La BEI, une banque d’ingénieurs au service des priorités de l’UE
En relation avec notre dossier relatif à la haute fonction publique, voici un exemple montrant le rôle que les ingénieurs peuvent jouer dans un domaine où on ne les attendrait pas nécessairement : celui de la banque européenne d’investissement (BEI), au service des politiques de développement au niveau européen, qui a besoin de hautes compétences pour financer la transition énergétique ainsi que l’innovation dans des secteurs industrielles stratégiques.
Du financement d’éoliennes flottantes au large du Portugal, au prêt à l’entreprise familiale Florimond Desprez dans les Hauts-de-France pour ses recherches de semences résistantes au changement climatique, en passant par le soutien à la grande centrale d’énergie solaire de Ouarzazate au Maroc, les projets financés par la Banque européenne d’investissement (BEI) se caractérisent par leur diversité. Toutes ces opérations récentes ont néanmoins un point commun : l’importance jouée dans chacun de ces dossiers par les équipes d’ingénieurs de la BEI. En tant qu’institution de financement de l’Union européenne, la BEI soutient des projets favorisant les priorités et les objectifs de l’Union. À l’objectif historique de développement et de cohésion économiques au sein de l’UE se sont progressivement ajoutées d’autres priorités, comme la lutte contre le changement climatique, l’amélioration de la santé, le renforcement de l’autonomie stratégique de l’Europe ou encore le soutien au développement des pays émergents, particulièrement sur le continent africain. Pour répondre à ces multiples défis, la BEI s’appuie sur des équipes hautement qualifiées, où les ingénieurs ont une place absolument centrale, au côté d’économistes, de financiers… La volonté de la BEI de renforcer son action en faveur du climat et de l’innovation tend à accroître encore la place des ingénieurs en son sein.
La BEI allie à la dimension commerciale une approche technique
La BEI s’appuie sur un vaste réseau d’ingénieurs, essentiellement au siège de la banque à Luxembourg, mais aussi dans ses multiples bureaux extérieurs, pour identifier les projets à financer, mener la phase d’instruction et superviser leur mise en œuvre. Cette dimension commerciale alliée à une approche technique la distingue des autres institutions de financement et lui vaut d’être souvent considérée comme une banque d’ingénieurs. Les ingénieurs de la BEI doivent faire preuve de polyvalence, pour tenir compte de la variété non seulement des acteurs soutenus par la BEI (collectivités publiques, grandes entreprises, PME, start-up, etc.) mais aussi du degré de technicité des projets. Ils se doivent d’avoir une compréhension globale d’un projet, qui ne se résume pas à ses aspects techniques : la dimension institutionnelle, l’éligibilité du projet vis-à-vis des politiques de prêts de la BEI, le montage financier ou les implications sociales et environnementales sont autant de paramètres à prendre en considération, qui dessinent le portrait d’un ingénieur au profil plutôt généraliste et multidisciplinaire.
Repères
Le groupe BEI, composé de la BEI (banque européenne d’investissement) et du FEI (fonds européen d’investissement), sa filiale dédiée au financement des PME, a signé en 2021 un montant de 95 milliards d’euros de financement, dont 13,9 milliards en France, un record. Ce volume d’activité résulte des prêts, garanties et investissements en fonds propres que la BEI et le FEI accordent en direct ou par le biais d’intermédiaires bancaires, tels que Bpifrance et la Caisse des dépôts et consignations. L’avantage comparatif de la BEI, par rapport à une banque commerciale, tient notamment à sa capacité à accorder des volumes de prêts importants, sur des maturités longues et à des tarifs avantageux (sa notation AAA lui permettant d’emprunter aux meilleures conditions de marché). La Banque se distingue aussi par la variété de ses offres de financement, conçues pour s’ajuster précisément aux besoins de ses clients.
