Hector Berlioz : Benvenuto Cellini
Ces représentations au Festival de Salzbourg en août 2007, très bien filmées et enregistrées, sont la meilleure porte d’entrée pour découvrir cet opéra de Berlioz, très caractéristique car presque autobiographique, Berlioz s’identifiant au sculpteur aventurier Benvenuto Cellini, orfèvre et sculpteur de la Renaissance italienne, à la cour de Clément VII et François Ier puis de Cosme à Florence. C’est Alfred de Vigny qui fit découvrir l’autobiographie célèbre de Cellini à Berlioz.
Alors qu’il a été un échec à sa création (1838), les berlioziens adorent cet opéra, même s’il est plus difficile d’accès que La Damnation de Faust ou Roméo et Juliette (qui ne sont pas vraiment des opéras), et même que Les Troyens ou Béatrice et Bénédict. Berlioz y reconnaissait « une variété d’idées, une vitalité et un éclat de couleur musicale que je ne re-trouverai jamais ». Il n’y a pas beaucoup d’airs, il est vrai, mais une musique très riche, très expressive, et des moments vocaux inoubliables comme l’air colorature de Teresa attendant son sculpteur chéri, ou l’air de Laurent Naouri que l’on cite plus loin.
Le jeune Berlioz crée une œuvre originale, iconoclaste, hétéroclite et démesurée, qui donc fut un échec en 1838. Liszt la défendit et la reprit en 1852. On reconnaît dans l’Ouverture de l’opéra Le Carnaval romain de Berlioz, courte œuvre plus connue du compositeur, qu’il ‑composa à partir de deux thèmes extraits du premier acte de Benvenuto Cellini.
En plus du Philharmonique de Vienne dans la fosse d’orchestre et du boulimique à l’époque Valery Gergiev à la baguette, nous avons aussi une très bonne distribution, dont le superbe baryton Laurent Naouri qui crève littéralement l’écran en l’artiste rival Fieramosca, en particulier dans son air de bravade Ah ! qui pourrait me résister ? Burkhard Fritz est un ténor héroïque dans le rôle de l’artiste capricieux de la Renaissance et la soprano lettone de 26 ans Maija Kovalevska dans le rôle de Teresa, la femme avec qui il essaie de s’enfuir, nous enchante avec sa belle voix et sa beauté physique incontestable. Gergiev entraîne la Philharmonie de Vienne dans un délire semblable à celui qui s’est peut-être emparé du compositeur. Musicalement, c’est le grand opéra français à son meilleur et spectaculairement mis en scène.
La mise en scène justement ne laissera pas indifférent. Un mélange de futurisme à la Metropolis ou Star Wars, de fantasy à la Batman, avec des robots, un hélicoptère, un véhicule volant pour le pape en rose déguisé en pop star (la basse russe Mikhail Petrenko, hilarant), le sculpteur en blue jean, un carnaval romain à la Brueghel. Et à la fin une éruption vésuvienne qui engloutit tout dans les flammes, la fumée et le fer en fusion.
Au total, de cette production conseillée mais très surprenante, la plus grande surprise vient probablement du caractère « idiomatique » de la direction de Gergiev, qui dirige avec un cure-dent et des gestes flottants cette partition française de vif-argent.
Orchestre Philharmonique de Vienne, Valery Gergiev
Un DVD ou Blu-ray Naxos