La biotechnologie environnementale, une voie vers le développement durable
L’environnement est le milieu naturel dans lequel les êtres vivants évoluent. La gestion de l’environnement utilise depuis longtemps des procédés de biotechnologie au sens large du terme. Ainsi, en tant que programme de recherche et d’innovation, la vision du secteur émergent de la biotechnologie environnementale peut être considérée comme l’extension de celle de la biotechnologie.
Repères
Les principaux secteurs d’activité concernés par la biotechnologie environnementale sont actuellement la décontamination des sites pollués, le traitement et le recyclage des déchets et des odeurs, le traitement de l’eau, la surveillance des agents pathogènes dans l’environnement et les énergies renouvelables.
Domestiquer les micro-organismes
Les progrès spectaculaires issus des laboratoires de biotechnologie, notamment dans le domaine des techniques de l’ADN, ont révolutionné notre compréhension globale de la biosphère. Les chercheurs ont ainsi découvert une quantité et une diversité jusque-là insoupçonnées de micro-organismes, qui pour la plupart ne sont pas cultivables en laboratoire avec les techniques traditionnelles. Ils ont mis en évidence que les micro-organismes procaryotes (sans noyau), invisibles à l’oeil nu mais ubiquitaires dans l’environnement, jouent un rôle fondamental dans notre monde actuel et les cycles biogéochimiques globaux. Ainsi les objectifs prioritaires de la biotechnologie environnementale sont l’étude de l’écologie microbienne et la gestion des ressources microbiennes.
Une gestion durable des déchets
Les techniques de bioremédiation peuvent être utilisées dans diverses applications incluant la dépollution des sols, le traitement des eaux usées, des gaz polluants et des déchets solides. Les mauvaises odeurs peuvent également être traitées à l’aide de systèmes biologiques.
Les produits ainsi épurés sont rejetés dans l’air, les égouts ou sont enfouis.
Éventuellement, ils peuvent être réutilisés, par exemple le biogaz ou les composts issus des déchets municipaux.
Cela permet d’assurer un allégement maximum des décharges et d’aboutir à une gestion des déchets durable sur le plan social, économique et environnemental.
Durant les dernières décennies, l’industrialisation et l’urbanisation croissantes ont engendré une pollution et des changements environnementaux sans précédent. L’étude de la capacité de l’environnement à s’adapter à de tels changements tout en maintenant l’équilibre de la biosphère actuelle est devenue une priorité de recherche dans de nombreux pays. Il semble aujourd’hui nécessaire et urgent de développer une économie verte et durable, et pour cela de nettoyer la pollution actuelle ainsi que d’optimiser les bilans en eau et en énergie de l’activité humaine et augmenter l’exploitation de ressources renouvelables.
Une stratégie primordiale consiste en la culture et la maintenance de communautés microbiennes auto-organisées et auto-entretenues, offrant ainsi une gamme de solutions durables, continues et économiques. De la même manière que notre système digestif dépend de la flore microbienne intestine pour assimiler les aliments consommés, l’utilisation de micro-organismes qui peuvent prédigérer les composés polluants en sous-produits non toxiques ou réutilisables ou qui peuvent contribuer à la production de composés chimiques complexes semble nécessaire pour le développement durable de l’industrie.
Ainsi le défi posé à la biotechnologie environnementale est à l’interface entre génie industriel et microbiologie. Les systèmes industriels sont agencés de manière à utiliser efficacement l’énergie interne des bactéries, perçues comme des micro-usines chimiques biodégradables.
Les innovations dans ce domaine ont créé des avancées majeures dans les secteurs tels que l’agroalimentaire, l’industrie de l’eau et des déchets (bioremédiation), l’industrie chimique (bioraffinerie), les énergies renouvelables et la biosécurité.
Nettoyer à l’échelle moléculaire
Un des problèmes fondamentaux de la protection de l’environnement est la gestion des déchets. L’activité intensive de la société humaine génère une quantité énorme de déchets, tant industriels que domestiques, qui menacent de dépasser rapidement la capacité de régénération naturelle et de s’accumuler au détriment des ressources naturelles.
Une résistance aux agressions
Le biofilm englobe les cellules qui le contiennent, ainsi qu’une matrice de substances polymériques qu’elles ont sécrétées et qui les maintient attachées sur la surface et entre elles. Les bactéries dans les biofilms acquièrent souvent une physiologie spécifique et deviennent bien plus résistantes aux agressions extérieures telles que les biocides et les antibiotiques. Les biofilms favorisent également la libération et la dissémination de souches variantes lors de la phase dite de dispersion.
La bioremédiation consiste à utiliser des procédés biologiques pour réduire le niveau de pollution de systèmes présents dans l’air, l’eau ou le sol, en neutralisant les déchets toxiques ou en décontaminant les milieux pollués. Certains micro-organismes sont capables d’assurer leur croissance ou leur besoin en énergie en dégradant de petites quantités de composés chimiques que nous considérons comme polluants, par exemple les hydrocarbures chlorés. Souvent, il faut d’abord identifier et isoler la ou les espèces spécifiques capables de cataboliser les polluants concernés.
