La France et ses immigrés : une analyse saine et sans complaisance

Dossier : La démographie déséquilibréeMagazine N°639 Novembre 2008Par Gaston KELMAN

Trop sou­vent, le migrant n’ar­rive pas à prendre une pers­pec­tive citoyenne et le sen­ti­ment domi­nant reste l’i­dée du retour au pays natal. Tout en res­pec­tant tra­di­tions et valeurs, il faut dire oui à la mul­ti­ra­cia­li­té, mais non à la mul­ti­cul­tu­ra­li­té. Il nous faut refu­ser les migrants inca­pables de s’a­dap­ter à notre modèle.

» J’ai choi­si d’être fran­çais, j’a­joute qu’é­tant Noir il m’est pos­sible de dire bien des choses vraies, mais » poli­ti­que­ment incor­rectes » qu’au­cun Blanc n’o­se­rait sou­te­nir ; pour cela mon métier d’é­cri­vain est très utile. »

L’en­jeu essen­tiel est la défi­ni­tion de la citoyen­ne­té. Quel regard le migrant porte sur la socié­té ? Et quel regard la socié­té porte sur les migrants ?

Repères
Nous connais­sons tous les dif­fi­cul­tés des migrants d’au­jourd’­hui, anal­pha­bé­tisme, pro­blèmes lin­guis­tiques, sou­vent culture non chré­tienne, dif­fé­rences cli­ma­tiques et sociales, etc. Un point est sou­vent igno­ré : les migrants de l’entre-deux-guerres, Ita­liens, Espa­gnols, Polo­nais, Russes, fuyaient des dic­ta­tures et choi­sis­saient la France parce que c’est un pays de liber­té, ils n’a­vaient à peu près aucun espoir de retour au pays natal et éle­vaient leurs enfants dans cette idée. L’in­té­gra­tion en était évi­dem­ment très facilitée.

L’idée du retour et la perspective historique

L’Histoire n’a de sens que si elle favo­rise le vivre ensemble

Les migrants d’au­jourd’­hui, essen­tiel­le­ment Magh­ré­bins ou Afri­cains, ont long­temps pra­ti­qué des allers retours pério­diques entre l’Eu­rope et leur pays d’o­ri­gine. Mais les cartes de séjour et le regrou­pe­ment fami­lial trans­for­mèrent assez rapi­de­ment ces habi­tudes en immi­gra­tion de longue durée. Cepen­dant le sen­ti­ment domi­nant reste sou­vent l’i­dée du retour final au pays natal, ce qui fait que leurs enfants ne savent pas tou­jours quelle idée direc­trice choi­sir pour orien­ter leur vie.

L’im­por­tant, c’est le futur
Il faut bien se mettre dans l’i­dée que l’es­cla­vage n’est plus d’ac­tua­li­té (sauf dans quelques pays recu­lés qui ne sont pas la France) et per­son­nel­le­ment je n’ai pas souf­fert de l’es­cla­vage, pas même par parents ou grands-parents inter­po­sés. L’im­por­tant c’est le futur ; culti­ver le dolo­risme ou le sen­ti­ment de culpa­bi­li­té revient à uti­li­ser la tech­nique du bouc émis­saire et empêche, ou du moins gêne, les efforts néces­saires pour pro­gres­ser personnellement.

Un indice de cet état d’es­prit est la fameuse » assu­rance rapa­trie­ment de corps » très répan­due chez les étu­diants afri­cains : quoi qu’il arrive, je serai enter­ré au pays.

