Hortense Lhermitte (1983)
Comme toutes les banquières d’affaires, Hortense Lhermitte a toujours préféré l’ombre à la lumière. Douze ans après avoir intégré J. P. Morgan – c’était en 1986 ; elle était la première femme polytechnicienne à rejoindre les équipes de la banque américaine –, cette financière a créé sa propre boutique de conseil en stratégie et fusions-acquisitions qu’elle vient de rebaptiser La Compagnie financière du Héron. Un nom plutôt surprenant, choisi parce qu’elle apprécie l’élégance longiligne de cet échassier, « à la fois solitaire et indépendant, mais qui participe au développement du groupe ». Et aussi parce qu’elle aime bien, sans doute parce qu’elle lui ressemble, l’image du héron planant dans les airs, puis visant sa cible avant de fondre sur elle à la vitesse de l’éclair.
Bâtir à sa façon
Hortense Lhermitte a toujours eu besoin d’espace et d’horizons nouveaux. C’est ce qui la motivera lorsque, à sa sortie de Polytechnique, elle choisit de faire ses premières armes chez J. P. Morgan, qui lui ouvre les portes de l’international. À New York, elle s’initie aux marchés et aux métiers de la banque d’affaires et forge son premier réseau professionnel world wide. À Londres ensuite, où elle développe les opérations de fusions-acquisitions pour le compte des institutions financières. À ce poste, elle participe à toutes les grandes opérations de consolidation du secteur financier en Europe continentale. Et à Paris enfin, toujours chez J. P. Morgan, comme senior banker, où elle est considérée comme une des plus brillantes professionnelles du secteur. Elle y développe son expertise dans la santé et dans la finance, auprès des institutionnels français cette fois. Une carrière un peu trop sur les rails à son goût ? En 1998, elle décide de voler de ses propres ailes, et fonde sa propre structure.
Une obsession, chez elle, ce refus de l’enfermement, cette volonté de faire progresser les choses et d’apporter des solutions. Un moteur, cette curiosité qui la pousse toujours à vouloir ouvrir d’autres fenêtres dans sa vie. Depuis toujours, cette Parisienne dont le père était ingénieur a été une élève précoce et brillante. À l’X, Hortense apprécie autant la biologie que la peinture, ou l’économie d’entreprise. Durant son service militaire dans la marine, la première année où les femmes sont embarquées, elle est chef de quart sur un bâtiment hydrographique et y nourrit sa passion pour la mer. Elle retraversera l’Atlantique quelques années plus tard, à la voile cette fois.
Conseiller et aider
Quand, au terme de ses années d’études à l’X, sonne l’heure d’un choix professionnel, ce dernier se révèle d’autant plus difficile que, pour elle, cette décision correspond au renoncement aux autres possibles. Elle aurait pu devenir chercheur en biologie ou travailler sur une plate-forme pétrolière. Elle met finalement le cap sur la finance qui, pressent-elle à juste titre, se joue des frontières et va lui ouvrir un champ d’action mondial.
Comme nombre de ses pairs à Polytechnique, et sans doute parce que cette École contribue à ancrer des valeurs, Hortense Lhermitte éprouve toujours le besoin de trouver du sens à ce qu’elle fait. Elle aurait pu devenir une talentueuse golden girl sur les marchés, mais la spéculation n’est vraiment pas sa tasse de thé. En revanche, conseiller et aider les groupes à se construire, les multinationales à évoluer, les start-ups à grandir, lui permet de concilier son besoin d’être en contact permanent avec l’univers de l’entreprise et le sentiment de bâtir à sa façon. La même quête de sens pousse aussi cette mère de trois enfants à cultiver son jardin secret, le bénévolat, et se traduit par son engagement dans le monde associatif. Elle rejoint ainsi les conseils d’administration de la fondation ARC et de l’AX, où elle apporte l’approche pragmatique du héron, elle qui aime toujours « mettre spontanément le monde en équation ».