Il est nécessaire et urgent de développer une économie verte et durable
Ensuite, les conditions nécessaires au maintien de la communauté microbienne et de son activité métabolique doivent être aménagées, par exemple en ajustant le niveau d’air et la présence d’autres composés qui participent au métabolisme, tels que les navettes à électrons. L’optimisation de la culture enrichie est cruciale pour obtenir un rendement efficace et concurrentiel.
Quand la biodégradation est complète, les produits finals comprennent du dioxyde de carbone, de l’eau et des sels minéraux inoffensifs. En outre, la bioremédiation peut être combinée avec des processus chimiques, d’incinération ou encore l’utilisation d’enzymes purifiées. Les enzymes sont des catalyseurs biologiques, très efficaces, biodégradables et qui présentent de nombreux avantages sur les catalyseurs non biologiques comme une meilleure spécificité et activité dans des conditions plus douces de température et pH.
Contrôler les micro-organismes
Afin de gérer l’espace environnemental, il est nécessaire de contrôler les communautés microbiennes. Dans la nature, les bactéries vivent en majorité dans des colonies de surface appelées biofilm. Les biofilms poussent partout, sur virtuellement toute surface en contact avec un liquide, que ce soit l’océan, ou les fluides dans le corps humain. Ils peuvent être la cause de maladie ou bien d’interférence avec les processus industriels par exemple en bloquant les pores des membranes de filtration ou en salissant le matériel immergé.
Le moteur de la résilience écologique
L’utilisation des technologies » omiques » (génomique, protéomique, etc.) appliquées aux communautés microbiennes garantit la découverte de nouveaux gènes (et donc de protéines spécialisées) ou bioprocédés aux propriétés exploitables. Ainsi, l’exploration de la biodiversité à l’échelle microbienne assure d’étendre très rapidement la gamme de produits couverts par la bioraffinerie. Ce constat souligne l’importance vitale de surveiller et conserver la biodiversité qui est l’une des plus grandes richesses de la planète et le moteur de la résilience écologique.
Les traitements antimicrobiens classiques ne sont pas applicables car ils nécessitent une dose trop importante qui peut être toxique, risquent une issue fatale, ou exigent des dépenses énergétiques inacceptables. De plus, la législation restreint l’utilisation d’agents antimicrobiens dangereux pour l’environnement tel le tributylétain (TBT), un antifouling puissant appliqué sur les coques des bateaux, qui a été totalement banni en 2008.
Les stratégies visant à l’amélioration et au renouveau des moyens de contrôle des biofilms ciblent les régulateurs moléculaires des étapes clés du développement des biofilms, comme l’adhésion de surface, la communication cellule – cellule par échange de signaux chimiques, ou les systèmes d’entretien du biofilm. D’autre part, les bactéries possèdent des senseurs sous forme de protéines ou complexes métaux actifs, qui en réponse à certains stimuli dans leur environnement immédiat, par exemple le monoxyde d’azote (NO), peuvent induire la dispersion des cellules.
Des outils performants de détection rapide et de surveillance en continu
De tels systèmes sont également la cible pour la mise au point de méthodes efficaces, peu coûteuses et respectueuses de l’environnement pour le contrôle des biofilms.
Induire la dispersion naturelle du biofilm permet d’exploiter l’énergie interne des cellules qui, en réponse au bon signal, quittent d’elles-mêmes les surfaces. Le résultat est une économie globale d’énergie et un impact réduit de l’activité de contrôle microbien sur l’environnement. Outre la capacité d’éliminer les biofilms nuisibles, les méthodes de contrôle du développement des biofilms peuvent également servir pour l’entretien de biofilms bénéfiques comme dans les procédés de bioraffinerie.
Surveiller l’émergence de pathogènes
Un des problèmes fondamentaux de la protection de l’environnement est la gestion des déchets.
L’existence de microbes infectieux peut être considérée comme le résultat d’une symbiose manquée entre organismes vivants, et est un danger constant pour l’humanité. L’éclosion de pathogènes est une préoccupation principale de la santé publique. Que ce soit en hygiène agroalimentaire, dans les réseaux de distribution d’eau ou encore dans les rivières et les piscines, la surveillance est primordiale. Dans ce domaine, la biotechnologie environnementale permet d’apporter aux sources critiques des outils performants de détection rapide et de surveillance en continu.
Grâce aux progrès de la biologie moléculaire, il existe maintenant des tests, par exemple basés sur la PCR (réaction en chaîne par polymérase), capables de donner des diagnostics en quelques heures. Cela représente un progrès immense par rapport aux méthodes précédentes, basées sur la culture des souches, qui nécessitaient jusqu’à plusieurs jours d’attente. De telles améliorations permettent d’identifier la source, le mode de transmission et les facteurs de risque et l’évolutivité potentielle du problème et ainsi mettre en œuvre les procédures d’alerte et engager une action préventive argumentée de la diffusion des souches pathogènes.