Une deuxième dif­fé­rence essen­tielle est l’his­toire de l’es­cla­vage et de la colo­ni­sa­tion. Certes il y a quelques élé­ments posi­tifs comme Félix Éboué, Noir et gou­ver­neur du Gabon pen­dant les déci­sives années qua­rante, Gas­ton Mon­ner­ville pré­sident du Sénat, les com­bat­tants afri­cains ou magh­ré­bins de la France libre – tous volon­taires -, l’é­po­pée vic­to­rieuse des adver­saires de l’es­cla­vage, Vic­tor Schoel­cher, Fran­çois Ara­go. Mais trop sou­vent le migrant n’ar­rive pas à sor­tir de la pers­pec­tive his­to­rique pour prendre une pers­pec­tive citoyenne : l’His­toire n’a de sens que si elle favo­rise le vivre ensemble et aide à évi­ter de recom­men­cer les erreurs du passé.

Bien enten­du si les Afri­cains cultivent volon­tiers le dolo­risme, symé­tri­que­ment beau­coup de Fran­çais de souche ont un pro­fond sen­ti­ment de culpa­bi­li­té. Je raconte volon­tiers l’ex­cla­ma­tion de cette dame qui m’a dit : » Moi, ça me gêne que tous les vigiles soient des Noirs » et à laquelle j’ai répon­du : » Moi, cela ne me gêne pas du tout, après tout, tous les limo­na­diers sont bien auver­gnats ! » Une autre me dit : » Quand je pense que tant de belles mai­sons de Nantes sont le fruit de l’es­cla­vage ! « , ce à quoi j’ai répon­du : » Cette beau­té est en effet l’une des très rares choses de bien qu’il reste de l’es­cla­vage. Allez-vous brû­ler la Sainte- Cha­pelle et le châ­teau de Ver­sailles, sous le pré­texte qu’ils sont le fruit du servage ? »

Huit litres de sang
Les Indiens de l’Al­ti­pla­no boli­vien, qui vivent à plus de quatre mille mètres d’al­ti­tude, ont huit litres de sang au lieu de cinq comme c’est le cas ordi­nai­re­ment, cela leur per­met de vivre à l’aise dans leur » milieu natu­rel « . Mais si des Euro­péens mettent au monde et élèvent leurs enfants sur l’Al­ti­pla­no, ceux-ci auront presque huit litres de sang à l’âge adulte ! De ce point de vue ils seront bien plus proches de leurs voi­sins que de leurs parents les­quels ne dépas­se­ront pas cinq litres et demi mal­gré vingt années de vie adulte sur l’Altiplano.

On peut faire des remarques très voi­sines en ce qui concerne la colo­ni­sa­tion, phé­no­mène sou­vent très bru­tal et qui a frap­pé l’A­frique d’une manière beau­coup plus éten­due. Soyons réa­listes, les » côtés posi­tifs de la colo­ni­sa­tion » ne sont bien sou­vent que des à‑côtés essen­tiel­le­ment au ser­vice du colo­ni­sa­teur, ain­si les infra­struc­tures, ports, voies fer­rées, routes, conçues dès le départ pour la » mise en valeur » du ter­ri­toire, pour des­ser­vir les meilleures mines, les régions de cultures les plus ren­tables. Je ferai tout de même une excep­tion pour les ser­vices de san­té qui ont fait un tra­vail remar­quable dans des condi­tions très dif­fi­ciles et je recon­nais bien volon­tiers qu’a­vant la colo­ni­sa­tion l’A­frique a connu autant de guerres internes, d’es­cla­vage et d’op­pres­sions que les autres continents.

Culture, tradition et valeurs

Nous devons nous pen­cher sur la notion de » culture « , c’est essen­tiel­le­ment ce que l’on est » hic et nunc « , ici et main­te­nant : édu­ca­tion + reli­gion + savoir-faire + quar­tier de vie + siècle où l’on vit. La culture est en per­pé­tuelle évo­lu­tion et de ce point de vue un cita­din d’au­jourd’­hui est plus proche de la plu­part des autres cita­dins des grandes métro­poles que de son arrière-grand-père ou même de son grand-père.

