La démocratie au péril des prétoires
De l’État de droit au gouvernement des juges
Le gouvernement des juges… « Les robins » dans la bouche du Général… Souvenirs d’études… Jean-Éric Schoettl a d’abord, en sortant de l’X, passé pas mal d’années comme enseignant chercheur dans l’alors jeune université de Vincennes, en linguistique mathématique. Puis il est sorti au Conseil d’État, ayant fait l’ENA, et depuis lors a eu une belle carrière mi-administrative mi-juridique, qui a culminé dans les fonctions de secrétaire général du Conseil constitutionnel de 1997 à 2007. C’est donc en connaissant tant les fonctions exécutives publiques que le fonctionnement des juridictions qu’il peut estimer ceci : le juge depuis un demi-siècle est excessivement monté en puissance et il en vient à menacer le fonctionnement démocratique. Il faudrait donc restaurer une juste séparation des pouvoirs.
L’auteur décrit d’abord cette ascension du juge, sous un angle disons « de sciences politiques ». Il passe ensuite aux travaux pratiques – c’est là que je le trouve excellent – et analyse une vingtaine de décisions juridictionnelles exemplaires à cet égard ; chaque affaire est exposée avec une clarté aveuglante et critiquée de manière implacable ; je ne citerai que les pages consacrées à celle du « décrochage » des portraits officiels du chef de l’État : c’est un régal ! « Du caprice du prince au caprice du juge », dixit. On peut contester le programme de restauration qu’il propose enfin dans sa conclusion, il ne fait rien pour en atténuer l’exigence, mais on ne sort pas indemne de la lecture de cet ouvrage de haute tenue dont la relative brièveté (250 pages) préserve la force d’impact et qui change heureusement de la prose journalistique habituelle dans ces matières.