Inflation : une notion à faire découvrir aux jeunes générations
La génération de polytechniciens à laquelle j’appartiens a connu, dans ses jeunes années, une France avec des niveaux d’inflation très élevés. On se souvient de trois années consécutives avec une inflation à deux chiffres, avec un point culminant à 12 % pour l’année 1981. En conséquence, quand nous étions élèves, l’inflation était au centre de l’enseignement de macroéconomie, dispensé par un groupe d’enseignants jeunes et dynamiques du non moins jeune et dynamique département d’économie.
Je me souviens de débats enflammés sur les mérites d’une inflation modérée qui peut être bénéfique pour l’économie, car elle peut stimuler la croissance économique, alors qu’une inflation excessive peut causer des problèmes économiques tels que la perte de pouvoir d’achat des consommateurs, l’augmentation des coûts pour les entreprises, la diminution de la compétitivité internationale, la dévaluation de la monnaie et j’en oublie. J’ai un souvenir ému (un oral houleux) de la courbe de Phillips, réfutée depuis, qui tentait d’expliquer une relation inverse entre taux d’inflation et taux de chômage.
“L’inflation est aujourd’hui la préoccupation principale de tous les gouvernements occidentaux.”
À partir de 1983, la politique de désinflation, la baisse du prix du pétrole dans la deuxième moitié de la décennie 1980 et la marche vers l’Union monétaire européenne ont ramené les taux d’inflation de la zone euro à des niveaux beaucoup plus modérés, à tel point que le sujet est devenu un thème exotique qui ne concerne que des pays lointains et en crise. Je revois, il y a peu de temps encore, en 2019, avant la pandémie il est vrai, une jeune stagiaire issue d’une grande école de commerce demander au jeune analyste de mon équipe de private equity s’il était utile d’intégrer l’inflation au modèle de valorisation sur lequel elle travaillait.
En peu de temps, alors que beaucoup de prévisionnistes gardaient la tête dans le sable, l’augmentation de la demande, notamment après la levée des restrictions liées à la pandémie de Covid-19, combinée à des pénuries d’approvisionnement et de main‑d’œuvre dans certains secteurs, la hausse des prix des matières premières tels que les produits pétroliers et les métaux, liée à la guerre en Ukraine, enfin les politiques économiques des gouvernements et des banques centrales, qui ont injecté des liquidités importantes dans l’économie, sont venues faire découvrir l’inflation aux jeunes générations. C’est aujourd’hui la préoccupation principale de tous les gouvernements occidentaux, tout en continuant d’être le cauchemar de pays comme le Liban ou le Brésil.
Sans rapport avec le sujet de l’inflation, je profite de ce numéro de La Jaune et la Rouge pour signaler l’appel à candidatures pour le conseil de l’AX et vous invite à vous référer aux publications correspondantes.