Des repères raciaux
Il a fal­lu que je vienne en France pour que je voie des bou­bous et des griots pour la pre­mière fois ! Ma culture n’est plus le tam-tam et la pirogue, c’est l’a­vion et le télé­phone por­table (bien plus effi­cace que le tam-tam), mais on me reproche d’é­cou­ter Bee­tho­ven et de tra­hir ma » culture « . Nos repères res­tent raciaux : la notion de race est morte, mais son enter­re­ment va durer des siècles.

La tra­di­tion est ce qui met en har­mo­nie avec l’en­vi­ron­ne­ment phy­sique per­son­nel et l’on doit y inclure les outils cor­res­pon­dants (rites, habi­tudes, vête­ments adap­tés au cli­mat et au métier, etc.).

Les » valeurs » repré­sentent pour l’ins­tant un domaine figé, elles mettent en har­mo­nie avec l’en­vi­ron­ne­ment social. En Occi­dent ce sont essen­tiel­le­ment les » dix com­man­de­ments « , il faut y inclure les apti­tudes à la com­mu­ni­ca­tion et au res­pect des autres.

Le » milieu natu­rel « . Ah ! que n’en­tend-on pas à ce sujet ! Il faut sou­li­gner l’ex­tra­or­di­naire capa­ci­té d’a­dap­ta­tion de l’être humain et com­prendre que le milieu natu­rel d’un jeune né et éle­vé près de Paris est l’Île-de-France, quel que soit par ailleurs le pays de ses grands-parents. Modi­bo Diar­ra est cos­mo­naute, son grand-père condui­sait des trou­peaux au Mali ! Je fais enfin la dif­fé­rence entre l’i­den­ti­té et la culture ; l’i­den­ti­té ce sont des élé­ments très concrets : taille, âge, lieu de nais­sance, ascen­dants, pro­fes­sion, etc. Mais la culture n’est pas innée, elle est acquise, je vous donne un exemple : si l’on vous demande de des­si­ner une mai­son fran­çaise, afri­caine ou inuit, vous des­si­ne­rez une mai­son moderne, une case ou un igloo, c’est votre culture acquise qui vous dicte cela. Pour­tant si les igloos existent encore (ils cor­res­pondent à une néces­si­té natu­relle, compte tenu des maté­riaux locaux), il y a long­temps que les Afri­cains ne construisent plus de cases.

Il nous faut refu­ser les migrants inca­pables de s’adapter à notre modèle

Mais elles res­tent dans les esprits.

Des situations ubuesques

Voi­là un exemple frap­pant de notre sen­ti­ment de culpa­bi­li­té : la poly­ga­mie a été admise par­mi les migrants jus­qu’en 1993. Aujourd’­hui on la tolère encore par­mi ceux qui n’ont pas la natio­na­li­té fran­çaise, même si, en prin­cipe, on ne peut plus l’in­vo­quer pour le regrou­pe­ment fami­lial. Cela conduit à des situa­tions ubuesques, des men­songes qui révoltent les offi­ciers d’é­tat civil, comme ces enfants nés à cinq mois d’in­ter­valle et attri­bués à la même mère.

Ce même état d’es­prit nous fait ensei­gner, à grands frais, les langues afri­caines, bam­ba­ra, peul, sonin­ké, wolof, dans les écoles fran­çaises ; toutes fan­tai­sies qui retardent l’a­dap­ta­tion, per­pé­tuent l’ex­ci­sion et la poly­ga­mie et sont tout à fait contraires à une saine intégration.

Je dénonce avec force l’hy­po­cri­sie de ces intel­lec­tuels dans leur fau­teuil qui crient à l’ar­rê­té » liber­ti­cide » quand un maire décrète le couvre-feu à minuit pour les moins de douze ans : » Ces enfants n’ont-ils pas le droit d’être dans la rue comme en Afrique » Comme si les condi­tions d’une ville fran­çaise étaient celles d’un vil­lage afri­cain. Ces mêmes hommes ne lais­se­raient sûre­ment pas leurs propres enfants en bas âge errer seuls dans les rues à minuit. En résu­mé : » Oui à la mul­ti­ra­cia­li­té, non à la mul­ti­cul­tu­ra­li­té. » Il nous faut refu­ser les migrants inca­pables de s’a­dap­ter à notre modèle.