L’expertise technique de ses ingénieurs, une plus-value de la BEI
Au-delà des avantages qu’elle fournit sur le plan financier, l’expertise de ses ingénieurs permet à la BEI d’apporter une plus-value sur le plan technique. Cela se manifeste par une assistance et des conseils tout au long de la préparation et de la mise en œuvre des projets. Les recommandations proposées sont nourries par la connaissance qu’ont les ingénieurs de la BEI de projets comparables financés au sein de l’Union européenne ou en dehors. La structuration des équipes par grands secteurs d’activité (énergie, environnement, transport, innovation, etc.), et non par pays, leur permet en effet d’acquérir une vision globale des tendances et bonnes pratiques de leur domaine de spécialité.
L’exigence et la rigueur démontrées par les ingénieurs de la BEI lors de la phase d’instruction poussent les porteurs de projets, quelle que soit leur taille ou leur nature (publique ou privée), à éprouver la robustesse de leurs choix technologiques. Les équipes de Florimond Desprez, leader européen dans le domaine des semences, l’ont clairement exprimé lors de la signature du prêt dont l’entreprise a bénéficié en 2022 pour financer ses activités de R & D : l’analyse réalisée par les ingénieurs de la BEI leur est apparue comme une mise à l’épreuve particulièrement stimulante, qui a influé positivement sur la conception de leur projet. Dès lors, le fait de se conformer à ces critères exigeants et d’obtenir un financement BEI s’apparente à un label de qualité, qui renforce la crédibilité du projet et génère un fort effet d’entraînement auprès des investisseurs privés.
Le soutien à l’innovation de la BEI
Au-delà de sa capacité à apporter des financements volumineux, notamment pour les grands projets d’infrastructure, la BEI tend aujourd’hui à soutenir des projets de plus faible envergure, plus innovants mais aussi plus risqués. En 2021, l’innovation a représenté près d’un quart des financements du groupe BEI en France. Cela concerne de grandes entreprises, l’équipementier automobile Valeo ayant par exemple bénéficié d’un prêt pour ses dépenses de R & D dans la sécurité des véhicules, mais aussi des start-up, à l’instar de l’entreprise toulousaine Alteia qui a développé, grâce aux financements de la BEI, une solution fondée sur l’intelligence artificielle pour exploiter les images captées par drone et satellite. L’expertise des services de la Banque est alors essentielle non seulement pour évaluer le degré de maturité d’un projet spécifique, mais aussi pour identifier les secteurs les plus innovants et les plus prometteurs dans lesquels la BEI gagnerait à intensifier ses investissements.
1 000 milliards d’euros de financements en faveur du climat sur 10 ans
En outre, pour parvenir à s’affirmer comme la banque européenne du climat, la BEI doit pouvoir s’appuyer sur une solide expertise dans le domaine de l’énergie, des transports ou du développement urbain. En cohérence avec les Accords de Paris, la BEI s’est engagée à contribuer à la mobilisation de 1 000 milliards d’euros de financements en faveur du climat et de l’environnement sur la décennie cruciale 2021–2030, et à porter la part de ses financements verts à au moins 50 % d’ici 2025. En 2021, ce pourcentage s’est élevé à 43 % pour le groupe BEI, mais il est supérieur dans certains pays, comme en France où plus des deux tiers du volume de prêts ont été consacrés au financement des énergies renouvelables, au verdissement de l’industrie, à l’amélioration de l’efficacité énergétique des bâtiments, au développement des mobilités durables ou encore à la réduction des déchets plastiques.
