La protection paramétrique contre les risques climatiques
Grâce à une offre plus transparente, plus rapide et plus flexible de l’assurance, le groupe AXA se positionne aujourd’hui sur le secteur de l’assurance paramétrique. Le point avec Adrien Cassegrain (2010), Souscripteur Paramétrique Sénior et Paola Fedou (2015), Product Manager pour le rendement agricole au sein d’AXA Climate.
Quelques mots sur la filiale Axa Climate.
AXA Climate est la filiale du groupe AXA qui permet à ses clients de bénéficier d’une expertise de pointe en matière de protection contre les risques climatiques. Grâce à notre savoir-faire et aux compétences de notre équipe, nous proposons plus de 50 types d’indices pour protéger les entreprises, les institutions et les communautés. Nous sommes une équipe de 80 personnes qui œuvrent pour développer cet axe depuis plus de 5 ans. Parce qu’il vaut mieux prévenir que guérir, AXA Climate développe aussi des services pour agir en prévention des dommages liés à ce phénomène.
Expliquez-nous la démarche derrière l’assurance paramétrique.
Contrairement à l’assurance traditionnelle où l’expert déterminera la valeur de l’indemnisation a posteriori du sinistre, en assurance paramétrique, le schéma est un peu inversé. Par exemple, avant la signature du contrat et la réalisation du sinistre, nous structurons la couverture à partir d’un Indice de Rendement Régional et prédéfinissons le seuil déclencheur selon la moyenne sur cinq ans. Ensuite, l’idée consiste à surveiller cet indice. Dès qu’il sera en dessous du seuil prédéfini, le client recevra l’indemnisation après quelques jours.
Concrètement, comment accompagnez-vous vos clients à ce niveau ?
L’agriculture est l’un des secteurs économiques les plus sensibles à la météo. La sécheresse, le gel, la grêle et les maladies peuvent impacter la production et conduire à des pertes financières pour les entreprises agricoles. Dans des cas extrêmes, cela peut même bouleverser l’intégralité de leur chaîne de valeur. Pour y faire face, nous nous basons sur les données historiques issues du rendement du client. La gestion des sinistres constitue donc un processus transparent grâce à l’utilisation de données objectives. Ainsi, aucun expert ni visite d’exploitation ne sont nécessaires pour évaluer les pertes. Une coopérative, par exemple, peut nous solliciter pour s’assurer contre le risque de sécheresse. Nous fixons avec lui un indice qui reflétera une perte de rendement, donc une carence d’apport et donc par conséquent une baisse du chiffre d’affaires.
Comment cela se traduit-il en termes d’offre ?
L’agriculture représente 60 à 70 % de notre chiffre d’affaires. Il s’agit de couvertures tous risques directement sur le rendement. Cependant, il y a aussi des montages plus spécifiques que nous développons aussi sur d’autres périls (gel, sécheresse, etc.). Nous sommes très actifs sur le domaine agricole parce que c’est un secteur où l’assurance paramétrique s’est développée il y a plus longtemps et où le lien entre le climat et les revenus a souvent du sens. Nous ciblons également le secteur énergétique ainsi que tous les domaines sensibles aux catastrophes naturelles (transport aérien, maritime, etc.).
L’assurance paramétrique tire sa force du fait qu’environ 70 % des business modèles sont profondément impactés par les changements climatiques de manière directe ou indirecte. Cela nous permet de proposer toute une gamme de produits d’assurance spécifiques à chaque métier. Par ailleurs, nous travaillons avec des organisations internationales comme la Banque Mondiale afin de cibler des pays où la distribution des produits d’assurance est aujourd’hui complexe. Enfin, nous essayons de profiter de la nouveauté de l’assurance paramétrique afin de la développer sur ces marchés.
Plus particulièrement, comment appréhendez-vous la thématique de la résilience de l’agriculture face au changement climatique ?
