont assu­ré dès 2011 une recette annuelle de 400 mil­lions d’euros, à laquelle il convien­dra d’ajouter le moment venu les rede­vances doma­niales payées par les exploi­tants du réseau, dont le mon­tant indi­ca­tif glo­bal a été fixé à 0,8 % de la valeur de l’investissement.

À ces res­sources finan­cières, les rem­bour­se­ments des néces­saires emprunts contrac­tés pen­dant la période de chan­tier sont assu­rés en moins de soixante ans, une logique com­pa­rable à celle rete­nue pour la construc­tion du métro pari­sien de 1900, dont les rem­bour­se­ments se sont éta­lés sur soixante-dix ans.

Des pre­miers contrats ont été conclus auprès de la Caisse des dépôts et de la Banque euro­péenne d’investissement (3 mil­liards d’euros début 2018). D’autres prennent la forme d’émissions moné­taires et obli­ga­taires, dans le cadre d’un pro­gramme 100 % vert. La Socié­té du Grand Paris a déjà émis deux obli­ga­tions vertes, pour un mon­tant de 3,8 mil­liards d’euros. Elle contri­bue ain­si à mettre au pre­mier plan les pro­blé­ma­tiques de chan­ge­ment cli­ma­tique par­mi les pré­oc­cu­pa­tions des mar­chés finan­ciers et à faire de Paris la place de réfé­rence de la finance verte.


Des ressources humaines en croissance

Pour que la Socié­té du Grand Paris puisse accom­pa­gner le pro­jet dans sa glo­ba­li­té et sous toutes ses facettes, le légis­la­teur a aug­men­té ses moyens dans la loi de finances 2019 afin de per­mettre le recru­te­ment de 200 nou­veaux col­la­bo­ra­teurs dès cette année. Son pla­fond d’emploi est ain­si pas­sé de 240 à 430 ETP. Une crois­sance qui devrait se pour­suivre en 2020 à un rythme com­pa­rable. Cette mon­tée en puis­sance épouse l’avancée des tra­vaux, elle passe par une nou­velle orga­ni­sa­tion de l’entreprise, elle per­met à la maî­trise d’ouvrage d’être en pleine res­pon­sa­bi­li­té pour conso­li­der l’ambition ini­tiale du pro­jet et pour fia­bi­li­ser les coûts et les plannings. 


Perspective de la gare Saint-Denis Pleyel dans le cadre du projet Grand Paris Express
Pers­pec­tive de la gare Saint-Denis Pleyel. © Socié­té du Grand Paris / David Delaporte

Un investissement rentable pour le XXIe siècle

Ain­si finan­cée, cette nou­velle infra­struc­ture de trans­port est la par­tie émer­gée d’un pro­jet éco­no­mique plus large. Si le Grand Paris Express a un impact majeur sur les dépla­ce­ments des Fran­ci­liens, il est clair que son tra­cé affecte éga­le­ment les choix de loca­li­sa­tion des acteurs éco­no­miques. En découle une modi­fi­ca­tion de la géo­gra­phie des acti­vi­tés ain­si que, au moins indi­rec­te­ment, de la pro­duc­ti­vi­té des entre­prises et des tra­vailleurs. L’impact sur l’emploi est donc consi­dé­rable, au-delà des emplois dits de chan­tier. Les recherches effec­tuées pour les appré­cier tendent à mon­trer que le chiffre d’emplois poten­tiel­le­ment induits par le pro­jet entre 2005 et 2030 se situe­ra entre 115 000 et 315 000 emplois, pro­ba­ble­ment entre 150 000 et 200 000 emplois.

Les avan­tages socio-éco­no­miques géné­rés par le Grand Paris Express sont éva­lués à près de 82 mil­liards d’euros, avec un PIB addi­tion­nel pour la France com­pris entre
10 et 20 mil­liards d’euros par an après sa mise en service.

Le nou­veau métro aura un impact très lar­ge­ment posi­tif sur les finances publiques, avec un rap­port coût-avan­tages de l’ordre de 1 sur 2. À l’heure des tra­vaux sou­ter­rains qui se déroulent dans le contexte géo­lo­gique du Bas­sin pari­sien, sans doute l’un des plus com­plexes au monde, il est sans doute utile d’avoir à l’esprit les béné­fices col­lec­tifs de ce pro­jet hors normes.


Pour en savoir plus …

> Site Inter­net de la Socié­té du Grand Paris

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