Jamais l’une sans l’autre

Dossier : L’entreprise dans la sociétéMagazine N°690 Décembre 2013
Par Gilbert RIBES (56)

REPÈRES

REPÈRES
L’entreprise est le moteur prin­ci­pal de la vie éco­no­mique. Elle fait appel à deux fac­teurs indis­pen­sables : le tra­vail et le capi­tal. Mais la créa­tion d’emplois et les pro­fits ne sont pas des fina­li­tés, mais des néces­si­tés : la créa­tion (ou le main­tien) d’emplois pour exer­cer son acti­vi­té ; les béné­fices pour rému­né­rer les capi­taux inves­tis et les risques pris par les action­naires (asso­ciés ou socié­taires), inves­tir et assu­rer sa pérennité.

Sortir de la crise

La situa­tion actuelle illustre le rôle pri­mor­dial des entre­prises. Seules des entre­prises, inno­va­trices et expor­ta­trices, com­pé­ti­tives face à leurs concur­rents étran­gers, per­met­tront à la France de rele­ver trois défis majeurs : créer au moins deux mil­lions d’emplois pérennes pour résor­ber le chô­mage de masse ; aug­men­ter ses expor­ta­tions ou réduire ses impor­ta­tions d’au moins 70 mil­liards d’euros par an pour impor­ter, sans s’endetter ou vendre son patri­moine, les appro­vi­sion­ne­ments indis­pen­sables (éner­gie et matières pre­mières) ; rééqui­li­brer, du même coup, ses comptes publics et sociaux.

Stratégie et culture économiques de la société

Un diri­geant déterminé
Face aux concur­rents, le chef d’entreprise doit com­po­ser avec les règles impo­sées par les pou­voirs publics, conci­lier de nom­breux inté­rêts (clients, sala­riés, action­naires, four­nis­seurs, col­lec­ti­vi­tés publiques, etc.), faire face à de nom­breuses incer­ti­tudes, pro­fi­ter des oppor­tu­ni­tés, mini­mi­ser les consé­quences des situa­tions défa­vo­rables. Pour réus­sir, il doit faire preuve d’imagination et de détermination.

Pro­duc­tion et consom­ma­tion sont deux aspects com­plé­men­taires de la vie éco­no­mique. Dans cer­tains pays, un large consen­sus social donne la prio­ri­té à la pro­duc­tion, consi­dé­rant que c’est l’offre qui fait la demande, et non l’inverse.

C’est le cas en Alle­magne ou aux États-Unis. C’est l’inverse en France. Cette dif­fé­rence de culture éco­no­mique explique, en par­tie, les bonnes per­for­mances des entre­prises allemandes.

Elle se tra­duit notam­ment par des charges fis­cales et sociales sur les entre­prises plus éle­vées en France qu’en Alle­magne (4% à 6% du PIB selon les sources, soit 80 à 120 mil­liards d’euros par an) et par un finan­ce­ment de la pro­tec­tion sociale plus équi­li­bré en Alle­magne (34% par les entre­prises, 28,9 % par les sala­riés) qu’en France (43,6 % par les entre­prises, 21,0% par les salariés).

Associer travail et capital

La qua­li­té des rela­tions entre les repré­sen­tants du tra­vail et du capi­tal, impor­tante pour la réus­site à long terme de l’entreprise, dépend de leur consen­sus sur la gou­ver­nance et la stra­té­gie de l’entreprise ; les rému­né­ra­tions du tra­vail et du capi­tal et le finan­ce­ment de l’entreprise.

L’entreprise est le moteur prin­ci­pal de la vie économique

Dans la socié­té de capi­taux, l’enjeu est d’associer les sala­riés par la pré­sence de leurs repré­sen­tants aux comi­tés d’entreprise et d’établissement et au conseil de sur­veillance ou d’administration pour les grandes entre­prises. Asso­cia­tion plus ou moins étroite, selon la culture sociale et la légis­la­tion de chaque pays, la culture sociale et les pra­tiques de chaque entreprise.

La coges­tion pra­ti­quée dans les entre­prises alle­mandes expli­que­rait, en par­tie, leurs bonnes per­for­mances. Dans la socié­té de per­sonnes, les enjeux prin­ci­paux sont la qua­li­té de la gou­ver­nance, le finan­ce­ment des acti­vi­tés et l’attractivité pour les personnes.

Le « pan­ca­pi­ta­lisme » pro­po­sé par Mar­cel Loi­chot avait l’ambition de rap­pro­cher les deux sta­tuts. Il a ins­pi­ré, en France, les lois sur la par­ti­ci­pa­tion et sur l’intéressement des salariés.

