Jacques Maire (56) une vie dédiée à l’intérêt général
Décédé le 28 novembre 2020, Jacques Maire a profondément marqué tous ceux qui l’ont connu lors des dix-huit années qu’il a passées à Gaz de France comme directeur général adjoint, puis comme directeur général.
Sorti dans le corps des Mines, Jacques Maire a occupé diverses fonctions au sein du ministère de l’Industrie puis dans les cabinets ministériels. En particulier, il est directeur du cabinet d’Hubert Germain (1972−1974), puis directeur des industries chimiques (1974−1980). Il rejoint alors Gaz de France, comme directeur général adjoint, avant d’être promu directeur général en 1996.
Pour lui, l’intérêt général primait, fût-ce à son détriment. Ce sens de l’intérêt général lui venait aussi de sa reconnaissance envers un système qui lui avait permis de gravir tous les échelons jusqu’aux plus hautes marches de l’administration française. Ce qu’il avait reçu, son expérience, il a toujours considéré de son devoir de les mettre à la disposition des autres et nous l’écoutions tous avec une grande attention.
Modestie, lucidité et bienveillance
Fier de son parcours certes mais pourtant d’une modestie rare qu’il ne cherchait pas à cacher sous l’exercice de l’autorité, et sa lucidité lui interdisait de s’illusionner ni sur lui ni sur les autres ; conscient de la vanité de la vie, il ne recherchait pas les honneurs ; il savait ses limites et la relativité des choses ; il n’imposait rien qui ne fût consenti ; ses idées, ses objections, il les exprimait toujours avec calme, concision et pondération : il fallait savoir les entendre, elles étaient le plus souvent réfléchies, judicieuses et profondes.
Ce qui nous frappait enfin tous le plus, c’était son intelligence et son affectueuse bienveillance. Une intelligence en phase avec sa modestie. Aucune emphase mais une expression ramassée, claire, simple et intelligible de tous ; des analyses limpides appliquées aux objets les plus complexes mais toujours ancrées sur le concret, sur le réel. Pas de concepts abstraits mais une très grande capacité à synthétiser les problèmes dans toutes leurs dimensions techniques, sociales, politiques et humaines. Cette intelligence douce et profonde, nourrie de son expérience et de l’observation du vécu, était partagée avec les autres à qui il prodiguait ses conseils éclairés. Il était conscient du service qu’il nous rendait ainsi, mais cela lui convenait car cela était conforme à l’idée qu’il se faisait de son rôle.
Cette intelligence rationnelle s’exerçait avec la même acuité dans le champ des relations humaines. Sa perspicacité dans ces domaines également, nous la recherchions et il n’est pas de choix de futurs dirigeants que nous aurions faits, à cette époque, sans recueillir préalablement son avis.
Humanité et équanimité
Cet homme, enfin, était d’une humanité confondante. D’un tempérament toujours égal, jamais vindicatif ni coléreux, d’une correction parfaite, Jacques Maire se tenait avec simplicité à la disposition de chacun et à la hauteur de ses interlocuteurs. Désireux, autant qu’il est possible, d’écarter les conflits, il écoutait, prodiguait ses conseils, mais laissait son interlocuteur en tirer par lui-même les conclusions. Sa fidélité à notre entreprise d’alors et à son personnel n’a jamais été prise en défaut et, longtemps après les avoir quittés, il continuait de s’enquérir du sort des uns et des autres. Depuis quelques années, il couchait sur le papier des articles dans lesquels il distillait, dans son style simple et lumineux empreint de bon sens et d’une douce ironie, de courtes analyses dans lesquelles on pouvait déceler ses regrets devant les reculs de l’esprit de raison et des progrès, et même la domination des émotions médiatiques, des préjugés et des dogmes. Nous sommes dorénavant orphelins de sa sagesse, de sa bienveillance et de sa gentillesse qui déjà nous font défaut.