Ici-bas
Pierre Guerci (2009)
Rédacteur : Robin Touillon (2012)Editeur : Éditions Gallimard, janvier 2021Le pire compliment qu’on puisse faire au premier roman de Pierre Guerci serait d’applaudir le « témoignage », nécessairement « touchant », d’un fils voyant lentement mourir son père d’une maladie neurodégénérative. La mode est à de telles effusions sentimentales et narcissiques, mais Pierre Guerci n’est pas à la mode, il appartient à la littérature. Son style déjà l’annonce, riche en vocabulaire et en images, quoique sans emphase, au ton à la fois grave et tendre.
Le contenu du roman le confirme, qui raconte une histoire singulière pour questionner plus largement notre rapport à la vieillesse et à la mort : que faire des personnes âgées et impotentes, qui semblent des déchets aux yeux de notre société obsédée par le rendement ? Comment vivre la perte d’un proche, à l’heure où toutes les recettes du développement personnel nous enjoignent d’aller de l’avant ?
Le narrateur ne sait pas bien comment s’y prendre, mais il sait qu’il doit accompagner son père. Alors il lui parle, le rappelle à sa jeunesse, l’emmène chez le coiffeur ou essuie ses défécations. Il s’efforce d’être là, tout simplement, à ses côtés, maladroitement, inutilement, mais par amour, parce que la mort n’est pas, ne peut pas être et ne doit pas être simplement l’extinction d’une machine biologique, parce qu’elle doit demeurer la disparition tragique et déchirante d’une personne irremplaçable.
Au-delà donc du témoignage, Pierre Guerci nous raconte le drame, présent et intemporel, de la mort et de l’amour filial.