Les Amé­ri­cains ont une devise typique à ce sujet : » Ame­ri­ca, you love it or you leave it ! »

Cet article est extrait d’un expo­sé pré­sen­té le 4 avril 2006 au groupe X‑Dé­mo­gra­phie-éco­no­mie-popu­la­tion.

Quelques ques­tions

L’es­cla­vage n’a-t-il pas été la plaie uni­ver­selle de l’humanité ?
Bien enten­du, et les civi­li­sa­tions ne dif­fèrent que par le moment où elles ont répu­dié l’esclavage.

Pour­quoi donc les tri­bus sont-elles si impor­tantes en Afrique, aux dépens sans doute des nations ?
Les nations auraient nor­ma­le­ment dû jouer un rôle très impor­tant dans le déve­lop­pe­ment de l’A­frique, mais le pan­afri­ca­nisme a tout brouillé. Le sen­ti­ment pan­afri­cain est une créa­tion des Noirs amé­ri­cains qui savaient que leurs ancêtres venaient d’A­frique, mais qui igno­raient de quel pays exac­te­ment. Les pre­miers diri­geants afri­cains ont com­mis une erreur pha­rao­nique en atti­rant les esprits de ce côté. Cela a décons­truit et fra­gi­li­sé l’i­dée de Nation et dès les pre­mières dif­fi­cul­tés cha­cun s’est retrou­vé dans sa tribu.

Culture et islam ?
Les jeunes » musul­mans » fran­çais sont bien peu musul­mans, seule une petite pro­por­tion va régu­liè­re­ment à la mos­quée, res­pecte l’in­ter­dic­tion de boire du vin et fait un rama­dan rigou­reux. Il est donc essen­tiel de ne pas les stig­ma­ti­ser et de ne pas pro­vo­quer de réactions.

Atta­che­ment de ces jeunes à la France ?
Je ferai trois caté­go­ries : 1) ceux qui aiment la France, comme Abdel Malik qui a écrit le livre Qu’Al­lah bénisse la France ! 2) ceux qui pensent » Nous aime­rons la France quand elle nous aime­ra ! » 3) ceux qui sont per­dus et ne savent que pen­ser… et qui donc mettent le feu pour appe­ler au secours.

Que pen­sez-vous de l’his­to­rien Pétré Gre­nouillot qui a écrit que l’es­cla­vage n’é­tait pas un génocide ?
Cela certes lui a valu une volée de bois vert de la part des intel­lec­tuels » poli­ti­que­ment cor­rects « . Mais je pense qu’il a quand même rai­son. L’es­clave était consi­dé­ré comme du bétail, ou au mieux comme un che­val de course, mais on n’a­chète pas un che­val de course pour le jeter dans un précipice.

Quelle est la situa­tion des Métis ?
Les Métis sont consi­dé­rés comme des Noirs en Europe et comme des Blancs en Afrique, cette situa­tion défa­vo­rable ne peut s’a­mé­lio­rer que dans le ciment d’une vraie nation et je suis per­sua­dé qu’un jour pro­chain la cou­leur de la peau n’au­ra pas plus d’im­por­tance que celle des yeux ou des che­veux (ces der­niers eux aus­si sont noirs, jaunes, rouges ou blancs !). Ce qui me fait homme c’est l’hu­ma­nisme qui est en moi et qui fait que les dis­cri­mi­na­tions s’ar­rêtent. Rap­pe­lons-nous cette phrase magni­fique de l’é­cri­vain antillais Daniel Maxi­min » Je suis à la confluence de quatre par­ties du Monde : l’A­frique, l’Eu­rope, l’A­sie, les Amériques. »

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