La construction navale de défense, moderne et performante
L’industrie navale de défense est un pôle technologique et industriel de premier rang, l’un des piliers de l’indépendance stratégique de la France. Elle contribue au rayonnement politique et économique. Elle attire les talents.
Fortement exportatrice, elle contribue de façon significative à la balance commerciale et génère des coopérations internationales de longue durée.
REPÈRES
Avec la création en 1374 du premier arsenal de la Marine au clos des Galées à Rouen par Charles V et en 1631 des forêts royales dédiées à la production du bois de chêne nécessaire à la construction des navires par Richelieu, la France s’est dotée très tôt d’une industrie navale, capable de fournir à l’État l’outil performant dont il avait besoin. Cette compétence dans le domaine d’une industrie complexe a été caractérisée dès le début de son existence par la capacité de mise en oeuvre de moyens lourds, de processus complexes et de compétences humaines, développées et entretenues au fil du temps.
Avec 5 500 km de côtes, auxquelles s’ajoute aujourd’hui le deuxième espace maritime du monde couvrant 11 millions de km2, la France a toujours eu besoin d’assurer la sécurité de ses approches maritimes. De tout temps, la place primordiale qu’elle avait au sein des nations européennes, le besoin économique et politique d’avoir un empire colonial, de le défendre, de gérer et protéger le commerce maritime qui en découlait, ont rendu indispensable que la France possède une force navale performante, redoutée et importante en nombre.
Le sous-marin nucléaire est la quintessence de tous les savoir-faire
Il est aujourd’hui aisé d’imaginer ce que représentait pour les architectes navals, les ingénieurs et les compagnons de toutes spécialités la construction d’un galion quand on voit comment la reconstruction avec les techniques de l’époque de l’Hermione à Rochefort est longue et complexe. Il aura fallu près de dix ans pour refaire à l’identique un tel navire. Cela aura nécessité de retrouver les métiers et les techniques d’autrefois : charpentier, menuisier, calfateur, voilier, cordeur, compagnon, etc., et de les faire travailler ensemble dans un espace limité et confiné.
Mille fois plus silencieux
Le premier sous-marin de l’ère moderne, imaginé par l’ingénieur du Génie maritime Laubeuf dans les années 1900, était en lui-même une révolution : on allait enfin naviguer sous l’eau, tout en emportant des armements. Mais il y a autant d’évolution technologique entre les premiers sous-marins nucléaires lanceurs d’engins (Le Redoutable) et ceux d’aujourd’hui (Le Terrible, mis à l’eau il y a quelques mois et aujourd’hui en essais à la mer), en particulier dans la discrétion acoustique (il est mille fois plus silencieux), qu’il n’y en avait entre le sous-marin conçu par Laubeuf au début du siècle dernier et les plus récents sous-marins classiques, ce qui souligne l’accélération du progrès technologique et l’évolution des métiers.
Une industrie de haute technologie
Certes les technologies ont évolué, grâce aux hommes, à leur inventivité, à leur volonté de progrès ; du bois on est passé à l’acier, de la voile au moteur et de la plate-forme armée de canons aux systèmes de combat intégrés, mais il s’agit toujours de métiers d’avant-garde à la fois très techniques et très évolutifs, que l’on appelle aujourd’hui des métiers de haute technologie.
Concernant la technologie mise en oeuvre, la France fait partie du club très fermé des pays ayant un groupe aéronaval basé sur un porte-avions (États-Unis, France, Brésil) plus puissant qu’un groupe basé sur un porte-aéronefs (Grande-Bretagne, Russie, Italie, Espagne, Thaïlande, Inde) dont la rampe inclinée de décollage court réduit le potentiel des aéronefs mis en œuvre.
La France fait également partie des pays dotés de sous-marins nucléaires lanceurs d’engins (SNLE) et de sous-marins nucléaires d’attaque, SNA (États-Unis, Grande-Bretagne, France Russie, Chine).
Elle est la seule, avec les USA, à avoir la totalité des compétences et des technologies spécifiques, couvrant l’ensemble du domaine naval allant du porte-avions au sous-marin. Ces technologies de défense sont souvent transverses, et ont avec les technologies du domaine civil des synergies importantes.
Un produit unique
Le Terrible, mille fois plus silencieux que les premiers sous-marins nucléaires
Le sous-marin nucléaire est en effet la quintessence de tous les savoir-faire, il associe le travail des aciers à haute élasticité les plus particuliers aux métiers de l’atome pour la propulsion, à ceux de l’espace avec les missiles, à ceux des télécommunications et de l’électronique. Tout ceci dans un environnement confiné où chaque technologie risque de perturber l’autre sans compter la nécessaire prise en compte de l’environnement permettant la cohabitation de longue durée entre l’homme et la machine.