Développer des procédés durables
Le développement durable, en plus de nécessiter la dépollution de l’environnement, requiert un renouveau de la gestion du capital naturel. En permettant de réduire la consommation en eau, énergie et autres ressources naturelles tout en maintenant la compétitivité, la biotechnologie environnementale a un très fort potentiel pour contribuer à la viabilité écologique de l’industrie.
Tout d’abord, les nouvelles méthodes de contrôle microbien qui sont plus efficaces et plus spécifiques permettent, en améliorant les méthodes de nettoyage et désinfection, de générer de fortes économies d’eau ou d’énergie dans de nombreux domaines. Ensuite, l’utilisation et le contrôle des communautés microbiennes peuvent valoriser le recyclage de la matière première, le traitement de l’eau et la désalinisation. De plus, la biotechnologie aide également à la production de produits de chimie fine, respectueux de l’environnement, par exemple en utilisant la biomasse (bioraffinerie) ou des enzymes spécialisées qui nécessitent moins de produits chimiques nocifs. Enfin, de nouvelles ressources d’énergie durable sont également envisagées, par exemple en utilisant des piles à bactéries (MFC, microbial fuel cell) qui produisent de l’électricité à partir de sucre.
Une discipline phare pour le siècle
En l’attente d’une législation
La réussite de la biotechnologie environnementale dépend également de la mise en place d’une législation favorisant les avancées scientifiques et les développements technologiques qui visent à minimiser l’impact de la société humaine sur l’environnement.
La biotechnologie environnementale semble donc connaître un renouveau profond basé sur les progrès apportés par le secteur florissant de la biotechnologie et qui jusqu’alors avaient été essentiellement appliqués à la médecine. En étudiant les mécanismes moléculaires du vivant, la biotechnologie permet de développer et optimiser des bioprocédés et technologies propres qui pourront être appliqués à une large gamme de secteurs industriels. Actuellement la principale source de profits vient des secteurs traditionnels où la biotechnologie sert à améliorer les processus comme ceux de la bioraffinerie et du traitement de l’eau.
Des piles à bactéries produisent de l’électricité à partir de sucre
Malgré un fort engouement de la part des industries et du public, il manque pour l’instant aux efforts de recherche scientifique le développement de solutions techniques commercialisables. Afin d’étoffer la gamme technologique existante, il faudrait maintenant créer des entreprises indépendantes dotées du matériel de laboratoire adéquat et capables d’optimiser le potentiel d’innovation.
Enfin, la biotechnologie environnementale est une science fortement multidisciplinaire mais qui, malgré l’existence de modèles sophistiqués pour prédire la structure des communautés microbiennes, reste encore très expérimentale. Aujourd’hui, l’écologie microbienne a besoin de fondements théoriques afin d’accorder des modèles simples avec les concepts. Par exemple, une description mathématique de motifs à l’échelle microscopique dans l’environnement permettrait, par intégration, d’arriver à des descriptions macroscopiques conformes.
4 Commentaires
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votre article
Monsieur,
Je vous remercie pour cet article qui a grandement inspiré mon projet professionnel en ces temps de concours pour moi. J’y ai trouvé le lien entre les matières que j’aime et des problématiques qui m’intéresse au plus au point.
Je voulais juste donc vous adresser mes remerciements.
Remerciements et demande d’informations complémentaires
Bonjour,
Je voudrais vous remercier pour cet article à la fois intéressant, concis, et optimiste. Actuellement élève-ingénieur en Biotechnologies à l’école de l’ENSTBB (Ecole Nationale Supérieure des Technologies de Biomolécules de Bordeaux), je suis à la recherche d’un stage en entreprise et je m’informe depuis peu sur l’application des biotechnologies au service de l’environnement.
Ce domaine des biotechnologies jaunes m’attirant énormément, je souhaiterai y réaliser mon stage. Je commence tout juste à chercher des entreprises pour une période de 6 à 8 mois à partir de cet été, et ce à l’étranger (dans un pays anglophone de préférence) ou en France dans une moindre priorité.
En effet ce secteur me semble « jeune » et relativement restreint pour le moment, c’est pourquoi je voudrais mettre toutes les chances de mon côté en vous demandant conseil. Je serai également intéressé par des articles similaires à celui-ci si jamais vous en aviez à me proposer, plutôt porté sur le marché du travail actuel dans les biotechnologies jaunes ou bien concernant des opportunités d’embauche (création de nouvelles entreprises, PME en recrutement, levée de fonds récente).
En vous remerciant pour le travail que vous fournissez dans ce domaine prometteur, ainsi qu’en vous remerciant pour votre attention,
Cordialement,
Simon Brège.
valorisation des dechets
merci d’avoire partagè cette article
remerciemment
merci beaucoup pour d’avoir cette article