La Monnaie de Paris est confrontée à une transformation profonde de son modèle économique
Dans un contexte économique et social mouvant, la Monnaie de Paris évolue pour répondre aux attentes et besoins des Français. Entre évolution des paiements électroniques, transformation numérique, crise et évolution des modes de consommation des espèces, elle se réinvente pour relever l’ensemble de ces défis. Le point avec son président-directeur général, Marc Schwartz.
La pandémie a changé notre rapport à la monnaie. Qu’en est-il ?
Contrairement aux idées reçues, la crise sanitaire liée à la pandémie de COVID-19 n’a pas précipité la fin des espèces. On a constaté en 2020 une véritable « ruée sur le cash », avec une augmentation de la demande d’argent liquide de 11 % en 2020 dans la zone euro. Cela est dû à un phénomène d’épargne, comme dans toutes les crises financières.
Le paiement électronique progresse, mais la demande d’espèces a fortement augmenté, dans le monde entier, depuis le début de la crise sanitaire. C’est ce que j’appelle le « grand paradoxe du cash » : moins de paiements en argent liquide dans les transactions du quotidien et, en même temps, un retour vers l’argent liquide comme réserve de valeur. La quantité d’euros ou dollars en circulation n’a jamais été aussi élevée et nous devons continuer à alimenter les besoins de l’économie.
On entend souvent parler d’un désamour des Français pour les espèces. Qu’en pensez-vous ?
La Monnaie de Paris a confié à l’Ifop une étude pour analyser les attentes et besoins des Français quant à leurs moyens de paiement. Le paiement en espèces est une pratique qui reste profondément ancrée dans les usages. 91 % des Français déclarent qu’il leur arrive d’avoir recours régulièrement aux espèces quand 70 % déclarent les utiliser au quotidien. Seuls 9 % déclarent ne plus jamais avoir recours aux espèces. Vecteurs de lien social, les espèces sont le mode de paiement privilégié pour les transactions chez les petits commerçants et pour les donations en tout genre. Ce recours aux espèces n’est pas un choix par défaut : dans plus de 70 % des cas, les personnes ayant payé en espèces n’auraient pas souhaité le faire de manière dématérialisée. Et 83 % des Français se déclarent ainsi attachés aux espèces.
Cette année est marquée par le 20e anniversaire de l’Euro. Qu’avez-vous prévu pour ce cet évènement ?
La Monnaie de Paris, à l’origine de la fabrication des 25 milliards de pièces d’euro mises en circulation en France depuis 2002, a souhaité célébrer cet événement concomitant à la présidence française de l’Union européenne. Plusieurs initiatives telles que le renouvellement de la face nationale des pièces de 1 € et 2 €, le lancement d’une collection monétaire, une installation dans le musée, un podcast en partenariat avec Le Monde, une série de capsules vidéo réalisées avec l’Institut national de l’audiovisuel, rendent hommage à la monnaie européenne.
Quels sont les autres sujets qui vous mobilisent ?
Nos équipes sont pleinement engagées pour assurer le développement de l’entreprise sur de nouveaux marchés. La commande annuelle de l’État en pièces de monnaie a baissé de 50 % en dix ans et ne représentait en 2021 plus qu’un quart de notre chiffre d’affaires.
La Monnaie de Paris est donc confrontée à une transformation profonde de son modèle économique, comme la Poste, avec la baisse inéluctable du courrier.
Nous avons plusieurs projets de diversification parmi lesquels la poursuite du développement des monnaies de collection visant à élargir notre base de clientèle, avec des licences attractives telles que Harry Potter, la collection de monnaies pour les JO de Paris 2024, ou encore un projet immobilier sur notre terrain de Pessac. Il s’agit de la construction de locaux d’activités pour répondre aux besoins de la région en hébergement de start-up notamment. Cette activité nous apportera des revenus récurrents et stables.
Enfin, je crois que nous avons à conduire avec détermination la transformation numérique de notre entreprise. Elle est déjà bien engagée, avec une croissance très forte de nos ventes sur le web, qui ont doublé en trois ans et qui sont devenues le premier canal de vente de l’entreprise. Aujourd’hui, la question de notre présence dans la monnaie numérique est posée.