Jean DUPUIS (39), mémoire d’une promo tourmentée
Jean Dupuis a fait partie, avec Max Hermieu, de la petite équipe qui a fondé le Salon des industries et des commerces de bureau (Sicob) en 1949. Il en a présidé le Comité de surveillance pendant de nombreuses années.
Il a également été l’un des fondateurs et président de l’Association européenne des fabricants de matériel informatique, Eurobit.
Le caissier de la 39
Jean Dupuis était, avec Georges Gonon, caissier de la 39. Pendant plus de 70 ans, il a oeuvré pour son unité. Dans l’introduction à son livret À la mémoire des camarades de la promotion 39 de l’École polytechnique morts pour la France1, il expose les divisions successives de cette promo.
Morts pour la France
« Première cassure, l’entrée à l’École le 8 septembre 1939. Ceux qui avaient plus de 20 ans furent envoyés dans les écoles d’application militaires (promotion A), les moins de 20 ans restant rue Descartes pour suivre leur première année d’études.
« Les camarades de la promotion A sont progressivement affectés dans les unités militaires et participeront aux combats de mai-juin 1940. Nous déplorerons alors nos premiers “morts pour la France”. »
Promo A ET Promo B
« La promotion A et la promotion B se retrouveront à Lyon en novembre 1940, amputées non seulement de leurs camarades disparus mais encore de ceux qui ont été faits prisonniers ou blessés notamment Xavier Camille-Rapp et Claude Jacquelin. Deuxième cassure.
« De nouvelles épreuves attendaient la promo. Les premières apparurent au travers des nouvelles fractures dues aux lois raciales qui classaient “bis” nos camarades d’origine juive et d’autre part de nos “Petits Chapeaux” qui, après une année d’études à Lyon, nous quittèrent pour reprendre du service dans l’armée. »
285 à l’entrée, 202 à la sortie
« Nous étions 285 à l’entrée et 202 à passer les examens de sortie. Les événements qui se produisirent jusqu’en 1948 et au-delà allaient nous causer de nouvelles mutilations dues aux engagements des uns et des autres dans les combats pour la libération de la France, que ce soit aux armées, dans la clandestinité ou dans la Résistance ainsi que dans les guerres d’Indochine et d’Algérie.
« Le 31 juillet 1964 disparaît notre Géné K Georges d’Argenlieu, des suites de sa douloureuse déportation. »
Cohésion et camaraderie
Lors du 40e anniversaire du Sicob, Jean Dupuis affirmait : « Moderniser notre pays, former des femmes et des hommes prêts à s’adapter aux mutations technologiques en cours et à venir, mobiliser les intelligences et les compétences des Françaises et des Français pour être les meilleurs dans l’Europe du XXIe siècle, voilà les objectifs qui sont aujourd’hui à l’ordre du jour. »
« Par un paradoxe heureux, cette promotion écartelée avant même d’avoir été réunie, dispersée dans la grande tourmente de la guerre, mutilée par la mort de 25 des siens tombés en service aux quatre coins du monde, sous l’uniforme ou dans la clandestinité, a trouvé malgré tout une cohésion et un esprit de camaraderie remarquables. »
Pendant des années, Jean Dupuis a organisé trois fois par an, rue de Poitiers, des déjeuners de promo avec épouses, très appréciés. Sa sollicitude pour les veuves des camarades disparus était frappante ainsi que ses délicates attentions et sa parfaite courtoisie.
Il n’oubliait jamais de donner les dernières nouvelles de l’École, son évolution, son avenir et celles de la promo dont il était la mémoire2.
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1. Jean Dupuis (dir.), À la mémoire des camarades de la promotion 1939 de l’École polytechnique morts pour la France, préface de Paul Gardent, mai 1993.
2. À l’occasion du 60e anniversaire de la promo célébré à Palaiseau en 1999, Jean Dupuis a remis à l’École les « Archives de la promo 39 », sept dossiers couvrant les années 1939 à 1945.