Accélérer et dérisquer la mise sur le marché de nouvelles thérapies grâce aux modèles cellulaires issus de patients
Avec ses modèles cellulaires humains reflétant des maladies in vitro, Ksilink s’attaque aux principaux défis en matière de développement de nouveaux médicaments : réduire le risque d’échec en phase clinique et accélérer la mise sur le marché de nouvelles thérapies efficaces. Antoine de Lacombe, directeur général de la biotech Ksilink, nous en dit plus.
Ksilink développe des modèles cellulaires issus de patients au service du drug discovery. Dites-nous en plus sur votre positionnement.
Pour identifier de nouvelles molécules thérapeutiques, les laboratoires s’appuient encore sur des essais in vitro et sur des modèles animaux peu représentatifs de la réalité humaine. Il en résulte de nombreux et coûteux échecs en phase clinique où ces molécules finissent par révéler leur manque d’efficacité.
Ksilink a pour ambition de révolutionner l’approche traditionnelle du drug discovery grâce aux modèles cellulaires humains développés à partir de cellules de patients.
Chercheurs, cliniciens, et industriels se sont unis en 2015 pour créer Ksilink en plaçant le patient au centre de ses programmes de recherche. Ce partenariat public-privé, largement soutenu par le Programme d’Investissement d’Avenir, par Sanofi, et par l’Inserm, peut être une grande fierté pour la France qui a ainsi propulsé une biotech en tête du développement d’outils translationnels pour la médecine de précision.
Votre approche innovante ouvre de nouvelles perspectives en matière de développement de médicaments. Comment ?
Ksilink offre la rupture d’avec le monde d’avant où trop de molécules ont été développées et financées pour finalement échouer en phase clinique. Selon une étude, 48% des projets échouent en phase 2 par manque d’efficacité, et encore 55% en phase 3 – toujours par manque d’efficacité. A ce stade, ce sont plusieurs centaines de millions d’euros qui ont déjà été investis… L’industrie pharma est loin du ‘fail fast, fail cheap’ !
Les modèles cellulaires issus de patients développés par Ksilink apportent une preuve de concept sur l’homme bien plus en amont dans la chaîne de valeur. Ksilink automatise et fonctionnalise ses modèles de maladies humains de façon à identifier les molécules qui corrigent effectivement le phénotype des cellules malades vers un phénotype sain.
“Les modèles cellulaires issus de patients développés par Ksilink apportent une preuve de concept sur l’homme bien plus en amont dans la chaîne de valeur.”
Notre technologie répond donc à l’une des problématiques clés de l’industrie pharmaceutique : réduire le taux d’échec en phase clinique et les pertes financières associées.
Notre approche contribue par ailleurs à relancer la recherche dans des aires thérapeutiques considérées comme risquées et qui ont été délaissées suite à des échecs coûteux comme c’est le cas pour les maladies du muscle cardiaque ou du système nerveux central. Au-delà, il s’agit aussi de redonner confiance aux industriels et aux investisseurs afin de relancer des programmes et des essais cliniques.
Pour les maladies cardiaques ou neurologiques, il n’est pas possible de faire de prélèvements de cellules humaines. Comment relevez-vous ce défi sur le plan technologique ?
Il n’est en effet pas possible de prélever des cellules vivantes du cœur ou du cerveau. Pour élaborer nos modèles cardiaques, par exemple, nous assemblons des technologies de pointe dans le domaine de l’ingénierie cellulaire. La reprogrammation cellulaire permet de fabriquer des cellules souches pluripotentes à partir d’un prélèvement de sang ou de peau du patient, pour les différencier ensuite en cellules cardiaques. En parallèle, les « ciseaux génétiques » CRISPR-Cas9 permettent d’obtenir des cellules malades et saines d’un même patient, après correction génétique. Enfin, le criblage phénotypique à haut débit génère une quantité d’images que l’intelligence artificielle exploite pour accroître la qualité de nos modèles et pour filtrer les meilleures molécules, candidats pour de nouveaux médicaments. L’IA analyse des milliers de paramètres cellulaires pour distinguer parfaitement entre un phénotype de cellule malade ou saine.
Si notre approche implique un investissement supérieur dans les phases amont, ce surcoût reste une goutte d’eau face aux investissements postérieurs ! L’utilisation de nos modèles dérisque la recherche.
Vous avez, par ailleurs, de nombreux programmes en cours de développement…
Nous menons des projets de développement de petites molécules mais aussi de biothérapies, un des principaux piliers du programme France2030, et très synergique des approches phénotypiques.
Ksilink entend trouver des molécules pour des maladies actuellement sans traitement.
“Ksilink entend trouver des molécules pour des maladies actuellement sans traitement. Quatre projets ont été priorisés, avec pour chacun un plan de développement jusqu’en clinique.”
Quatre projets ont été priorisés, avec pour chacun un plan de développement jusqu’en clinique :
- La cardiomyopathie dilatée est une maladie cardiaque dramatique avec un espoir de survie limité à 5 ans.
- La dystrophie myotonique de type 1 est une autre maladie neuromusculaire rare et à l’issue fatale.
- Le syndrome Phelan-McDermid, forme rare de l’autisme, offre une porte d’entrée pour ouvrir largement sur l’ensemble des maladies liées aux dysfonctionnements des synapses.
- Enfin, la maladie de Charcot, que le grand public connaît au travers de témoignages personnels assez médiatisés, est un projet démarré en 2023, qui bénéficie de l’expérience acquise par notre équipe, et qui progresse rapidement.
Nos équipes sont en effet désormais bien aguerries à la conduite de ces projets complexes, où il faut assembler des technologies, coordonner de multiples partenaires… Enfin, nous développons une plateforme de profilage de cellules de la microglie, pour renforcer notre compréhension pour ces cellules dans des maladies du système nerveux central.
Quelles sont les prochaines étapes pour Ksilink dont la technologie est aujourd’hui reconnue des acteurs du marché de la pharmaceutique ?
Je pense que notre technologie va s’imposer jusqu’à devenir incontournable pour initier des essais cliniques. Est-il encore raisonnable d’engager de tels investissements dans la clinique sans avoir préalablement testé l’efficacité des candidats médicaments dans des modèles humains prédictifs ?
Pour Ksilink, l’enjeu est de valoriser son pipeline pour mener les molécules que nous avons identifiées jusqu’en phase clinique, pour ensuite les licencier à des industriels et démarrer de nouveaux programmes, ou pour créer des sociétés dédiées – comme nous l’avons déjà fait pour la cardiomyopathie – et d’avancer, pourquoi pas, jusqu’à la mise sur le marché du traitement.