Hype : accélérateur et catalyseur de la mobilité hydrogène en France
Avec sa flotte de taxis et son réseau de stations, Hype a été et reste à l’avant-garde du déploiement de la mobilité à hydrogène en France. Véritable catalyseur de cette mobilité zéro émission, l’entreprise poursuit son développement rapide et contribue activement au passage à l’échelle de la filière. Le point avec Mathieu Gardies, fondateur et président de Hype.
Hype a été lancé durant la COP 21. Pouvez-vous nous rappeler la genèse de ce projet ?
Le projet Hype est une plateforme de mobilité hydrogène lancée à Paris en 2015, qui intègre la production et la distribution d’hydrogène vert, ainsi que le développement des usages, avec le taxi pour premier marché. À l’origine, en 2009, j’avais créé la Société du Taxi Électrique Parisien, après avoir travaillé dans le conseil et la finance. Mon objectif était alors d’identifier une solution rapidement et massivement déployable, pour que les flottes incontournables comme les taxis urbains puissent circuler sans être un vecteur de pollution atmosphérique et sonore. La solution zéro émission qui avait alors été retenue était la motorisation électrique à batterie, seule disponible. Entre 2009 et 2014, nous avons développé ce projet avec un cadre technologique qui s’articulait autour du véhicule électrique à batterie et de la recharge rapide, sans pour autant parvenir à le lancer véritablement en raison d’un certain nombre de limitations notamment techniques. En 2014, des constructeurs asiatiques ont mis sur le marché les premiers véhicules électriques à hydrogène. Le projet a alors pivoté et nous avons lancé Hype à Paris, en 2015, à l’occasion de la COP 21, avec cinq premiers taxis électriques à hydrogène et une première station située Place de l’Alma.
Aujourd’hui, avec plus de 200 véhicules en circulation en Île-de-France, Hype opère depuis 7 ans la plus grande flotte de taxis à hydrogène au monde et connaît une forte croissance. La flotte atteindra 700 taxis à Paris début 2023 et l’objectif d’ici les Jeux Olympiques de Paris 2024, est de déployer au sein de son écosystème un réseau de 26 stations Hype ouvertes à tous (dont au moins 20 stations de grande capacité, chacune produisant localement ~1 tonne/jour d’hydrogène vert) qui pourront permettre d’alimenter 10 000 taxis zéro émission à l’échappement. En parallèle, d’ici fin 2024, nous travaillons sur le déploiement de la plateforme Hype dans une quinzaine de nouvelles régions, en France et à l’international, prioritairement la Belgique, l’Italie, le Portugal, l’Espagne, le Royaume-Uni, le Canada et les États-Unis.
Au cœur de votre modèle de mobilité, on retrouve donc l’hydrogène…
En effet, car la solution hydrogène permet de lever plusieurs freins à l’usage. Pour un chauffeur de taxi, un véhicule électrique à hydrogène s’utilise de la même manière qu’un véhicule thermique. Concrètement, avec ces véhicules nous capitalisons sur les avantages de l’électrique sans les inconvénients propres à la batterie, à savoir les limitations en termes d’autonomie et surtout de temps d’immobilisation du véhicule pour le recharger. Avec le véhicule électrique à hydrogène, nous avons un véhicule électrique qui n’a pas besoin d’être immobilisé pour être rechargé. Il offre une autonomie de 500 à 700 km et se recharge en 3 à 5 minutes. L’enjeu est de donner aux chauffeurs de taxis la possibilité de choisir la solution la plus adaptée à leur usage, tout en démontrant que le passage au zéro émission à l’échappement n’implique pas de nouvelles contraintes opérationnelles.
Comment contribuez-vous au développement de la mobilité hydrogène ?
