Johannes BRAHMS : intégrale de la musique de chambre
L’ensemble de la musique de chambre de Brahms, en un seul disque Blu-ray ! Voici réunis très efficacement plus de quinze heures de musique magnifique, par des artistes le plus souvent de référence, filmées pour la télévision allemande dans les années quatre-vingt-dix.
La musique de chambre est une part très importante de l’œuvre de Brahms. Ce musicien romantique est une des personnalités musicales les plus fortes du XIXe siècle, son œuvre a deux caractéristiques originales.
La première est que son style n’a presque pas évolué durant sa longue carrière. Déjà très affirmé dès ses premières œuvres, son style n’a pas été influencé par les évolutions importantes de la musique de la seconde partie du XIXe, le wagnérisme (comme Bruckner et Mahler), ou l’impressionnisme (Debussy…).
La seconde caractéristique est qu’il a composé un nombre limité d’œuvres de chaque type. Alors que parmi ses quasi-contemporains, Mendelssohn, Bruckner, Mahler ont composé un nombre important de symphonies, alors que Schumann, Liszt, Chopin ont composé de nombreux cycles pour piano, Wagner et Verdi de nombreux opéras, Brahms, lui, s’est chaque fois contenté de toujours trois ou moins (à part quatre symphonies), comme s’il n’était jamais convaincu de la forme qui lui convenait le mieux.
Ces deux caractéristiques se retrouvent dans sa musique de chambre, un style très homogène, à travers trois sonates pour piano et violon, deux sonates pour piano et clarinette, deux sonates pour piano et violoncelle, trois trios pour piano et cordes, deux trios pour piano et vent, trois quatuors à cordes, trois quatuors avec piano, deux quintettes à cordes, un quintette avec clarinette et un autre avec piano, deux sextuors.
Aucune faiblesse, uniquement des chefs‑d’œuvre ! Ce n’est pas faire injure à Mozart ou à Beethoven que de reconnaître qu’il n’y a pas dans leur musique de chambre la même constance d’inspiration qu’il y a chez Brahms.
On a parlé déjà ici en 2010 de l’excellente interprétation des trios avec piano emmenée par Elena Bashkirova (Madame Barenboim à la ville) et un Maxim Vengerov étonnant de concentration. On disait que ces films nous permettaient de retrouver comme au concert la complicité des trois musiciens, la fusion de leur timbre, la concentration et l’émotion des artistes.
Mais comment ne pas mettre au même firmament le duo Barenboim- Perlman dans les sonates pour violon, enregistrées en public à Chicago. Et les clarinettes chantantes et envoûtantes (et magnifiquement enregistrées) de Wenzel Fuchs dans les sonates et trio et de Karl Leister dans le quintette, qui se sont succédé comme clarinette solo de l’Orchestre philharmonique de Berlin.
Nous devons mentionner également les deux Sextuors, interprétés par le Sextuor de Vienne emmené par le grand chambriste qu’est Erich Höbarth. Les œuvres de musique de chambre faisant intervenir plus de cinq musiciens sont rares.
Les chefs‑d’œuvre dans cette catégorie sont naturellement le Septuor de Beethoven, les Octuors de Schubert et Mendelssohn, et ces deux Sextuors de Brahms.
Naturellement suivre les six voix en parallèle (deux violons, deux altos, deux violoncelles) est un défi au disque. Au concert en revanche, et en image grâce à ce Blu-ray, c’est désormais possible.
On pénètre alors dans la complexité et la richesse de cette musique, on ressent l’impact de cet ensemble de solistes qui se mettent au service du collectif, et l’on comprend parfaitement ce que « musique de chambre » signifie.
Vous l’avez compris, aucun temps mort, aucune baisse d’inspiration, ni du compositeur, ni des interprètes le long de ces quinze heures de musique de chambre.
Un disque auquel je reviens régulièrement.