La Révision générale des politiques publiques
Extraits d’un rapport du Conseil de modernisation des politiques publiques, complétant le dossier sur la Mutation du service public, paru dans le numéro 635 (mai 2008). Le périmètre de la RGPP comprend tous les champs de l’action publique et implique l’ensemble des ministères et des grands opérateurs de l’État. Cette approche a trouvé son inspiration dans le benchmark et l’analyse attentive de » bonnes pratiques » internationales, sans pour autant perdre de vue les exigences spécifiques de l’organisation sociale et économique de la France et de son système institutionnel.
Deux exemples de « bonnes pratiques »
La « revue des programmes », conduite au Canada dès 1994, a permis de passer d’un déficit public de 5,9 % en 1992 à un excédent de 0,4 % en 1998 ; en Allemagne, « l’agenda 2010 », annoncé en 2003, a initié un cycle volontariste de réformes de fond destinées à assainir les finances publiques tout en rendant la dépense publique plus efficace.
Deux instances de décision
Le pilotage et la coordination des réformes s’effectuent à travers deux grandes instances de décision :
- le Conseil de la modernisation des politiques publiques rassemble, autour du président de la République, le Premier ministre et les membres du gouvernement, ainsi que les membres du Comité de suivi. Le ministre du Budget, des Comptes publics et de la Fonction publique en est le rapporteur général. Le Conseil arbitre les scénarios de réforme et valide les décisions ;
- le Comité de suivi est coprésidé par le secrétaire général de la présidence de la République et le directeur de cabinet du Premier ministre. Réuni une fois par semaine, il joue un rôle d’orientation des travaux, d’avis sur les scénarios, et de préparation des décisions qui seront ensuite proposées au Conseil de modernisation.
Un quadruple enjeu
La Révision générale des politiques publiques poursuit quatre objectifs, illustrés par quelques exemples.
Sont recrutées régulièrement des personnalités ouvertes, passionnées par toutes les techniques qui permettent aux organisations d’évoluer
• Recentrer l’État. La direction générale des Finances publiques, née de la fusion de la direction générale des Impôts et de la direction générale de la Comptabilité publique, a été officiellement créée en avril dernier, avec la volonté de mutualiser les moyens et de recentrer l’administration centrale sur des missions de stratégie et de pilotage. 10 % des bureaux seront supprimés en administration centrale et les deux réseaux seront totalement unifiés à compter du 1er janvier 2009. Autre exemple, le rassemblement sous une autorité commune des forces de police et de gendarmerie se traduira par une mutualisation de leurs moyens, dans le respect du statut et de l’unité de chacune des deux forces.
• Simplifier l’État. L’organisation de l’État au niveau régional sera profondément modernisée en rassemblant les structures de l’État en huit directions. Les services d’établissements publics seront intégrés dans ces directions afin de renforcer la cohérence de l’action publique.
Au niveau départemental, dans le respect de l’appartenance des fonctionnaires à leur ministère de rattachement, des directions organisées par politique publique et non plus par logique administrative seront mises en place. Elles mutualiseront largement leurs moyens de fonctionnement.
• Moderniser l’État. S’organiser pour que les agents publics se sentent valorisés dans leur mission et soient en mesure d’exercer leur métier dans de bonnes conditions. Utiliser les potentialités des nouvelles technologies pour optimiser ses fonctionnements et recentrer le travail de ses agents sur les missions à plus forte valeur ajoutée.
• Dépenser mieux. L’État engage un diagnostic pour redéfinir les périmètres des politiques publiques et les adapter aux exigences de la société d’aujourd’hui. Par exemple, la politique de développement des entreprises sera désormais ciblée sur les entreprises moyennes. C’est aussi pour atteindre cet objectif que sera réformé le crédit-impôt-recherche, désormais réservé aux entreprises de moins de 5 000 salariés.
Sept questions simples
La démarche repose sur la combinaison de l’audit et de la décision politique. Vingt-six équipes d’auditeurs, composées de fonctionnaires issus du corps d’inspection et de consultants privés, soit plus de 300 personnes, sont mobilisées et utilisent toutes la même grille d’analyse en sept questions :
Que faisons-nous ?
Quels sont les besoins et les attentes collectives ?
Faut-il continuer à faire de la sorte ?
Qui doit le faire ?
Qui doit payer ?
Comment faire mieux et moins cher ?
Quel scénario de transformation ?
Pour chaque politique étudiée, cinq grands scénarios peuvent être envisagés : son maintien, son développement, son redimensionnement, son transfert ou son abandon, dans un contexte de nécessaire réduction du poids de la dépense publique. À titre d’exemple, dans le cadre de la RGPP, les forces de l’ordre seront réorganisées pour mieux répondre à la mission qui est au coeur de leur métier, la sécurité des citoyens. Les activités administratives (saisie des plaintes, suivi et traitement des dossiers) pourront être transférées à des agents administratifs dédiés à ces tâches, ce qui permettra aux forces de sécurité d’être davantage présentes sur le terrain, là où elles sont nécessaires, ce qui correspond à leur mission première.
Des feuilles de route
Un rapporteur général
Pour assurer le bon développement des mesures engagées et accompagner les ministères dans leur stratégie de transformation (planification des travaux, évaluation…), les équipes de la direction générale de la modernisation de l’État, de la direction du Budget et de la direction générale de l’Administration et de la Fonction publique sont mobilisées sous l’égide d’Éric Woerth dans le cadre de son mandat de rapporteur général.
Pour chaque décision du Conseil de modernisation des politiques publiques, les ministères formalisent une feuille de route dans les deux mois suivant la décision, conjointement avec les équipes d’audit et l’équipe d’appui interministérielle.
Cette feuille de route désigne le chef de projet chargé de la mise en oeuvre de chaque réforme ; précise un calendrier de mise en oeuvre, ambitieux et réaliste, pour l’obtention des résultats ; définit des indicateurs de suivi des réformes (avancement et impact) ; identifie les conditions de réussite, par exemple en ce qui concerne les questions de cohérence interministérielle pour la mise en oeuvre de certaines réformes.
Un laboratoire de la nouvelle administration
La Direction générale de modernisation des politiques publiques (DGME) accompagne les ministères dans la conduite de la révision générale des politiques publiques. Elle les soutient dans l’élaboration de leur stratégie de modernisation et dans la mise en oeuvre de leurs projets de transformation en leur apportant de la méthodologie et des outils.
La DGME peut donc être analysée comme un laboratoire de la nouvelle administration. L’enjeu, dans sa nouvelle organisation, a consisté à mettre en application concrètement les règles du jeu de la RGPP, à penser » objectif » avant de penser » structure « , à imaginer des réponses adaptées aux besoins et aux enjeux de transformation rendus nécessaires par la réforme.
La DGME est organisée en trois services
Le service » innovation » définit une stratégie d’amélioration des services rendus aux usagers et imagine l’administration de demain. En s’appuyant sur des outils de benchmark, d’analyse des meilleures pratiques, des dispositifs d’études et de sondages.
Le service » conseil » aide les ministères à se transformer à grande échelle en leur apportant une expertise dans la mise en oeuvre des décisions issues de la RGPP.
Le service » projets » est en charge de la mise en oeuvre de projets interministériels structurants dans les domaines de la simplification, de l’accueil et de l’administration électronique.