Un porte-avions est à la fois une ville, un aéroport, un système de combat, un centre de commandement d’une force déployée sur des milliers de kilomètres carrés, le tout dans un espace grand comme deux terrains de football.
La phase de construction est aussi des plus ardues. Elle nécessite de faire travailler dans un lieu très exigu (un cylindre de 100 m de long et de 10 m de diamètre), dans un ordre précis et en même temps de nombreux spécialistes pour mettre en oeuvre équipements et outillages de pointe et réaliser quinze millions d’heures de travail en quelques dizaines de mois. Il s’agit d’intégrer plus d’un million de composants, pour créer à chaque fois un objet unique. Cette tâche est l’un des défis que relèvent les architectes navals. En effet un sous-marin représente en matière de nombre de composants et de complexité d’intégration quelque 300 TGV ou quelques dizaines d’airbus.
La préservation et le renforcement de cette position de leader dans ce domaine ont été possibles grâce aux compétences métiers acquises et préservées au fil des ans, grâce aussi aux investissements de R et T (600 millions d’euros en 2008 pour la défense) régulièrement investis par l’État même si d’aucuns les jugent insuffisants.
Un poids économique de premier ordre
En matière économique la France a toujours consacré une part importante de ses ressources à sa défense et en particulier à sa composante navale.
La flotte française a, de tout temps, été avec la flotte britannique la plus importante d’Europe. Aujourd’hui encore la France et la Grande-Bretagne sont les deux seuls pays d’Europe à consacrer 2 % de leur PIB à la défense, dont une part significative pour sa marine.
Trente pour cent du chiffre d’affaires est réalisé sur les marchés internationaux
La construction navale de défense est un secteur important du tissu industriel français. Fortes aujourd’hui de plus de 30 000 personnes, structurées autour de quelques grands maîtres d’oeuvre ayant les compétences d’ensemblier et d’intégrateur, des centaines de PME spécialisées constituent des niches technologiques qui assurent aux grands groupes une innovation créatrice qui renforce la compétitivité de notre industrie.
Avec une forte présence sur les marchés internationaux, 30 % du chiffre d’affaires y est réalisé, avec des cycles profondément différents du secteur civil, cette industrie fortement exportatrice se situe au 3e rang mondial et au 1er rang européen.
Une volonté politique partagée
Une formation performante
La France est dotée d’un système de formation performant que d’autres nous envient, écoles de haut niveau, formations spécialisées, apprentissage en entreprise, formation continue : la fidélité des équipes attachées à ce secteur, comme l’indique un turn over faible, souligne l’importance qu’attachent nos entreprises à la qualité des hommes et à leur savoir-faire, mis en évidence par la filière des talents chez DCNS ou le forum des métiers à la Cité de la mer de Cherbourg.
Ces compétences dans des métiers aussi variés sont la résultante de choix politiques maintes fois confirmés et d’une action continue de l’administration pour protéger la BITD nationale (Base industrielle et technologique de défense) et des industries pour fidéliser les hommes, renforcer leurs compétences, et organiser le transfert de ces savoir-faire au travers des générations.
Il est facile, par insouciance ou négligence ou pour des économies de court terme, de perdre des compétences ; il est beaucoup plus difficile et extrêmement coûteux de les reconstituer.
Un attrait pour la jeunesse
Nous nous devons donc d’attirer les jeunes, de souligner les atouts des métiers de l’industrie navale, la dualité civile et militaire, et surtout, de pouvoir assurer un avenir évolutif, afin de leur apporter une ouverture sur le monde et sur la technologie future dans la défense et dans tous les domaines connexes tels le nucléaire, l’éolien, l’hydrolien et l’écologie. Mais en même temps ces métiers qui s’inscrivent dans la durée, tant leur spécificité est grande, doivent apporter à notre jeunesse la sécurité de l’emploi. Ce n’est qu’à ce prix que l’on fera éclore les talents et que l’on conservera les compétences rares, éléments indispensables à la construction d’un avenir où la France a une place essentielle et incontournable.
Une vision européenne porteuse d’avenir
Au plan international, la réputation de la technologie française et des performances des hommes est excellente. Les coopérations initiées avec nos partenaires ou nos clients montrent clairement que la compétence française est appréciée, que notre générosité à faire partager nos acquis nous permet de bâtir des relations durables tout en assurant la pérennité de nos industries et de nos métiers. La France est au cœur de l’Europe, le bon élève qui fait avancer les restructurations de défense, grâce à la pertinence de ses produits, la compétence de ses hommes par la diversité des métiers qu’elle a su développer dans le secteur de la mer.