Le besoin en ingénieurs qualifiés sur les thématiques environnementales
Davantage encore que le volume de nos financements verts, nous sommes attentifs à leur caractère innovant. En témoigne l’appui financier dont ont par exemple bénéficié la start-up Carbios pour sa solution de recyclage à 100 % des déchets plastiques ou le groupe Avril pour ses recherches en matière de protéines végétales. L’exemple de la transition énergétique illustre aussi parfaitement le rôle clef que l’innovation est susceptible de jouer dans la réponse au défi climatique. La BEI finance d’ores et déjà des projets dans le secteur de l’hydrogène vert ou de l’éolien, notamment pour favoriser l’essor des éoliennes flottantes. Mais d’autres sources d’énergie, comme le solaire, sont en pleine mutation et il sera essentiel de disposer d’ingénieurs hautement qualifiés pour appréhender, par exemple, le fonctionnement des cellules à hétérojonction ou en pérovskites et évaluer la pertinence d’en financer le développement.
L’expertise technique et scientifique est en outre nécessaire pour accompagner les contreparties de la BEI dans leurs efforts de verdissement. Les acteurs publics, à l’instar des collectivités locales, peuvent bénéficier d’un accompagnement de la BEI via différents outils. Le mécanisme européen d’assistance technique pour les projets énergétiques locaux en est un, dont a bénéficié récemment la communauté d’agglomération du Pays basque. L’initiative d’assistance à l’investissement urbain en est un autre, grâce auquel la BEI accompagne, depuis janvier 2021 et en partenariat avec la Banque des territoires, 25 villes françaises dans la mise en œuvre de leurs projets d’adaptation au changement climatique. Les acteurs privés sont aussi concernés, depuis que la BEI s’est engagée, lors de la COP 26 à Glasgow, à apporter une assistance technique à ceux de ses emprunteurs qui ont amorcé leur transition écologique, afin de les aider à se mettre en conformité avec les Accords de Paris.
La nécessité d’une expertise en medtech et en technologies de pointe
La BEI a fait de la santé un objectif à part entière. En France, par exemple, le montant des investissements en faveur des medtech, ces technologies innovantes appliquées au monde médical, a fortement augmenté sur l’année 2021. La BEI a notamment financé plusieurs spécialistes de la robotique chirurgicale comme Robocath (robotique vasculaire) ou Carmat (cœur artificiel), autant de projets qui impliquent une maîtrise approfondie du secteur et appellent un recrutement de spécialistes confirmés. De même, la BEI est amenée, pour contribuer à l’autonomie stratégique de l’UE, à investir de plus en plus dans des secteurs technologiques de pointe, comme les semi-conducteurs ou les batteries. Dans ce secteur, l’expertise de nos ingénieurs sera fondamentale pour évaluer l’opportunité de soutenir le développement de tel projet de batteries lithium-ion à électrolyte solide ou tel autre fondé sur la technologie sodium-ion, pour ne citer que quelques-unes des technologies actuellement en cours de développement.
L’expertise technique de la BEI hors de l’Union européenne, en particulier en Afrique.
Alors que les financements hors UE représentent environ 10 % de l’activité du groupe BEI, l’objectif est d’accroître l’impact de notre action en appui des Objectifs de développement durable. La création, début 2022, de la branche BEI Monde et la mise en place de pôles régionaux dans certains de nos bureaux hors de l’UE, en commençant par Nairobi au Kenya, sont les premiers jalons de cette stratégie. L’offre de la BEI dans les pays en développement est une offre globale, qui conjugue apport de financements et assistance technique. Ce type d’accompagnement fait particulièrement sens pour le déploiement d’infrastructures et, de plus en plus, pour la lutte contre le changement climatique. Avec le programme City Climate Finance Gap Fund, qu’elle a créé en 2020, la BEI aide par exemple les villes des pays en développement, en Afrique, en Asie et en Amérique latine, à planifier et mettre en œuvre leurs projets d’aménagement urbain résilients (mobilité durable, gestion de l’eau, valorisation des déchets, réseaux d’énergie, etc.). Ces perspectives d’évolution appellent un renforcement constant des capacités d’analyse technique de la BEI, qui en font un pôle d’attractivité naturel pour tout ingénieur disposant d’une expertise ou d’une expérience dans les secteurs prioritaires de l’UE.