Hype est un pure player pionnier de la mobilité hydrogène, qui se caractérise par sa vitesse d’exécution, son agilité et son modèle ‘’scalable’’. Nous nous sommes lancés dans cette aventure à une époque où on ne parlait presque pas de mobilité hydrogène en France. En développant dès le départ l’offre et la demande avec le taxi pour premier marché, nous avons créé les conditions pour rapidement passer à l’échelle sur ce premier usage pertinent, tout en investissant simultanément dans le déploiement rapide d’un réseau de stations. Ainsi, nous créons les conditions nécessaires pour que l’écosystème de mobilité hydrogène puisse se développer rapidement, tant au niveau des infrastructures de production et de distribution, que de l’intégration progressive de nouveaux usages pertinents de mobilités.
Dans un contexte où la décarbonation des usages s’accélère, quels sont les principaux enjeux que vous avez identifiés ?
Pour réussir la décarbonation des mobilités et la transition énergétique, nous avons besoin de l’hydrogène en complément de l’écosystème batterie. La batterie va avoir un rendement énergétique plus intéressant mais sur certains usages, l’écosystème batterie répond insuffisamment aux besoins de l’utilisateur et dans ce cas le recours à l’hydrogène va être pertinent. En outre, les deux solutions ne posent pas les mêmes défis lorsque l’on passe à l’échelle. La particularité de la mobilité hydrogène est qu’elle offre une forte capacité d’accélération, plus les volumes augmentent, plus cette solution est compétitive et facile à déployer. Avec les véhicules électriques à batterie c’est le contraire, plus les volumes augmentent, plus cela devient difficile sur le plan de l’infrastructure de recharge et notamment de la recharge rapide, ou sur la disponibilité des composants nécessaires pour les batteries. C’est pour cette raison qu’il faut accélérer le passage à l’échelle et le déploiement synchronisé des réseaux de stations à hydrogène et de bornes de charge. La structuration de la filière hydrogène en France et en Europe doit permettre de rattraper le retard industriel sur l’écosystème batterie et d’amorcer une dynamique de développement simultané des deux solutions pour se positionner comme des leaders mondiaux sur les solutions hydrogène.
Dans ce contexte, il y a un fort enjeu de formation pour disposer des talents qui permettront le déploiement rapide de ces solutions technologiques sur le terrain. Nous avons lancé la Hype Academy et commencé à travailler notamment avec les écoles d’ingénieurs, pour que les formations soient les plus à jour et alignées possibles avec les besoins de la filière.
Quelles sont les autres spécificités de votre modèle ?
Hype joue un rôle de catalyseur et accélérateur pour la filière. Dans une logique de co-développement, Hype noue des partenariats industriels avec des acteurs de premier plan sur chacune des briques technologiques de l’écosystème. Hype a ainsi noué des partenariats avec HRS et McPhy, deux leaders de la filière hydrogène française spécialisés dans la production d’électrolyseurs et de stations hydrogène. Nous développons aussi de nouveaux usages, notamment la logistique du dernier kilomètre. Hype accompagne ainsi un certain nombre de donneurs d’ordres (privés et publics) dans la transition de leurs flottes captives vers le zéro émission à l’échappement, via notamment le projet Last Mile, qui vise à déployer plusieurs centaines de véhicules utilitaires hydrogène en Île-de-France d’ici 2024. Par ailleurs, en partenariat avec Ecolotrans, Hype développe une offre de mobilité hydrogène complète à destination des professionnels de la logistique, intégrant véhicules, distribution et maintenance. Hype travaille également avec les constructeurs et équipementiers français pour accélérer la production de véhicules « hydrides » 100 % électrique, comprenant une batterie rechargeable de taille raisonnable et un dispositif pile à combustible (hydrogène). Cette solution optimale sur les plans fonctionnel et énergétique permet de naviguer sur les deux réseaux.
In fine, au-delà des objectifs principaux de dépollution et de décarbonation, l’enjeu est aussi de réduire notre dépendance aux hydrocarbures, accroître notre indépendance énergétique et contribuer à faire émerger rapidement une offre industrielle française de mobilité zéro émission intégrée et exhaustive, qui soit fortement créatrice d’emplois qualifiés, source de développements technologiques et de perspectives pour de nouvelles exportations.