Il s’agit d’un axe stratégique sur lequel nous nous investissons. Aujourd’hui, le pourcentage de la valeur agricole assurée est de 0.4 %. En effet, ce phénomène est lié au fait que dans certains pays, la notion d’assurance n’existe pas. Même en France, malgré la subvention des assurances à hauteur de 60 %, dans le cadre de la politique agricole commune et des subventions étatiques, le taux des agriculteurs assurés ne dépasse pas 20 %.
Nous sommes donc partis du constat que d’un côté, l’agriculteur fait face à de nombreux risques climatiques qui fragilisent sa stabilité financière, et de l’autre, les offres d’assurances disponibles sur le marché ne permettent pas de combler ce décalage. Nous avons donc décidé de nous différencier à travers de nouvelles solutions non seulement d’assurance mais aussi de services. En effet, nous nous orientons vers plusieurs projets tels que les solutions d’irrigation pour lutter contre la sécheresse. L’idée est donc d’aller au-delà de l’activité assurantielle afin de proposer un panel de solutions pour mitiger le risque climatique pour les agriculteurs.
Quelle est la valeur ajoutée de ce montage paramétrique ?
Notre modèle permet d’avoir plus de transparence puisque le montant de l’indemnisation est fixé à l’avance en accord avec le client. Ainsi, en instaurant une relation de confiance, celui-ci bénéficiera d’un remboursement plus rapide. En parallèle, nous aurons un processus de gestion plus court en interne. Cela nous permet aussi de nous libérer de la charge du contrôle de la valeur finale du sinistre par l’un de nos experts. Au-delà de ces avantages, nous sommes capables de pallier le décalage entre l’assurance traditionnelle où aucune compagnie ne prendra le risque d’assurer un commerçant vis-à-vis de son chiffre d’affaires. De cette façon, l’assurance paramétrique pourra être proposée aux agriculteurs en Inde par exemple, à très grande échelle.
Quels sont vos principaux enjeux mais également les perspectives qui peuvent se profiler ?
Les changements climatiques sont au cœur des sujets qui nous mobilisent. Aujourd’hui, nous avons très peu de visibilité sur les évolutions d’un point de vue météorologique et climatique. Cependant, nous remarquons une hausse de l’impact des catastrophes naturelles. Cela oblige l’État et certaines institutions à trouver des stratégies pour se reconstruire et s’assurer. Le challenge est de pouvoir proposer des assurances de qualité à un plus grand nombre d’acteurs. C’est un défi qui dépasse notre équipe ou même notre groupe. La dernière vague d’incendies en Australie ou en Californie par exemple, montrent qu’il ne s’agit plus d’un risque limité aux pays émergents.
En tant qu’assureurs, notre rôle est donc de trouver des offres à court et à moyen termes. In fine, nous pourrons accompagner cette transition et l’émergence de nouvelles méthodes qui permettront de mieux faire face à ces risques. L’assurance est un élément primordial, et même vital, notamment pour les personnes les plus exposées à ces changements climatiques. Notre ambition est donc d’être leur « bouclier ».
Enfin, comment voyez-vous l’assurance paramétrique évoluer à moyen et long terme ?
Nous sommes aujourd’hui au début d’une grande aventure puisqu’il y a un écart de protection qui n’est pas comblé par l’assurance « classique ». En effet, nous sommes aujourd’hui capables de proposer l’assurance paramétrique aux pays en développement qui n’ont pas encore de structures d’assurance assez solides. Nous pourrons ainsi miser sur les nouvelles technologies, notamment les satellites et les stations météo pour proposer des offres d’assurance sans avoir à se déplacer.
Les perspectives de développement sur la protection climatique sont donc très importantes. Néanmoins, nous sommes souvent contraints par les données disponibles. Toutefois, nous avons la chance de voir les gouvernements, les institutions ainsi que les entreprises fournir plus d’efforts afin d’améliorer et de rationaliser la collecte des données.
Par ailleurs, les acteurs sur le marché de l’assurance sont très demandeurs de solutions simples, rapides et transparentes, que nous sommes en mesure de proposer. Nous cherchons donc à démocratiser l’assurance paramétrique et à la proposer comme une aide face à l’instabilité causée par le réchauffement climatique.