La passion du BTP
Dans les années 1980, les bons élèves étaient traditionnellement orientés vers les grandes écoles scientifiques et non pas les voies économiques, littéraires ou juridiques. Après une prépa à Louis-le-Grand, où j’ai tâché d’exploiter mon potentiel au maximum, mon choix s’est porté sur Polytechnique au lieu de Normale sup, pour l’aspect pluridisciplinaire de cette formation, mais aussi, plus surprenant peut-être, par goût pour le sport.
Les équipements sportifs dont l’X bénéficiait à l’époque attisaient en effet la jalousie de beaucoup d’autres écoles et permettaient de prendre largement l’air lors des compétitions interuniversitaires.
Plus sympa encore : nous étions par promotion une vingtaine de jeunes filles au milieu de plus de 300 garçons. Tous n’étaient pas machos, et j’y ai trouvé un vrai groupe d’amis fidèles avec lesquels je suis toujours en contact.
Concevoir et voir ce que l’on a conçu
À la sortie de l’X : le corps des Ponts, l’un des plus prestigieux débouchés de Polytechnique, un pari presque impossible, que j’ai été ravie de réaliser car j’ai toujours aimé « bricoler », et j’ai toujours trouvé magique de concevoir un ouvrage puis de le voir s’élever sous mes yeux. Depuis cette entrée au corps des Ponts, j’avoue n’en avoir fait qu’à ma tête en termes d’orientation professionnelle : j’ai commencé par une année de césure passée dans le financement de grands projets à la BNP, dont deux mois à l’étranger, à New York et Los Angeles.
Toutes les fonctions que j’ai prises ensuite furent liées au BTP, à commencer par mon arrivée à la direction départementale de l’équipement des Hauts-de-Seine. Des projets passionnants s’annonçaient comme la construction de l’A86 dans tout l’Ouest parisien. J’ai ensuite travaillé à la direction des routes du ministère de l’Équipement, au financement des grands projets routiers de plus de 200 pôles urbains, avant de rejoindre la Société des autoroutes et du tunnel du Mont-Blanc puis le concessionnaire autoroutier Cofiroute. Après dix années passées dans le secteur autoroutier, j’intégrai Nexity puis, en 2006, Bouygues Immobilier.
Libre cours à l’imagination
Ma mission chez Bouygues Immobilier : concevoir des plans entiers de quartiers, après avoir diagnostiqué les besoins et les équilibres à respecter entre logements, bureaux, commerces, services ou encore écoles. De quoi donner libre cours à mon imagination tout en tenant compte de l’impact des opérations de promotion immobilière sur l’environnement urbain et économique.
Enfin en 2008, contactée par un chasseur de têtes déjà croisé par le passé, je rejoins l’ESTP (École spéciale des travaux publics, du bâtiment et de l’industrie) en tant que directeur général.
J’ai considéré ce nouveau poste comme celui d’un patron de PME, permettant de développer de nombreux projets, comme la modernisation progressive et constante des enseignements et des options pour des promotions de 600 élèves ingénieurs, le développement des relations internationales et de la recherche, le développement de la formation continue aux services des professionnels, ou encore le rachat et la modernisation de notre campus de Cachan.
Sans cesse refaire ses preuves
J’avoue qu’évoluant dans un monde composé à 99% d’hommes, on m’a demandé beaucoup plus qu’à mes collègues masculins. Forcément atypique, j’ai toujours senti que mes supérieurs avaient envie de me faire confiance, mais qu’il me faudrait pour cela sans cesse faire mes preuves. Cette carrière bien remplie ne m’a pas empêchée d’avoir trois enfants (aujourd’hui 18, 20 et 23 ans) et une vie de famille que je crois bien équilibrée, malgré un emploi du temps parfois chargé. Si c’était à refaire ? Je recommencerais, avec le même enthousiasme.