Henri ZIEGLER (26), 1906–1998
Né le 18 novembre 1906 à Limoges, Henri Ziegler fit ses études secondaires au collège Stanislas et fut reçu à l’École polytechnique dans la promotion 1926. Sorti dans le Corps de l’Aéronautique, il fut breveté pilote et ingénieur navigant d’essai (avions et hydravions).
Avant la guerre, il servit dans différentes fonctions au ministère de l’Air, et à l’état-major général de l’armée de l’air ; il fut notamment directeur adjoint du Centre d’essais en vol de Villacoublay.
© AÉROSPATIALE
Nommé en décembre 1939 chef adjoint aux USA de la Mission française d’achat de l’air, il eut la responsabilité de l’exécution d’un programme de fabrication et d’achat (plusieurs milliers d’avions, moteurs, équipements ; marchés de 40 milliards de francs – 1939). Il fit transférer à la Grande-Bretagne en juin 1940, à la veille de l’armistice, les commandes non livrées.
À son retour en France, en janvier 1941, des postes administratifs à Vichy et à Aix-en-Provence lui servirent de couverture à une importante activité de Résistance, tant en zone occupée qu’en zone Sud ; il organisa notamment l’intégration dans les FFI d’importants éléments de l’armée de l’air.
En août 1943, il accomplit une mission clandestine à Londres (par sous-marin à l’aller et par avion Lysander au retour).
Deuxième mission clandestine à Alger, en février 1944 ; faute d’autre moyen, Henri Ziegler passa les Pyrénées à pied, fut interné au camp de Miranda en Espagne, puis, libéré, il put rejoindre Alger par Madrid et Gibraltar.
Sous le nom de Colonel Vernon, il fut affecté au commandement des FFL en Grande-Bretagne et nommé chef d’état-major des FFI auprès du général Koenig. Il coordonna l’action des forces actives de la Résistance, avant, pendant et après le débarquement et organisa notamment les parachutages massifs de jour aux maquis du Centre en juillet 1944 : il participa personnellement à l’un de ces parachutages, dans le cadre de l’opération « Cadillac ».
Après la Libération, il resta attaché à l’état-major du général Koenig, gouverneur militaire de Paris, jusqu’en avril 1945.
La carrière civile d’Henri Ziegler fut exceptionnelle. Dès mai 1945, après une mission officielle aux USA et en Grande-Bretagne, il concluait à la nécessité d’une coopération européenne.
De 1946 à 1954, il fut successivement directeur général adjoint d’Air France, chargé des services techniques, puis (11 septembre 1948) directeur général. Il donna à la société nationale, sur tous les plans (technique, commercial, financier) une remarquable impulsion qui en fit la première entreprise européenne de transport aérien et la sixième au niveau mondial, alors qu’à la fin des hostilités elle était repartie de presque rien. Il démissionna en 1954, en désaccord avec la décision gouvernementale de transférer à UTA une partie importante du réseau.
Après avoir exercé de 1954 à 1956 des fonctions dans des cabinets ministériels (directeur chez MM. Chaban-Delmas et Corniglion-Molinier, ministres des Travaux publics, des Transports et du Tourisme, puis chargé des affaires nucléaires chez M. Chaban-Delmas, ministre d’État), Henri Ziegler entra aux Ateliers Bréguet comme administrateur directeur général où il resta jusqu’en 1967 et lança notamment deux programmes européens (Bréguet Atlantic et chasseur Jaguar).
Il présida la Société Air Alpes de 1967 à 1976.
PDG de Sud-Aviation en 1968, il présida la SNIAS née de la fusion de Sud-Aviation, Nord-Aviation et SEREB et donna une vive impulsion à l’organisation et aux activités des divisions hélicoptères, engins tactiques et systèmes balistiques et spatiaux. Dans le domaine avions : poursuite des essais et première présentation de Concorde, relance du programme Airbus (condamné en 1968), reprise du programme Corvette.
Il fonda et administra à partir de décembre 1970 et jusqu’en 1975 Airbus Industrie, pour assurer la maîtrise d’œuvre du programme Airbus relancé par les gouvernements français et allemand. Son nom restera attaché à celui de la fusée Ariane.
Henri Ziegler présida de 1971 à 1974 l’Union syndicale des industries aéronautiques et spatiales.
Ses exceptionnels mérites militaires et industriels valurent à Henri Ziegler de nombreuses distinctions (grand officier de la Légion d’honneur, croix de guerre 1939–1945 avec trois palmes, rosette de la Résistance, officier de la Legion of Merit, commandeur du British Empire, commandeur de l’Ordre de Victoria).
Marié en 1933 avec Gillette Rizzi, il eut quatre enfants : Bernard (54), Michel, Xavier et Isabelle.
Les très nombreux témoignages reçus par sa famille de ses collaborateurs et amis, après son décès, mettent l’accent sur ses compétences inappréciables, ses qualités d’organisateur, son caractère courageux et clairvoyant, qui n’excluait nullement la gentillesse et la courtoisie, et aussi sa profonde foi religieuse. Il faut aussi rappeler la véritable passion qu’il eut pour la montagne : c’est lui qui donna par la BBC à « Jeunesse et Montagne », trois jours avant le débarquement de Normandie, l’ordre de rejoindre le combat clandestin, qui amena plus de 3 000 J. M. au sein d’une dizaine de grands maquis.
La famille polytechnicienne peut s’enorgueillir d’avoir compté dans son sein un homme comme Henri Ziegler.
Je remercie la famille d’Henri Ziegler de m’avoir communiqué les documents qui m’ont permis d’établir cette notice.