Assurer la survie

Assu­rer la sur­vie de son entre­prise est le pre­mier devoir du chef d’entreprise. Res­pon­sable de la qua­li­té des rela­tions avec les sala­riés et les action­naires (asso­ciés ou socié­taires) à tra­vers leurs repré­sen­tants, sa posi­tion sin­gu­lière à la tête de l’entreprise lui fait jouer un rôle essen­tiel pour har­mo­ni­ser les inté­rêts à court et long terme ; des action­naires, asso­ciés ou socié­taires ; des sala­riés ; de l’entreprise, per­sonne morale.

Il est le garant des per­for­mances de l’entreprise, mais le client en est le véri­table maître, car son appré­cia­tion condi­tionne entiè­re­ment la sur­vie de l’entreprise dont l’objectif est de lui démon­trer en per­ma­nence que la qua­li­té et le prix de ses pro­duits et ser­vices sont mieux adap­tés à ses besoins que ceux de ses concurrents.

Savoir s’adapter

Annon­cer les décisions
L’entreprise peut être conduite à prendre des déci­sions dont les consé­quences sociales peuvent être dou­lou­reuses pour les sala­riés, les par­te­naires de l’entreprise et les col­lec­ti­vi­tés publiques. Elle a le devoir d’annoncer et de jus­ti­fier ces déci­sions le plus tôt pos­sible et d’en réduire l’impact, mais elle ne peut pas être tenue entiè­re­ment pour res­pon­sable de leurs consé­quences, une part essen­tielle de la res­pon­sa­bi­li­té résul­tant des insuf­fi­sances des régu­la­tions inter­na­tio­nales. On peut citer comme exemples la délo­ca­li­sa­tion d’activités et l’optimisation fiscale.

Tout peut évo­luer très vite : règles impo­sées par les pou­voirs publics, besoins et goûts des clients, concur­rents, moyens tech­niques, appro­vi­sion­ne­ments ou sous-trai­tants dis­po­nibles, exi­gences du per­son­nel, dis­po­ni­bi­li­té des capi­taux. Pour sur­vivre, l’entreprise doit s’adapter rapi­de­ment, c’est-à-dire remettre en cause en per­ma­nence ses pro­duits, ses ser­vices et ses pro­ces­sus. D’où l’importance de l’innovation, de la recherche et du déve­lop­pe­ment, et le besoin de dis­po­ser de la plus grande marge de liber­té possible.

Le pre­mier sou­ci de l’entrepreneur est d’engager le per­son­nel le plus com­pé­tent pos­sible, d’assurer sa for­ma­tion et de se l’attacher par des condi­tions de tra­vail, une rému­né­ra­tion et des pers­pec­tives de car­rière attrac­tives. C’est son inves­tis­se­ment le plus pré­cieux et la prin­ci­pale garan­tie de com­pé­ti­ti­vi­té et de sur­vie de l’entreprise.

Faire face à la mondialisation

Dans chaque pays où elle opère, l’entreprise doit res­pec­ter des règles, impo­sées par les pou­voirs publics (droit com­mer­cial, droit de pro­prié­té, droit de pro­prié­té intel­lec­tuelle, droit fis­cal, droit du tra­vail, règles de pro­tec­tion sociale, contraintes envi­ron­ne­men­tales et sani­taires, etc.). À ces règles natio­nales s’ajoutent des règles internationales.

Un per­son­nel com­pé­tent est la prin­ci­pale garan­tie de com­pé­ti­ti­vi­té et de survie

L’ouverture totale des fron­tières au libre-échange, com­bi­née avec la rapi­di­té et la dimi­nu­tion des coûts de com­mu­ni­ca­tion et de trans­port, élar­git la concur­rence aux entre­prises du monde entier.

Pour ne pas dis­pa­raître ou s’affaiblir par rap­port à des concur­rents exploi­tant toutes les pos­si­bi­li­tés ouvertes par la mon­dia­li­sa­tion, l’entreprise est ame­née à répar­tir ses opé­ra­tions entre les dif­fé­rents pays en fonc­tion des coûts (sociaux, fis­caux, envi­ron­ne­men­taux) qui résultent de l’application des règles propres à chaque pays.

Susciter des vocations et former des entrepreneurs

Pour créer et gérer des entre­prises, il faut d’abord des entre­pre­neurs, moti­vés et com­pé­tents, or per­sonne ne peut obli­ger qui­conque à être entre­pre­neur ou à le res­ter. Pour sus­ci­ter le plus de voca­tions pos­sible, il faut intro­duire des modules obli­ga­toires d’initiation, de for­ma­tion et de pré­pa­ra­tion à la créa­tion ou à la reprise et à la ges­tion d’entreprise dans tous les pro­grammes et à tous les niveaux d’enseignements (pro­fes­sion­nel et supé­rieur), en coopé­ra­tion très étroite avec les entreprises.

Ce sera éga­le­ment un moyen de récon­ci­lier les Fran­çais avec leurs entreprises.

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